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Depuis le début de ce Dragqueengate, je n’arrête pas de penser à mon enfance et à mon début d’adolescence. Comment ai-je pu réussir à rester gai malgré toute cette influence hétérosexuelle ? Un tour de force, j’imagine.
Depuis le début de ce Dragqueengate, je n’arrête pas de penser à mon enfance et à mon début d’adolescence. Comment ai-je pu réussir à rester gai malgré toute cette influence hétérosexuelle ? Un tour de force, j’imagine.
Quand j’étais enfant, je tripais solide sur les dessins animés Goldorak. J’ai vu cent fois chaque épisode. J’avais même les jouets. En gros, c’est l’histoire d’un gars extra-terrestre qui défend la terre ben assis dans un robot géant qui peut, entre autres, envoyer des éclairs par ses cornes sur la tête. Et pourtant, ça ne m’a même pas transformé en hétéro. Même pas en robot. Je n’ai même pas acquis la capacité d’envoyer des éclairs par les yeux (je n’ai pas de cornes).
Chaque soir de la semaine, j’ai regardé un monsieur avec un chapeau melon et une fleur à la boutonnière interagir avec sa petite sœur qui elle, était une marionnette qui adorait faire exploser des pétards à la farine. C’était l’émission Bobino. Et pourtant, ça ne m’a même pas transformé en hétéro. Même pas en marionnette. Même pas en terroriste de pétard à la farine. Je ne capote même pas sur les chapeaux melon.
DOSSIER | Drag queens
J’ai suivi avec passion Philo et Bulle dans leur voyage à travers le monde imaginaire et futuriste de Traboulidon à Radio-Canada. C’était Sylvie Léonard qui jouait Bulle. Je n’ai jamais vraiment su si c’était une fille ou un garçon et je m’en foutais royalement, je la-le trouvais tellement cool. Et pourtant, ça ne m’a pas transformé en hétéro. Ni en semi-clown non genré. J’avais même compris que le monde de Traboulidon n’existait pas pour vrai. Je ne suis pas non plus tombé dans l’enfer des drogues dures pour essayer de retrouver une parcelle de ce monde imaginaire bien déjanté.
Ma mère a fait la folie de m’amener voir Fanfan Dédé aux Galeries La Canardière lors de sa tournée sur scène, pas de scène au milieu du centre d’achats, durant ses grosses années de télé avec son émission du même titre. Un monsieur qui chantait avec sa marionnette Finfin, faisait des bricolages avec nous et il s’accotait sur les épaules des enfants pour interpréter la chanson thème de fin d’émission. Oui, il S’ACCOTAIT SUR NOTRE L’ÉPAULE !! Et pourtant, ça ne m’a même pas transformé en hétéro. Même pas en monsieur qui chante, qui bricole et qui s’accote sur les épaules des enfants. Je n’ai pas non plus développé une envie folle de faire des spectacles dans les centres commerciaux.
Je sais qu’on serait porté à croire que je suis hors-norme. Plus fort mentalement et psychologiquement que le commun des mortels. Une force de caractère qui résiste aux assauts pervers de la vie. Et bien non. Pas du tout. Je ne suis pas devenu hétérosexuel parce que ce n’est pas possible. On ne change pas d’orientation sexuelle.
On peut la combattre, la cacher, se faire des accroires, vouloir intensément être autrement, jouer un rôle, mais ça ne changera pas qui on est fondamentalement. On peut être influencé pour bien des choses dans la vie, mais assurément pas pour celle-là. Je sais, ça va fesser comme nouvelle, mais on vient au monde comme on est. Point barre.
Tout ça pour dire qu’aucun enfant ne sera changé dans sa nature profonde par une drag queen qui lui raconte des histoires pendant un deux heures dans une salle communautaire sous la supervision de leurs parents. Pas plus que je ne serais devenu hétérosexuel en allant fendre du bois deux heures avec des bûcherons dans le bout de la Baie-James (je sais que mon exemple fait cliché, mais ça reste le même principe que pour le conte).
Et ultimement, ce n’est pas une obligation pour personne d’y amener ses enfants. Personne. Ça n’est pas au programme du ministère. C’est du domaine de l’activité familiale au même titre que le Biodôme, la crazy carpet sur le Mont-Royal et aller faire des dessins laites sur des tasses avant de les sacrer dans un gros four.
Tu as aussi tout à fait le droit de ne pas être d’accord avec cette activité. Il n’y a aucun problème là-dedans. Chacun est libre de choisir. Le problème arrive quand tu décides que ça n’a pas sa place en société parce que TOI tu n’es pas d’accord et que tu juges que ce n’est pas bien. Personne n’a ce monopole.
On vit en société et c’est un partage de beaucoup de choses. Je ne suis pas très fan de la musique heavy métal, mais je n’irai pas manifester devant le Centre Bell avant un spectacle d’Iron Maiden (je ne suis même pas sûr que c’est un band heavy métal) pour qu’ils retournent chez eux. Je passe mon chemin et je continue ma vie. Rien de plus simple.
Je nous souhaite plus d’ouverture, plus de bienveillance. Je nous souhaite d’arrêter de faire des amalgames plus que douteux entre des personnes et des déviances.
Je nous souhaite plus de «ça ne m’intéresse pas, mais ça a le droit d’exister». Je ne demanderai jamais à personne de m’accepter tel que je suis, je peux très bien vivre sans ça, mais je revendique le respect au même titre que n’importe qui.
Tout ça m’a donné envie de visionner mes vieux DVD de Goldorak.
Il y a toujours du positif quelque part…