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Le projet de loi 31, déposé vendredi par la Coalition avenir Québec (CAQ) lors de la toute dernière journée de la session parlementaire, permettrait aux propriétaires de refuser les avis de cession de bail de logement émis par leur locataire.
Le projet de loi 31, déposé vendredi par la Coalition avenir Québec (CAQ) lors de la toute dernière journée de la session parlementaire, permettrait aux propriétaires de refuser les avis de cession de bail de logement émis par leur locataire.
En vertu du projet déposé par la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, «le locateur qui est avisé de l’intention du locataire de céder le bail» pourrait «refuser d’y consentir pour un motif autre qu’un motif sérieux».
À l’heure actuelle, le Code civil du Québec stipule qu’un «locateur ne peut refuser de consentir à la sous-location du bien ou à la cession du bail sans un motif sérieux».
Le projet de Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière d’habitation était attendu depuis très longtemps par les autres partis, à l'heure où sévit une crise du logement au Québec.
«Nul doute que le dépôt du projet de loi était très attendu, très, très attendu», a d’ailleurs commenté Monsef Derraji, député libéral, lors de la période des questions à l’Assemblée nationale. Le projet de loi fera l’objet de consultations particulières de la part de Derraji et du Parti libéral du Québec (PLQ).
Juste avant le dépôt du projet de loi, la députée solidaire Manon Massé s'est dite choquée, pour sa part, de la manière dont la CAQ a géré ce dossier.
Cela fait des années que la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORIQ) demande au gouvernement de sévir contre les cessions de bail, qui donneraient lieu à un problème de «marchandage des loyers et de revente de baux».
«Ça devenait lourd, cette multiplication des cessions de bail. C’est une bonne nouvelle dans le projet de loi», a commenté Marc-André Plante, directeur des Affaires publiques et des Relations gouvernementales de la CORPIQ, en entrevue avec Noovo Info.
Mais une telle disposition ouvrira-t-elle la porte à des abus des propriétaires, comme des évictions illégales ou des rénovictions? Non, croit la CORPIQ, parce que le PL31 maintiendrait la section G d’un bail donné, section qui oblige le locateur à divulguer le montant le plus bas payé pour le loyer au cours des 12 derniers mois.
En mai dernier, Noovo Info diffusait un reportage sur la masse de personnes intéressées par un bail à 1000 $ par mois sur le Plateau–Mont-Royal, à Montréal. Dans le cadre de ce reportage, le journaliste Louis-Philippe Bourdeau constatait que la cession de bail est une pratique courante, mais que les statistiques crédibles manquent à l’appel pour connaître l’ampleur du phénomène. Des dizaines de milliers de personnes font partie de groupes Facebook à cet effet.
«C’est rendu un des seuls moyens de louer en bas du marché. C’est une manière de se solidariser entre locataires», expliquait l’avocat en droit du logement Me Daniel Crespo Villarreal, dans un entretien avec Noovo Info.
Les propos de Me Crespo Villarreal trouvent écho dans la réaction du Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), un regroupement de lutte pour le droit au logement. En l'absence d’un registre universel des baux et d’un contrôle des loyers, les cessions de bail sont «souvent la seule façon d’éviter les hausses de loyer abusives pour un locataire», a déploré la porte-parole Véronique Laflamme dans un échange téléphonique avec Noovo Info. Mme Laflamme parle d'un «grand recul» dans le droit au logement.
Québec solidaire (QS) n'a pour sa part jamais cessé de talonner le gouvernement pour qu'il agisse en matière de logement. Le dépôt du jour n'a pas plu au deuxième parti d’opposition à l’Assemblée nationale, qui a réagi avec vigueur. Pour QS, «la ministre Duranceau s’attaque à un des acquis les plus importants pour les locataires: le droit de céder son bail».
«La CAQ met en péril les cessions de bail, qui sont le dernier rempart des locataires pour se protéger contre la hausse fulgurante des loyers. C’est un immense recul pour les locataires, on ne laissera pas ça passer», a prévenu Andrés Fontecilla, porte-parole solidaire en matière de logement, dans une déclaration relayée par communiqué.
Parmi les autres modifications prévues par le projet de loi 31, la clause F permettrait aux propriétaires de nouveaux logements de hausser les loyers sans être assujetties à la grille du Tribunal administratif du logement (TAL).
Si le projet de loi est adopté, le propriétaire de tels logements devra indiquer dans le bail le montant maximal du loyer pour les cinq prochaines années.
Également, lorsqu'un locataire recevra un avis d'éviction et qu'il ne répond pas avant la date limite, on considérera, par défaut, qu'il l'a refusé.
Dans le cas d'une reprise de logement ou d'une éviction, un locataire pourrait être dédommagé si le propriétaire a agi de mauvaise foi.
Juste avant le dépôt du projet de loi, la porte-parole solidaire, Manon Massé, s'est dite choquée de la manière dont la CAQ a géré ce dossier.
«De le déposer la dernière journée de la session parlementaire, c'est envoyer le signal que ce n'est pas important pour eux autres», a-t-elle lancé.
Avec la collaboration de Jean-Christophe Côté et d'Émilie Clavel pour Noovo Info, ainsi que de l'information de Thomas Laberge, La Presse canadienne.
Note de la rédaction: La version originale de cet article indiquait que Monsef Derraji était porte-parole de l'opposition officielle en matière d'Habitation, alors que ce n'est pas le cas. Pour plus d’information, consultez les normes éditoriales de Noovo Info.