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Désireux de faire modifier la loi, deux parents qui ont perdu leur fille dans un accident de voiture lié à l’alcool au volant ont souligné jeudi avoir été invités à participer à un cocktail partisan afin de discuter avec la ministre Geneviève Guilbault.
Désireux de faire modifier la loi, deux parents qui ont perdu leur fille dans un accident de voiture lié à l’alcool au volant ont souligné jeudi avoir été invités à participer à un cocktail partisan afin de discuter avec la ministre Geneviève Guilbault.
Jessica Sarli-Rivera n’avait que 26 ans lorsqu’elle a été tuée dans un accident en mars 2017. Elle était passagère d’une voiture conduite par une personne en état d’ébriété qui a percuté un lampadaire sur l’autoroute 20. Le conducteur du véhicule affichait un taux d'alcoolémie dépassant le double de la limite permise par la loi.
Ses parents, Élizabeth Rivera et Antoine Bittar, sont venus plaider pour une diminution de la limite d’alcool légale en place dans le cadre des auditions du projet de loi n° 48 qui réformerait la Code de la sécurité routière.
La famille souhaite notamment voir la limite d’alcool permise diminuée à 0,05. La loi québécoise actuelle fait en sorte qu’il y a infraction criminelle quand une personne conduit un véhicule avec un taux d’alcool égal ou supérieur à 80 mg d’alcool par 100 ml de sang, ou 0,08.
Pétition, lettre ouverte et apparitions médiatiques, M. Bittar et Mme Rivera militent depuis plusieurs années pour modifier la loi.
Or, lorsqu’ils ont voulu faire avancer leur cause plus loin, on aurait recommandé aux parents de participer à un cocktail de financement de la Coalition avenir Québec (CAQ).
Voyez le reportage de Simon Bourassa sur ce sujet dans la vidéo:
M. Bittar, qui était en contact depuis des mois avec la députée Marilyne Picard pour faire resserrer la législation sur l’alcool au volant, s’est fait offrir de rencontrer la ministre Guilbault lors d’une activité militante en octobre en s’inscrivant par Facebook et en payant 100$.
On leur a mentionné que la ministre Guilbault serait présente dans une activité cocktail de financement. «On a acheté des billets à 100$ pour avoir deux minutes [chaque] avec la ministre», a expliqué Mme Rivera, à une question du député libéral de Nelligan Monsef Derraji.
L'activité s'est tenue dans un restaurant le 12 octobre 2023. Les deux parents ont obtenu leur rencontre, mais aux dires de Mme Rivera, celle-ci a été «décevante». «J'ai trouvé ça inacceptable qu'on nous fasse payer 200$ pour rencontrer la ministre.»
Mme Guilbault a confirmé un peu plus tard avoir rencontré les deux parents lors de cette activité. «Ensuite, il y a eu d’autres échanges et d’autres demandes d’informations [...] Conclusion, il ne s’agit pas du tout d’un cas où il fallait payer pour me rencontrer», a dit la ministre dans un point de presse à l'Assemblée nationale.
«Ils avaient déjà obtenu des rencontres avec ma collègue [la députée de Soulanges, Marilyne Picard]. Au besoin il y aurait eu d'autres rencontres.»
Mme Guilbault a assuré être «ébranlée» par le «malaise» causé par les révélations à la commission parlementaire. «J'entendais M. Bittar dire: malheureusement ce que je trouve dommage en ce moment c'est que l'on parle juste de cette affaire de financement au lieu de parler de ma cause. Ça me désole de voir le malaise de ces parents», a expliqué la ministre.
«En aucun cas, je ne fais du financement de manière douteuse. En aucun cas, un citoyen du Québec n’a besoin de payer pour me parler […] De penser que parce que je suis ministre ou députée de Louis-Hébert quelqu’un a besoin de payer pour venir me parler de son dossier, c’est inexact», a-t-elle martelé.
Geneviève Guilbault est formelle sur le fait qu'il n'y avait eu aucun élément «malveillant» ou «douteux» dans cette affaire. Mais la ministre entend toutefois aller «au fond des choses» pour s'assurer que «tout a été fait correctement».
«Quand j'entends ces parents-là qui mènent courageusement cette cause [...] je trouve ça dommage que les partis d'oppositions utilisent cette affaire pour servir une cause politique partisane.»
Mme Picard a également fait amende honorable en début de soirée, jeudi. «C’était une erreur de jugement, et je m’en excuse sincèrement, en mon nom et celui de mon équipe», a-t-elle écrit dans une publication relayée sur les réseaux sociaux.
La députée de Soulanges a ajouté que c'était une de ses collaboratrices qui avait informé la famille endeuillée de la participation de Mme Guilbault à une activité de financement.
«Je fais de la politique pour aider les gens, avec une sensibilité particulière pour ceux qui sont ou qui ont été confrontés à de lourdes épreuves. C’est le sens de mon engagement, et ça le demeurera», a-t-elle conclu.
Ce nouvel épisode incommodant lié au financement à la CAQ survient quelques jours suivant la décision du premier ministre François Legault de renoncer au financement privé.
En octobre dernier, le coroner Yvon Garneau a recommandé aux autorités de réaliser dans les plus brefs délais une analyse de la faisabilité d’abaisser le seuil limite d’alcool dans le sang des automobilistes de 0,08 mg/100 ml à 0,05 mg/100 ml et d’amender le Code de la sécurité routière en conséquence.
Le cabinet de la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, n’avait laissé aucun doute sur le sort qui sera réservé à cette recommandation: «une révision de la limite d’alcool permise au volant n’est pas envisagée par notre gouvernement», avait-on écrit.
Avec de l'information de Patrice Bergeron, La Presse canadienne et d'Émile Bérubé-Lupien pour Noovo Info.