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Santé

Les matelas exposent-ils les bébés à des substances dangereuses?

Les auteurs recommandent aux parents de désencombrer le plus possible la chambre de leurs enfants, en réduisant au strict minimum le nombre de coussins, de couvertures et de jouets qu'on y retrouve. Sur la photo, des jouets dans une boutique de Toronto en 2023.
Les auteurs recommandent aux parents de désencombrer le plus possible la chambre de leurs enfants, en réduisant au strict minimum le nombre de coussins, de couvertures et de jouets qu'on y retrouve. Sur la photo, des jouets dans une boutique de Toronto en 2023.
Jean-Benoit Legault
Jean-Benoit Legault

Les bébés et les jeunes enfants peuvent respirer et absorber des produits chimiques potentiellement nocifs provenant de leur matelas pendant qu'ils dorment, préviennent des chercheurs de l'Université de Toronto qui publient deux études sur la question.

Ces substances sont liées à des problèmes neurologiques et reproductifs, à l'asthme, à des perturbations hormonales et au cancer.

Même les matelas qui sont pourtant «certifiés» comme étant conformes aux normes peuvent potentiellement exposer les bambins à des plastifiants appelés phtalates, à des retardateurs de flamme et à d'autres produits chimiques nocifs, a précisé la professeure Miriam Diamond.

«On a testé deux matelas certifiés, et il y en a un des deux qui ne respectait pas la réglementation canadienne, a-t-elle dit. Il y a des plastifiants dont l'utilisation est réglementée dans les jouets, mais pas dans les matelas. Les enfants ne devraient pas y être exposés, mais il y n'y a pourtant aucune limite dans les matelas. Ce n'est pas logique si on veut protéger la santé des enfants.»

Lors de la première étude, la professeure Diamond et ses collègues ont mesuré les concentrations chimiques dans vingt-cinq chambres à coucher d'enfants âgés de six mois à quatre ans.

Ils ont mesuré des niveaux détectables de phtalates, de retardateurs de flamme et de filtres UV dans l'air des pièces. À l'exception de deux produits, les niveaux les plus élevés ont tous été mesurés autour du lit, «donc ça provient du matelas, ça provient des toutous», a précisé la professeure Diamond.

Lors de la deuxième étude, les chercheurs ont acheté seize matelas pour enfants neufs à un coût allant de 50 $ à 150 $. Ils ont ensuite été en mesure de déterminer que les matelas sont la source principale de ces produits chimiques.

«Les nourrissons dorment sur le ventre, bougent très peu, leur visage est contre le matelas, et il y a très peu d'échange d'air, a résumé la professeure Diamonds. Ils respirent donc le matelas.»

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Les chercheurs ont sciemment choisi d'étudier les matelas les plus abordables, et non les matelas haut de gamme, puisque ce sont eux qui étaient les plus susceptibles d'être achetés par les consommateurs. Tous les matelas avaient été achetés au Canada, mais la plupart contenaient des matériaux provenant de pays comme le Mexique et les États-Unis.

Les produits chimiques détectés dans le cadre de cette étude sont associés à différents problèmes de santé, comme des troubles d'apprentissage, des scores de QI plus faibles, des troubles comportementaux, des problèmes de mémoire, ainsi que l'asthme et le cancer chez les enfants.

Les enfants sont particulièrement vulnérables à l'exposition à ces substances, étant donné qu'ils sont encore en développement, qu'ils ont un comportement main-bouche et que leur rythme respiratoire est dix fois plus élevé que celui des adultes.

Leur peau est également plus perméable et leur surface cutanée est trois fois plus importante que celle des adultes par rapport à leur poids corporel.

La présence de retardateurs de flammes a notamment interpelé les chercheurs, puisque ces produits chimiques ne sont pas nécessaires pour satisfaire aux normes canadiennes et américaines en matière d'inflammabilité des matelas. 

«Tous les matelas contenaient des retardateurs de flammes, a dit la professeure Diamond. C'est préoccupant parce que les retardateurs de flammes sont associés à des problèmes de santé, au cancer, à une perte de QI, à des problèmes de comportement...»

Pire encore, a-t-elle ajouté, les auteurs ont trouvé dans neuf des seize matelas deux retardateurs de flammes dont le gouvernement canadien propose de restreindre l'utilisation depuis près de dix ans... mais la réglementation nécessaire n'a toujours pas été adoptée. «C'est fou, qu'est-ce qu'on attend?», a demandé la chercheuse.

Les auteurs recommandent aux parents de désencombrer le plus possible la chambre de leurs enfants, en réduisant au strict minimum le nombre de coussins, de couvertures et de jouets qu'on y retrouve.

La literie devrait aussi être changée et lavée très régulièrement, puisqu'elle peut agir comme barrière protectrice.

«Je recommande de placer une serviette éponge entre le matelas et le bébé, a dit la professeure Diamond. Le tissu éponge est conçu pour absorber beaucoup d'eau, donc il va aussi absorber beaucoup de produits chimiques. Et évidemment, il faut ensuite la laver régulièrement.»

Elle suggère enfin d'éviter d'acheter des articles aux couleurs très vives, puisqu'ils contiennent probablement davantage de filtres UV pour empêcher l'affadissement des couleurs, «et certains de ces filtres sont des perturbateurs endocriniens».

Les conclusions de ces études sont publiées par Environmental Science & Technology et Environmental Science & Technology Letters.

Jean-Benoit Legault
Jean-Benoit Legault