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Chronique |

Trump et droits reproductifs: j’ai mal pour toutes les femmes

«Ce sera quoi ensuite?»

Je me suis levée avec les épaules lourdes et une boule dans le ventre. J’avais le goût de pleurer, de crier, de fuir, de vomir. Au lendemain de la victoire de Trump, plus rapide et écrasante que ce que les sondeurs avaient imaginé, j’ai mesuré à quel point j’avais peur.

Peur pour les femmes, peur pour toutes les minorités.

Peur que Donald Trump, qui a remporté la Maison-Blanche et le Sénat, et qui pourrait aussi prendre le contrôle de la Chambre des représentants, fasse des États-Unis un pays autoritaire, une dictature.

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J’exagère? Avec sa tendance à la désinformation, aux faits alternatifs, à la vérité parallèle, avec sa volonté d’écraser plutôt que d’écouter, à se défendre en attaquant, à manipuler, nier, toujours se déclarer vainqueur, avec ses relents narcissiques et son tempérament bouillant, Donald Trump a tout d’un fasciste et d’un despote.

Et pourtant, il est toujours là. Debout.

Il a été dénoncé, accusé, reconnu coupable. On a tenté de le destituer, mais il n’y a rien à faire. Il est indétrônable. Il demeure le choix des Américains (plus de 72 millions ont voté pour lui comparativement à 67 millions pour Kamala Harris), et ce, malgré ses déclarations sans queue ni tête et ses propos misogynes, racistes, homophobes, mensongers, violents. Et imprévisibles.

Celui qui s’est moqué de la démocratie en mettant le feu à ses troupes de partisans en janvier 2021, ce qui a mené à l’invasion du Capitole, est aujourd’hui déclaré vainqueur par cette même démocratie. Belle ironie.

Trump demeure un mystère pour moi.

Tous les pouvoirs

Si je mets de côté mon incompréhension totale de l’engouement pour le personnage, je deviens carrément décontenancée, ahurie, ébahie lorsque je prends connaissance de ses politiques.

J’entrevois deux années sombres (avant les élections de mi-mandat) pour les femmes, les membres de la communauté LGBTQ+, les immigrants et les minorités. S’il réussit un trifecta (soit prendre le pouvoir à la Maison-Blanche, au Sénat et à la Chambre des représentants), Trump aura la voie libre pour faire la pluie et le beau temps.

Il aura les coudées franches pour faire ce qu’il veut. Avec une Cour Suprême constituée de neuf juges, dont six sont d’allégeance conservatrice (trois ont été nommés par Trump) vs trois progressistes, le président réélu a en plus le pouvoir législatif de son côté.

Comment cela va-t-il se traduire? Où cela va-t-il mener les Américains et nous, leurs voisins?

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Recul accentué

Pour les femmes, en tout cas, cela signifie que le recul déjà entamé en limitant le droit à l’avortement depuis le renversement de Roe vs Wade à l’été 2022 va s’accentuer.

Tout ce qui touche aux droits à la santé reproductive, à la santé des femmes, à la contraception, à l’éducation sexuelle pourrait passer à la trappe. Selon Andréanne Bissonnette, chercheure postdoctorale à l’Université Western Washington et spécialiste des questions touchant les politiques en santé et la santé reproductive, on peut se poser des questions quant au financement des cliniques d’avortement, des ailes d’obstétrique et de gynécologie dans les hôpitaux, des organismes voués aux droits des femmes et des communautés LGBTQ+.

En résumé, « tout peut arriver », me dit-elle, surtout « si le contrôle des trois entités est pris par les républicains ».

Pourrait-on voir débarquer une loi nationale au sujet du droit à l’avortement ? Mme Bissonnette me cite en exemple une politique qui serait déployée partout au pays et limiterait les avortements au-delà du cap des 15 semaines… et ce serait la situation « la moins pire », laisse-t-elle tomber en précisant qu’elle n’endossait pas du tout une telle vision.

Ce serait une catastrophe pour nos voisines du Sud. Les plus pauvres, les moins éduquées, celles qui ont le moins de ressources, celles qui habitent loin des grands centres se retrouveraient sans solution, sans alternative. Les plus nanties choisiront alors probablement de traverser la frontière pour venir se faire soigner chez nous.

Ce sera quoi ensuite?

Les États-Unis deviendraient alors un exemple pour le reste du monde… Une nouvelle ère lugubre où il est normal et banal qu’une partie de la population décide ce que l’autre fait de son corps.

Une catastrophe.

Et je ne peux m’empêcher de me demander d’où proviendra l’autre coup, celui qu’on ne voit pas encore, l’angle mort. Que cache le fameux Projet 2025, une brique de 900 pages concoctées par l’extrême droite, et sur laquelle Trump n’est pas très clair jusqu’ici? Va-t-il s’en inspirer? Que va-t-il retenir de ce document?

Vous pensiez que vous étiez fatiguées, mesdames? 

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