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Jamais, dans l’histoire canadienne, un politicien n’aura été autant fédérateur de sentiments patriotiques que lui.
Ne craignons pas les mots: jamais, dans l’histoire canadienne, un politicien n’aura été autant fédérateur de sentiments patriotiques que Donald Trump. Tant pis pour Laurier, Pearson, Trudeau et Mulroney. Nice try, les gars. Mais Donald vous clenche. Solide.
Au point où la guerre tarifaire et les menaces d’annexion auront amené d’irréductibles bloquistes à se pincer le nez et voter libéral, pour la première — et probablement la dernière fois — de leur existence d’électeur.
Au point où le tournoi des 4 nations, malgré la présence d’un seul Québécois, troisième gardien de surcroît, aura néanmoins scotché la nation entière à l’écran.
Au point où la formidable avance conservatrice aura fondu comme neige au Panama, les similitudes entre Poilievre et le président ayant magiquement propulsé l’électorat dans les bras de Carney, seul jugé suffisamment apte à défendre le territoire, économie incluse, du pays.
Au point où l’ombre trumpiste aura siphonné l’essence, sinon la totalité, de la dernière campagne, reléguant tout autre enjeu au rang de quasi-insignifiance.
Beat this.
Ç’aurait été d’ailleurs mal connaître le boss que de croire, un instant seul, qu’il allait passer outre l’occasion de réitérer ses velléités au moment du vote:
«Bonne chance au grand peuple du Canada. Élisez l’homme qui a la force et la sagesse de réduire vos impôts de moitié, d’augmenter votre puissance militaire, gratuitement, au plus haut niveau mondial, de quadrupler la taille de vos entreprises de voitures, d’acier, d’aluminium, de bois d’œuvre, d’énergie et de toutes les autres, SANS TARIFS NI TAXES, si le Canada devient le 51e État chéri des États-Unis d’Amérique.»
Il ajoute:
«Plus de ligne artificiellement tracée il y a de nombreuses années. Regardez comme cette masse terrestre serait belle. Accès libre SANS FRONTIÈRE. QUE DU POSITIF SANS DU NÉGATIF. C’ÉTAIT DESTINÉ À ÊTRE! L’Amérique ne peut plus subventionner le Canada avec les centaines de milliards de dollars par an que nous avons dépensés dans le passé. Cela n’a aucun sens si le Canada n’est pas un État!»
Le paradis sur terre, bien entendu.
Rien ne sert, le job ayant été fait maintes fois, de pointer l’ensemble stratosphérique des bêtises ou mensonges inclus dans aussi peu de mots. Reste, cela dit, que l’heure est grave. Parce que frime ou non, côté motifs, force est d’admettre que l’obsession d’annexion risque potentiellement de se transposer, avant longtemps, en fait accompli.
D’aucuns me questionnent, ici et là, à savoir en quoi le droit pourrait nous être utile afin d’éviter ladite annexion, le chantage actuel ou l’ingérence étrangère en plein jour de vote. La réponse courte? En rien. Ou presque.
Sans reprendre les détails déjà discutés dans une chronique précédente, disons simplement l’évidence, soit que le droit international, condensé de belles intentions, repose sur une seule chose: la bonne foi des États puissants. Pas tout à fait la marque de commerce de l’Oncle Sam, avouons-le, surtout depuis le retour de Donald.
Alors quels espoirs, au moins relatifs? Quelques-uns, à mon sens.
D’abord, le fait qu’à force de tirer partout, Trump risque sous peu de manquer de munitions. Il y a quand même des limites inhérentes à la capacité de courir, même avec une énergie hors norme, tous ces lapins à la fois. Notons aussi que les menaces d’annexion, qu’elles visent le Panama, le Groenland ou encore nous-mêmes, sont demeurées, à ce jour, au stade de bravades d’ours mal léchés. Parlez-en à J.D. Vance, seul et humilié dans un banc de neige danois, et fui autant par les résidents que les pingouins du coin.
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Ensuite, que les lois naturelles de l’échiquier géopolitique se feront entendre sous peu. Baver la Chine, sérieusement? L’ensemble de l’Europe? Partie importante de la poudrière du Moyen-Orient? Se frictionner avec la Russie sur la question ukrainienne? Qui, en d’autres termes, ne se retrouve pas actuellement à même le popotin de Donald? Personne, ou presque. Et l’inverse est aussi vrai, naturellement. Conséquence? Qu’un jeu d’alliance prendra forme, incessamment, neutralisant la folie américaine.
Troisièmement, l’aspect purement économico-commercial de l’affaire. Qui, chez les industriels influents, apprécie de voir ses intérêts malmenés de la sorte? Qui, à part les sbires trumpistes profitant des présumées malversations boursières, pour se satisfaire de voir l’économie mondiale s’écrouler de la sorte? Qui pour rigoler de l’assassinat des socles du libre-échange sur lesquels repose le capitalisme contemporain. Pas grand-monde.
Morale de l’histoire? Ces mêmes industriels, à l’instar d’autres puissances politiques et leurs alliés, pourraient s’en mêler incessamment et ainsi stopper la folie présidentielle, menaces d’annexion comprises. On se le souhaite, du moins. Parce que peu importe le CV du premier ministre canadien, il y a peu, ou rien à faire, face à une invasion de blindés.