Début du contenu principal.
Une manifestation contre la refonte proposée par le Québec de sa loi linguistique a attiré de nombreux manifestants à Montréal samedi.
Une manifestation contre la refonte proposée par le Québec de sa loi linguistique a attiré de nombreux manifestants à Montréal, le 14 mai dernier.
Ce texte est la traduction d'un article de CTV News.
Le gouvernement affirme que le projet de loi 96 est une réforme modérée qui améliorera la protection du français tout en préservant les services en anglais.
Pourtant, les critiques affirment que le projet de loi limitera l'accès aux soins de santé et à la justice, coûtera à des enseignants leur emploi et augmentera le nombre de formalités administratives pour les petites entreprises.
À lire également :
Manifestation conAnglophones et projet de loi 96: «Je me sens comme si ma présence dérangeait»tre le projet de loi 96 à Montréal
Voici cinq raisons pour lesquelles le projet de loi, qui devrait être adopté avant l'été, reçoit autant de critiques :
La présidente du groupe de défense des anglophones Quebec Community Groups Network (QCGN), Marlene Jennings, affirme que la loi pourrait empêcher des centaines de milliers d'anglophones d'accéder à des soins de santé dans leur langue.
Le projet de loi oblige les organismes gouvernementaux, y compris les services de santé, à communiquer avec le public en français sauf «là où la santé, la sécurité publique ou les principes de justice naturelle l'exigent».
Des exceptions s’appliquent pour les personnes qui ont droit à l'éducation en anglais au Québec, ceux qui ont précédemment communiqué avec le gouvernement en anglais et les immigrants qui vivent dans la province depuis moins de six mois.
Mardi, le premier ministre François Legault a assuré que la loi n'affecterait pas l'accès aux services de santé en anglais, mais Jennings est sceptique.
«Nous avons déjà des problèmes, outre la langue, pour accéder à des services de santé de qualité en temps opportun. Le projet de loi 96 va aggraver ces problèmes», a-t-elle déclaré.
À VOIR | Anglophones et projet de loi 96: «Je me sens comme si ma présence dérangeait»
Le projet de loi obligerait tous les étudiants des cégeps anglophones à suivre trois cours supplémentaires en français.
Les étudiants ayant droit à l'éducation en anglais – soit ceux qui ont un parent ou un frère qui a fait ses études en anglais au Canada – seront autorisés à suivre des cours sur la langue française, mais les autres étudiants devront suivre d'autres matières, comme l'histoire ou la biologie, en français.
L'ajout de cours de français dans les établissements anglophones sera un défi, explique le professeur de littérature anglaise au Collège Dawson à Montréal Adam Bright.
La loi obligerait les étudiants n’ayant pas droit à l'éducation en anglais à passer un examen de sortie en français, donc Bright prédit que peu de ces étudiants choisiront des cours de littérature anglaise, ce qui rendra plus difficile leur réussite dans les autres matières.
Il ajoute que son syndicat s'attend à ce que les changements entraînent des diminutions de personnel dans les départements d'anglais.
«Ma femme est également professeur de littérature anglaise à Dawson, donc si ce projet de loi est adopté, nous allons tous les deux perdre notre emploi», a-t-il déclaré.
Le projet de loi élargirait l’application des lois linguistiques de la province, qui ne s'appliquaient auparavant qu'aux entreprises de 50 employés ou plus, à celles qui en comptaient 25 ou plus.
Le vice-président québécois de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, François Vincent, estime que de se conformer à la loi après son entrée en vigueur entraînera de 20 à 50 heures de paperasserie supplémentaires pour les propriétaires d'entreprise.
Certaines entreprises pourraient même avoir à embaucher des consultants pour les aider.
Vincent souligne que s’il est important d'aider les gens à apprendre le français, il ne pense pas que des formalités administratives supplémentaires aideront la cause.
«Demander à un petit garage ou à un petit restaurant du Saguenay-Lac-Saint-Jean qui travaille à 100% en français de remplir des papiers pour que l'Office québécois de la langue française dise ‘’Félicitations, vous travaillez en français’’, ne changera rien», a-t-il déclaré.
Le projet de loi exigerait que tous les documents judiciaires déposés par les entreprises soient en français ou traduits en français et donnerait au ministre de la Justice et au ministre responsable de la langue française le pouvoir de décider quels juges des cours provinciales doivent être bilingues.
Il modifierait également des textes législatifs, notamment la Charte de la langue française du Québec, le Code de procédure civile, la Loi sur la protection du consommateur et la Charte de la Ville de Montréal.
Pearl Eliadis, une avocate des droits de la personne de Montréal, affirme que la complexité des changements proposés pourrait rendre difficile de voir l'étendue de leur implication.
«L'accès à la justice, ce n'est pas seulement d’aller au tribunal ou de pouvoir s'y rendre, c'est aussi d’être capable de comprendre la loi», a-t-elle déclaré.
Le projet de loi invoquerait de manière proactive la clause dérogatoire de la Constitution canadienne pour la protéger des contestations fondées sur la Charte.
Parmi les éléments du projet de loi qui seraient protégés figure une disposition accordant aux inspecteurs de la langue le pouvoir d'effectuer des perquisitions et des saisies sans mandat.
Eliadis affirme que les inspecteurs ne sont pas tenus de démontrer des motifs raisonnables ou des soupçons raisonnables avant d'effectuer une perquisition reliée à la loi.
«C'est plus qu'un ensemble de règles administratives conçues pour renforcer le français, parce qu'elles sont délibérément incluses dans chaque partie de la loi où les droits constitutionnels peuvent être invoqués et essentiellement, d'un coup de pinceau [...] a disparu une bande entière de notre protection constitutionnelle, nous laissant sans recours, a-t-elle déploré. Je crains que l'État de droit ne soit affaibli.»