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Société
Lettre |

La mort du français, ça dépend de vous... M. Roberge

Voici une lettre ouverte à l'intention du ministre Jean-François Roberge signée par Lise Nicolas, ex-retraitée comme enseignante en francisation au Centre de services scolaire de la Région-de-Sherbrooke.

Une classe de francisation à Sherbrooke
Une classe de francisation à Sherbrooke
Lise Nicolas
Lise Nicolas

Cher Monsieur Roberge,

En tant que ministre de la Langue française, vous avez lancé, le 16 septembre dernier, une campagne publicitaire destinée à «renforcer la présence du français au sein de notre société», son thème central étant : «L'avenir du français, ça dépend de nous».

Le message de votre ministère est clair: «Au Québec, la situation du français est préoccupante. Nous devons tous agir pour préserver notre langue et renverser la tendance». Ainsi, on nous clame, dans les différents médias, que «c'est en unissant nos efforts que nous protégeons et valorisons le français», car «renforcer notre langue, ça nous regarde tous». Sur ce point, je suis d'accord avec vous.

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Dommage que Jean-François Roberge - ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l'Intégration (MIFI) - et Bernard Drainville, ministre de l’Éducation, n’aient pas entendu ces messages. Car les coupures drastiques imposées par leurs ministères dans le domaine de la francisation, au cours des derniers mois, rendent perplexe. Surtout lorsque je vous entends justifier le coût exorbitant de votre campagne - 2.5 millions de dollars - en affirmant que «ça fonctionne parce que ça fait partie d'un ensemble d'initiatives gouvernementales: affichage, cours de français obligatoires dans les écoles anglophones», etc. Les cours de francisation subventionnés par le MIFI ne devraient-ils figurer sur cette liste? Et y être prioritaires? Y’a pas à dire! Une rencontre entre M. Bernard Drainville, l’autre Jean-François Roberge et vous, s'impose. Les Québécois ont besoin de savoir «où est-ce qu’on s’en va».

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Et lorsque vous déclarez, indigné, qu’:«il n’y a pas de coupes en francisation. [...] Foi de Roberge, le gouvernement Legault n’a pas coupé les budgets en francisation», vous bafouez notre intelligence car la réalité sur le terrain est toute autre. Des milliers d’étudiants se retrouvent sur le banc de touche, inquiets de trouver un nouveau lieu de formation, sans réponses à leurs questions et dépendant de Francisation Québec qui n’est pas reconnue pour son efficacité.

Nous vivons présentement une véritable crise sociale et plus les jours passent plus les slogans, soi-disant géniaux, de votre campagne se teintent d'absurdité. Vous en doutez? Je vous invite à effectuer un exercice avec moi. Imaginez comment ils peuvent être interprétés par les milliers d'étudiants immigrants et les dizaines d'enseignants récemment chassés de leurs lieux de formation dans différentes régions du Québec:

Le Français, ça ne se choisit.... plus.

ça ne s'apprend... plus.

 ça passe à l'offense.

ça se parle… au gouvernement? («Enough is enough!»)

ça laisse sans mots.... surtout les personnes immigrantes.

 ça fait couler beaucoup d'encre... et de larmes.

Bref, Monsieur Roberge, si votre but était bien «d'amener les Québécois à réfléchir et débattre» ainsi qu’«à faire parler», alors c'est réussi! Je suis au moins d'accord avec vous sur un point. Tous les étudiants à qui nous avions donné une voix et leurs proches, tous leurs employeurs ainsi que les enseignant.e.s en francisation pourront vous le clamer :

«Ça nous laisse sans voix!»… surtout pour les prochaines élections.

Pierre Falardeau ajouterait, sans doute : «L’important n’est pas de bien ou de mal parler mais de parler». Sans cette parole, notre langue est vouée à l’extinction.

Lise Nicolas
Lise Nicolas