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Les deux Chambres doivent s'entendre sur la même version de la proposition législative pour que la formalité de la sanction royale puisse s'opérer et que le C-18 devienne une loi.
Le projet de loi C-18 visant à forcer les «géants du web» à indemniser les médias d'information pour le partage de leurs articles et reportages a été adopté jeudi par le Sénat et deviendra vraisemblablement réalité au cours des prochains jours, au moment même où Meta bloque l'accès de plusieurs Canadiens à ce même contenu sur Facebook et Instagram.
Une majorité de sénateurs ont donné le dernier feu vert nécessaire pour le renvoi de la proposition législative à la Chambre des communes.
Ce sceau d'approbation s'est concrétisé par un vote en troisième lecture de 51 personnes en faveur et 23 en défaveur. Très peu d'amendements apportés risquent de déplaire au gouvernement.
Cette situation pourrait faciliter la suite des choses si le Nouveau Parti démocratique (NPD) et le Bloc québécois continuent d'être sur la même longueur d'onde que les libéraux de Justin Trudeau, aux Communes, comme cela a été le cas par le passé.
Les deux Chambres doivent s'entendre sur la même version de la proposition législative pour que la formalité de la sanction royale puisse s'opérer et que le C-18 devienne une loi.
En fait, la vaste majorité des amendements soumis par les sénateurs ont l'appui du gouvernement ou, à tout le moins, ce dernier ne s'y oppose pas, selon les indications données par le parrain de la proposition législative à la Chambre haute, le sénateur Peter Harder, durant l'étude article par article en comité sénatorial.
Le gouvernement souhaite, avec ce projet de loi, obliger Google et Meta à conclure des ententes d'«indemnisation équitable» avec les médias canadiens selon plusieurs critères. Les deux entreprises du numérique s'y opposent vigoureusement.
«Nous sommes très préoccupés par la voie sur laquelle nous nous engageons et cherchons de toute urgence à travailler avec le gouvernement pour trouver un compromis qui éviterait un résultat négatif pour les Canadiens et nous ouvrirait la voie pour maintenir et développer nos investissements au sein de l'écosystème des nouvelles au Canada», a déclaré jeudi, par écrit, le porte-parole de la division canadienne de Google, Shay Purdy.
Meta a référé La Presse Canadienne à une page web sur laquelle la société réitère que «si le projet de loi C-18 (...) est adopté, le contenu partagé par les médias d'information, y compris les éditeurs de presse et les radiodiffuseurs, ne sera plus accessible aux utilisateurs de Facebook et Instagram au Canada».
Dans le contexte de la fin de parcours législatif de C-18, Meta a déjà mis en branle, comme annoncé au début du mois, son blocage à la suite de menaces répétées durant des mois, à travers ce qui est présenté comme des «tests». Google avait fait de même en mars et laisse planer la possibilité de revenir à la charge.
Meta a soutenu que ses «tests» doivent permettre d'identifier tout problème avant de définitivement fermer le robinet. Cette semaine, des captures d'écran de personnes n'ayant pas accès aux pages Facebook de quotidiens comme Le Journal de Québec ou La Presse ont largement circulé, déclenchant une vague de dénonciation chez les patrons de presse, les regroupements du monde des médias et la classe politique.
Le ministre du Patrimoine, Pablo Rodriguez, a été de ceux qui ont condamné la tentative d'«intimidation». «Je tiens à remercier les sénateurs pour leur important travail durant l'étude du projet de loi C-18», a-t-il affirmé jeudi dans une déclaration écrite.
Il n'a pas voulu, dans l'immédiat, commenter les amendements du Sénat. «En bout de ligne, on veut continuer d'avoir une presse libre et indépendante, c'est fondamental pour notre démocratie», a-t-il ajouté.
Au dépôt du projet de loi, en avril de l'an dernier, le gouvernement a présenté l'objectif comme celui de donner six mois aux entreprises du numérique pour qu'elles s'entendent volontairement avec un éventail de joueurs, y compris des médias locaux, sans quoi elles se verraient imposer un cadre de négociations en trois étapes.
La première consiste à fixer une échéance d'environ trois mois pour qu'un accord soit trouvé entre les parties. Ensuite, un processus de médiation d'une durée maximale d'environ quatre mois peut être entamé et, en dernier recours, un processus d'arbitrage d'au plus 45 jours.
Un amendement proposé par le Sénat vise à inscrire noir sur blanc le délai de six mois. Un autre changement proposé - le seul auquel le gouvernement s'opposera, selon le sénateur Harder - aurait l'effet de préciser que les médias et les entreprises du numérique doivent discuter, dès la première étape du cadre prévu de négociations, de «la valeur que chaque partie tire du contenu de nouvelles» et de ce qui doit faire l'objet d'un transfert.
Sans la modification, cette «valeur», qui peut être monétaire ou autre, ne sera mentionnée comme devant être considérée qu'au stade de l'arbitrage.
Thomas Owen Ripley, sous-ministre adjoint au ministère du Patrimoine, a dit durant l'étude du C-18 en comité sénatorial que ce choix a été fait dans le souhait que la plupart des négociations se concluent sans la nécessité d'un processus d'arbitrage et pour laisser, dans les étapes antérieures, «une grande marge de manœuvre (et) de discrétion aux parties».