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Certains affirment que l'abandon de la plateforme pourrait donner aux mauvais acteurs exactement ce qu'ils veulent des voix crédibles : le silence.
Maintenant qu'Elon Musk a pris le contrôle de Twitter, des professionnels considèrent quitter le réseau social. Cependant, plusieurs affirment que l'abandon de la plateforme donnerait exactement ce que recherchent ceux qui diffusent de la désinformation: le silence.
«De nombreux collègues m'ont déjà dit qu'ils se demandaient ``Comment puis-je réagir à cette prise de contrôle?"», a souligné le professeur Timothy Caulfield, titulaire de la chaire de recherche du Canada en droit et politique de la santé à l'Université de l'Alberta.
«Je pense que la réponse, du moins dans un avenir prévisible, est de ne pas en partir parce que nous avons besoin d'avoir ces voix scientifiques sur la plateforme et, si nous partons, cela devient simplement une énorme chambre d'écho pour la désinformation et cela peut être incroyablement nocif.»
M. Caulfield, qui a gagné plus de 83 000 abonnés sur Twitter pour avoir dénoncé la pseudoscience de personnes comme l'actrice Gwenyth Paltrow, est l'un des nombreux professionnels confrontés à ce qu'il a appelé «un moment étrange, étrange, très étrange» après que Elon Musk - le leader de Tesla et SpaceX connu pour ses décisions commerciales impétueuses - a acheté la plateforme la semaine dernière.
Les journalistes, les responsables de la santé publique, les universitaires et les politiciens comptent depuis longtemps sur la plateforme pour créer des réseaux, se connecter avec le public et diffuser des informations fiables. Les gouvernements, les forces de police, les commissions scolaires et même les services de transport s'appuient également sur Twitter pour assurer la sécurité et l'information du public.
«Je pense qu'il y a certaines professions où il est devenu essentiel d'être sur Twitter», a souligné de son côté Heidi Tworek, titulaire de la chaire de recherche du Canada et professeure à l'Université de la Colombie-Britannique.
M. Caulfield a acquiescé.
«J'ai l'impression que cela fait partie de ma carrière universitaire de suivre les réseaux sociaux», a-t-il témoigné.
«Notre mandat est de lutter contre la désinformation, nous ne pouvons donc pas vraiment abandonner ces plateformes», a-t-il ajouté.
Cependant, dans les jours qui ont suivi l'achat par M. Musk, plusieurs utilisateurs comme M. Caulfield ont vu la quantité de haine et de désinformation augmenter sur Twitter.
«Pour beaucoup de gens, on se demande à quel moment cela devient-il un risque professionnel plutôt qu'un avantage professionnel?», a questionné Mme Tworek.
Elon Musk a songé à vaincre les robots pourrielleurs et à proposer les algorithmes en code source ouvert pour accroître la confiance, mais a également parlé de défendre la liberté d'expression. Beaucoup pensent qu'il pourrait autoriser le retour de personnalités controversées sur Twitter et réduire les efforts de modération.
Par anticipation, certains ont fui la plateforme ou commencé à promouvoir des comptes sur d'autres plateformes.
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Après que M. Musk a pris le contrôle de Twitter, le médecin hygiéniste de Peterborough, en Ontario, a publié un lien vers son compte Instagram au cas où il serait expulsé de Twitter pour ne pas avoir laissé la désinformation sur la pandémie circuler. Le Dr Thomas Piggott a refusé de commenter sa publication.
Certains professionnels font encore plus attention au langage qu'ils utilisent sur Twitter, car ils ne veulent pas attirer les robots ou déclencher la haine.
«Et c'est vraiment malheureux, parce que ceux qui répandent la haine et ceux qui répandent la désinformation, ils ne retiennent pas leurs coups et ils n'hésitent pas», a précisé M. Caulfield.
«Alors quand vous (faites attention à vos paroles par peur), c'est une victoire pour les semeurs de haine», a-t-il prévenu.
Certains suggèrent que la haine pourrait être encore plus amplifiée après que M. Musk a révélé qu'il prévoyait de supprimer les badges bleus de certification de Twitter pour les utilisateurs qui ne paient pas pour Twitter Blue, l'offre d'abonnement. Twitter facture actuellement 6,49 $ par mois pour Blue, mais la certification est gratuite et fournie aux journalistes, célébrités et autres personnalités publiques qui répondent aux critères de l'entreprise.
«Le système actuel des seigneurs et des paysans de Twitter pour qui a et n'a pas de badge bleu est une connerie. Le pouvoir au peuple! Blue pour 8 $/mois», a écrit M. Musk sur Twitter mardi.
En fonction de la façon dont M. Musk ajuste la certification et du nombre d'utilisateurs certifiés prêts à payer pour conserver leur badge, Mme Tworek craint que les gens n'utilisent les nouvelles politiques pour semer la discorde ou répandre de fausses informations.
«Est-ce qu'un utilisateur pourrait payer pour se faire passer pour quelqu'un d'autre? s'est-elle demandé. Comment empêcher les escrocs, qui sont le genre de personnes qui seraient réellement prêtes à payer pour cela?»
Le projet de certification pourrait obliger les grandes organisations comme les gouvernements à payer pour Twitter Blue ou à couvrir les frais de leur personnel pour éviter d'être considérés comme illégitimes.
Ne pas s'y plier pourrait avoir des conséquences importantes, car une marque pourrait être ternie par d'autres qui se font passer pour elle sur des comptes vérifiés, a expliqué Michael Geist, titulaire de la chaire de recherche du Canada en droit de l'Internet et du commerce électronique à l'Université d'Ottawa.
Entrant dans une réunion du caucus mercredi, le premier ministre Justin Trudeau a déclaré que son gouvernement «continuerait d'évaluer» sa façon de communiquer avec les Canadiens à la lumière de la prise de contrôle par M. Musk.
Le ministre de l'Environnement, Steven Guilbeault, qui utilise fréquemment les médias sociaux, a ajouté qu'il était trop tôt pour décider d'une approche.
«Franchement, ce n'est pas quelque chose auquel j'ai beaucoup pensé, a-t-il dit. Je pense que nous verrons quels changements arriveront et ce que cette nouvelle administration signifie pour les médias sociaux.»
Avec des informations de Mia Rabson à Ottawa.