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«Ma plus grande peur est de mourir en prison», a avoué M. Speidel lors d'un entretien téléphonique avec CTV News.
Après plus de quatre décennies dans une prison fédérale, Ed Speidel se bat pour obtenir une libération conditionnelle afin de pouvoir mourir à l'extérieur, dans une maison de transition, plutôt que dans sa cellule de prison.
Ce texte est une traduction d'un article CTV News
Mais après s'être vu refuser la libération conditionnelle et avoir été débouté de son appel, il craint désormais de vivre une mort douloureuse, en luttant pour respirer derrière les barreaux.
«Ma plus grande peur est de mourir en prison. Je ne veux pas mourir en prison», a avoué M. Speidel lors d'un entretien téléphonique avec CTV News depuis un bureau de l'Institution Matsqui, une prison de sécurité moyenne située à Abbottsford, en Colombie-Britannique.
Âgé de 62 ans, il souffre d'une maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) au stade terminal, ainsi que de douleurs chroniques et de polyarthrite rhumatoïde. Les tests montrent que ses poumons ne fonctionnent qu'à 19% par rapport à des adultes en bonne santé.
«J'ai des jours où j'ai beaucoup de mal à respirer, c'est comme si on m'étranglait, comme si j'étouffais», a lancé M. Seidel.
Il a besoin d'oxygène 24 heures sur 24. Pourtant, juste avant son entretien téléphonique avec CTV, il a dit s'être battu pour que le personnel lui fournisse un appareil d'oxygène portable pour se rendre dans la salle où se déroulerait l'entretien.
M. Speidel, qui utilise un déambulateur et passe la plupart de son temps dans sa cellule, affirme qu'il ne représente en aucun cas une menace pour le public.
«J'étais un crétin. (J'ai commis) des vols. Mais je n'ai blessé personne», a-t-il dit. «J'ai purgé 41 ans. J'ai fait mon temps. Rien n'est accompli en me maintenant ici.»
Lors d'une audience en juillet 2022, il a demandé une libération conditionnelle pour exception - plus communément appelée libération conditionnelle pour des motifs de compassion - pour raisons liées à l'âge et au temps déjà servi. Il n'était pas représenté par un avocat et sa demande a été refusée.
Il a obtenu un soutien juridique au début de l'année. Lisa Crossley, qui travaille avec les Services juridiques pour les détenus à Vancouver, affirme que le dossier est renforcé par une note d'un médecin de l'institution, recommandant que la commission des libérations conditionnelles envisage une libération conditionnelle pour M. Speidel compte tenu de son état de santé dégradant.
Mais la demande d'une audience accélérée pour la révision de son cas le 8 juillet a été rejetée. M. Speidel souhaite faire une demande pour bénéficier de l'aide médicale à mourir, bien que ce n'est pas vraiment son premier choix.
«Pour la grande majorité des personnes en phase terminale, quels sont vraiment les risques qu'elles représentent? Je pense que cela devrait être pris en compte et qu'il devrait y avoir plus d'options pour ces personnes», a souligné Lisa Crossley à CTV News.
Néanmoins, Me Crossley continuera de plaider pour une audience de libération conditionnelle accélérée et pour un autre appel concernant une libération conditionnelle pour des raisons de compassion. Elle pense que c'est le premier cas de ce genre dans le pays qui mettra en lumière la situation difficile des prisonniers âgés et malades.
«C'est une question d'importance publique qui concerne de nombreuses personnes en prison fédérale», a-t-elle ajouté.
Sur les 6 886 détenus actuellement dans les prisons fédérales en 2023, plus de 1 700 (25,6%) ont 50 ans et plus et sont classés comme délinquants vieillissants.
Les enquêtes montrent que les détenus vieillissent plus rapidement en raison de leur mode de vie passé, des taux élevés de toxicomanie et du stress de l'incarcération.
On observe des taux plus élevés de maladies liées à l'âge, notamment le cancer, le diabète, les maladies pulmonaires et la démence.
Ivan Zinger, enquêteur correctionnel du Canada, affirme qu'une étude réalisée en 2019 l'a inquiété.
«Nous avons vu un nombre démesuré de prisonniers qui étaient soit en phase terminale, soit atteints de démence ou d'Alzheimer, qui avaient de graves restrictions de mobilité, qui étaient cloués au lit. Et toutes ces personnes, on se demande ce qu'elles font dans une prison», a-t-il déclaré lors d'une entrevue réalisée depuis son bureau d'Ottawa, en Ontario.
«Les prisons et les pénitenciers n'ont jamais été conçus pour être des maisons de retraite, des établissements de soins de longue durée ou des hospices. Et c'est ce qu'elles sont devenues. Et c'est tout simplement inacceptable», a ajouté M. Zinger.
