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«Si j'ai un risque génétique, est-ce que ça sert à quelque chose de changer mon style de vie?»
Même les individus dont le risque génétique de démence est le plus élevé peuvent réduire leur risque d'en souffrir en adoptant de saines habitudes de vie, suggère une nouvelle étude américaine.
«C'est une question qu'on me pose souvent quand je fais des conférences auprès du grand public: "si j'ai un risque génétique, est-ce que ça sert à quelque chose de changer mon style de vie?", a commenté la professeure Sylvie Belleville, qui occupe la Chaire de recherche du Canada en neuroscience cognitive du vieillissement et plasticité cérébrale de l'Université de Montréal.
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«C'est vraiment une bonne question, et là nous avons des indications très encourageantes que oui, c'est tout à fait utile.»
Les sept habitudes de vie suggérées par l'American Heart Association pour protéger la santé du coeur et du cerveau sont l'activité physique, l'absence de tabagisme, une alimentation de qualité, la perte de poids, le maintien d'une pression artérielle saine, le contrôle du cholestérol et la réduction de la glycémie.
Les chercheurs du Centre médical de l'Université du Mississippi ont étudié pendant 30 ans 8823 personnes d'origine européenne et 2738 d'origine africaine. L'âge moyen des sujets au début de l'étude était de 54 ans.
Les sujets ont reçu une note de 0 à 14 en fonction de leur respect de ces habitudes de vie, une échelle sur laquelle 0 représente la pire note possible. La note moyenne des participants d'origine européenne était de 8,3 et celle des participants d'origine africaine de 6,6.
Les sujets d'origine européenne ont été répartis entre cinq catégories selon leur risque génétique de démence, et les sujets d'origine africaine, parce qu'ils étaient moins nombreux, entre trois catégories.
Dans les deux cas, les sujets inclus dans la catégorie ayant le risque le plus élevé avaient au moins une copie de la variante génétique APOE e4, qui a été associée à la maladie d'Alzheimer. À l'opposé, la catégorie dont le risque était le plus faible avait la variante APOE e2, qui a été associée à un déclin du risque de démence.
À la fin de l'étude, 1603 des sujets d'origine européenne et 631 des sujets d'origine africaine souffraient de démence.
Mais dans le groupe des participants d'origine européenne, les chercheurs ont constaté que ceux dont le score était le plus élevé quant au respect des habitudes de vie réduisaient leur risque de démence dans les cinq catégories, y compris la catégorie du risque génétique le plus élevé. Pour chaque augmentation d'un point du score des habitudes de vie, le risque de démence reculait de 9 %.
Si on compare les catégories de respect «faible», «moyen» et «élevé» des habitudes de vie, les catégories «moyen» et «élevé» étaient associées, respectivement, à un déclin de 30 % et de 43 % du risque de démence. Chez les sujets d'origine africaine, ces pourcentages étaient respectivement de 6 % et de 17 %.
La démence, et surtout la maladie d'Alzheimer, est un problème très complexe, a rappelé la professeure Belleville, et de multiples facteurs, génétiques, comportementaux et autres, pourront avoir un impact sur le moment où la maladie se manifestera (ou pas) et sur l'importance des symptômes.
«La génétique contribue certes, mais les autres facteurs vont à la fois contribuer au développement de la maladie, mais ils vont aussi contribuer à la protection qu'on peut mettre en place pour se prémunir des effets de la maladie sur notre cognition», a-t-elle expliqué.
Un «risque génétique», poursuit Mme Belleville, reste un «risque» et non une certitude. Et si la génétique fait partie des risques, comme l'âge, qu'on ne peut pas modifier, d'autres facteurs de risque, comme l'alimentation, la sédentarité et le tabagisme, pour n'en nommer que quelques-uns, peuvent en revanche eux être modifiés.
«Les gens qui ont un risque ont parfois une attitude un peu défaitiste, a-t-elle dit. Au contraire, ça devrait nous motiver à changer ces facteurs de risque plus modifiables. (...) Il y a plusieurs choses sur lesquelles on a un impact comme individu, comme société.»
L'effet cumulatif de chaque petit changement apporté dans la bonne direction pourra finir par avoir un impact intéressant, a dit Mme Belleville.
Maintenant qu'une étude témoigne d'une association solide entre de bonnes habitudes de vie et une réduction du risque de démence, il serait intéressant de voir quel impact auraient des interventions qui inciteraient la population à améliorer son mode de vie, a-t-elle estimé en conclusion.
Cette étude a été publiée par le journal médical Neurology.