Dans une déclaration envoyée à CTV News, des responsables du Service correctionnel du Canada ont indiqué qu'ils ne pouvaient pas commenter les détenus spécifiques ni leurs dossiers, mais ont écrit que l'agence «reconnaît qu'il existe des défis pour répondre aux multiples besoins des délinquants vieillissants, mais reste engagée dans ses efforts pour continuer à développer des stratégies pour répondre à ces besoins».
Entre temps, la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) est responsable de prendre des décisions concernant les libérations conditionnelles exceptionnelles et lorsque les délinquants ne présentent pas de risque pour le public. Dans un courriel adressé à CTV News, des responsables de la CLCC ont écrit que la commission a accordé 29 libérations conditionnelles pour exception à tous les groupes d'âge entre 2019 et début 2023. Parmi celles-ci, 13 concernaient des détenus âgés de 60 ans et plus.
Cela représente environ quatre libérations conditionnelles par an et démontre, selon Zinger, que le système correctionnel n'offre pas suffisamment de libérations conditionnelles pour raisons médicales.
«Chaque année, jusqu'à 40 personnes incarcérées décèdent dans les pénitenciers canadiens de "causes naturelles", le plus souvent des maladies en phase terminale», a-t-il noté. «Aucun de ces individus n'a bénéficié d'une libération conditionnelle, même si leur décès était attendu ou imminent.»
Par ailleurs, des études montrent que le coût du maintien en prison d'un délinquant vieillissant peut être deux à quatre fois plus élevé que celui d'un hébergement dans une maison de transition avec soutien médical.
M. Zinger pointe d'autres juridictions, comme aux États-Unis et en Europe, qui construisent des maisons de retraite sécurisées pour les détenus, où ils peuvent être transférés après l'âge de 65 ans ou s'ils développent des maladies chroniques ou mortelles.
Au Canada, il existe au moins cinq maisons de transition sécurisées qui acceptent des détenus vieillissants, avec environ quatre douzaines de lits. La Haley House, à Peterborough en Ontario, dispose de 10 lits et espère ouvrir une deuxième maison avec 10 autres lits cet automne. Cependant, le gestionnaire du dossier, Jeff Morgan, écrit que les installations existantes ne «satisfont guère aux besoins des délinquants vieillissants qui sortent des établissements fédéraux ou qui doivent être libérés.»
Sans indication s'il sera libéré prochainement, Speidel a demandé l'aide médicale à mourir (AMM) et attend une évaluation médicale. Le processus prend généralement trois mois ou moins.
Il affirme qu'il préférerait mourir naturellement dans une maison de transition supervisée. Mais sa prochaine audience régulière de libération conditionnelle pourrait être en 2024.
«Ce qu'il semble, c'est qu'il est plus facile de se tuer ici, avec leur (aide médicale), que de tenter de les convaincre de me laisser sortir. Et je ne comprends pas pourquoi», s'est demandé M. Speidel.
CTV a rapporté plus tôt en 2023 qu'il y a eu une faible augmentation, mais notable des décès avec l'AMM parmi les détenus, à des taux supérieurs à ceux dans la plupart des autres pays qui autorisent l'AMM.
Le rapport de 2019 de Zinger a également averti qu'en l'absence d'une meilleure planification pour les détenus vieillissants et malades, il y aurait une vague de demandes pour l'AMM.
«L'autorité correctionnelle du Canada ne devrait pas être perçue comme étant impliquée dans la facilitation de quelque type de décès derrière les barreaux. Cela est tout simplement incompatible avec l'obligation du Service correctionnel Canada de protéger et de préserver la vie», a-t-il écrit.
Pourtant, le cas de M. Speidel suggère que c'est exactement ce qui se produit.
Il souhaite bénéficier d'une liberté conditionnelle pour mourir de sa propre volonté. Mais le processus d'approbation pour l'AMM pourrait être plus facile - un problème que son avocate estime nécessaire d'aborder.
«Sommes-nous à l'aise avec le fait que des personnes puissent demander l'AMM et l'obtenir en un mois ?», a lâché Me Crossley. «Si vous êtes admissible à l'AMM, si vous remplissez toutes ces conditions, représentez-vous vraiment un tel risque pour la communauté que vous ne devriez pas être admissible à une forme de libération?», a-t-elle ajouté.
Pour M. Speidel, c'est un choix simple et binaire.
«J'espère vraiment être libéré car sinon, j'opterai pour l'AMM. Je ne vais pas rester ici, incapable de respirer, jusqu'à ce que je m'écroule en étouffant», a-t-il conclu.