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Politique

Mark Carney demande le réexamen d'une commande de F-35 à une compagnie américaine

Un attaché de presse du ministre de la Défense a affirmé toutefois que le contrat n'a pas été annulé

L'icône d'un F-35 avec un drapeau canadien apparaît à l'écran alors que J.R. McDonald de Lockheed Martin s'exprime au cours d'une conférence de presse au salon CANSEC, à Ottawa, le 1er juin 2022.
L'icône d'un F-35 avec un drapeau canadien apparaît à l'écran alors que J.R. McDonald de Lockheed Martin s'exprime au cours d'une conférence de presse au salon CANSEC, à Ottawa, le 1er juin 2022.
Anja Karadeglija
Anja Karadeglija / La Presse canadienne

Le premier ministre Mark Carney a demandé un examen du projet canadien d'acquisition d'une flotte d'avions de chasse F-35.

L'accord conclu avec Lockheed Martin et le gouvernement américain porte sur 88 avions, pour un coût d'environ 85 millions $ US chacun.

Un porte-parole du ministre de la Défense, Bill Blair, a affirmé que M. Carney lui avait demandé d'examiner si le contrat pour les F-35 constituait le meilleur investissement pour le Canada, ou s'il existait de meilleures options.

«Nous devons faire nos devoirs compte tenu de l'évolution du contexte et nous assurer que le contrat, dans sa forme actuelle, sert au mieux les intérêts des Canadiens et des Forces armées canadiennes», a indiqué Laurent de Casanove, attaché de presse de M. Blair.

Le contrat n'a pas été annulé, et le Canada s'est légalement engagé à acheter les 16 premiers appareils, a précisé M. de Casanove.

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M. Carney est devenu premier ministre vendredi, en pleine guerre commerciale avec les États-Unis et sous les menaces du président américain Donald Trump d'annexer le Canada.

La nouvelle flotte est destinée à remplacer les CF-18 vieillissants de l'Aviation royale canadienne. Les quatre premiers des 88 appareils devraient être livrés en 2026 et les 18 derniers en 2032.

Dans une entrevue accordée vendredi à CBC, le ministre Blair a déclaré qu'il examinerait si tous les avions devaient être des F-35, ou s'il existait d'autres solutions, «particulièrement lorsqu'il existe des possibilités» d'assembler, de soutenir et d'entretenir les avions au Canada.

«Le premier ministre m'a donné comme directive d'examiner toutes les options possibles afin de prendre la bonne décision pour le Canada», a-t-il affirmé.

M. Blair a indiqué qu'il consulterait l'Aviation royale canadienne, le chef d'état-major de la Défense et le ministère de la Défense nationale, ainsi que les alliés et partenaires, «pour voir ce qui est possible».

Un porte-parole de Lockheed Martin a renvoyé les questions aux gouvernements canadien et américain.

«Lockheed Martin apprécie notre solide partenariat et notre histoire avec l'Aviation royale canadienne et se réjouit de poursuivre ce partenariat à l'avenir», a dit l'entreprise dans un communiqué.

La Maison-Blanche n'a pas répondu à une demande de réactions samedi après-midi.

Une entreprise colossale

Michael Byers, professeur à l'Université de la Colombie-Britannique et codirecteur de l'Outer Space Institute, a déjà soutenu que le Canada devrait annuler le contrat, car les avions sont hautement informatisés. Lockheed Martin refusant de partager l'intégralité du code source, le Canada ne pourrait jamais en avoir le contrôle total.

Il a mentionné samedi que les 16 avions déjà payés par le Canada constituent des coûts irrécupérables et que le pays devrait «limiter ses pertes».

«Nous avons besoin d'avions capables de fonctionner au maximum de leurs capacités sans systèmes informatiques contrôlés par les États-Unis», a-t-il déclaré.

Philippe Lagassé, professeur agrégé à l'Université Carleton spécialisé en politique et approvisionnement en matière de défense, a souligné qu'une transition à grande échelle est en cours pour passer des CF-18 aux F-35, qui ne concerne pas seulement les avions, mais aussi «l'infrastructure, la formation, les munitions et les structures opérationnelles pour l'Amérique du Nord».

M. Lagassé, qui a également siégé au comité d'examen indépendant chargé d'examiner les options de remplacement des CF-18, a avancé que modifier tous ces plans constituerait une entreprise colossale.

«Tout cela est possible, mais cela exercera une pression considérable sur l'Aviation royale canadienne et laissera le Canada avec des capacités réduites pendant un certain temps», a-t-il affirmé.

Opter pour une flotte mixte de F-35 et d'un autre avion «serait moins perturbateur, mais coûteux et complexe».

Le directeur parlementaire du budget a indiqué que le coût total d'achat, de vol et d'entretien de la nouvelle flotte de F-35 serait estimé à 73,9 milliards $. Un rapport de 2023 estimait que la phase d'acquisition coûterait 19,8 milliards $, dont 10,7 milliards $ pour 88 avions, 2,1 milliards $ pour les armes et les munitions, et 5,9 milliards $ pour des éléments comme la conception et les coûts de dépôt, les infrastructures et la formation.

Le projet d'achat des avions est en préparation depuis des années. En 2010, le gouvernement conservateur s'était d'abord engagé à acheter 65 F-35 sans appel d'offres, mais des inquiétudes quant au coût et aux capacités l'ont forcé à reconsidérer sa décision.

En 2015, les libéraux ont promis de lancer un appel d'offres ouvert pour remplacer les CF-18 et de ne pas acheter les F-35. Ils ont annulé le projet d'achat de 18 Super Hornets après que Boeing a lancé un différend commercial avec l'entreprise aérospatiale montréalaise Bombardier, lançant un appel d'offres ouvert pour la nouvelle flotte en juillet 2019.

Dans une déclaration, le porte-parole conservateur en matière de défense, James Bezan, a accusé les libéraux de jouer à des jeux politiques avec le processus de remplacement des CF-18, affirmant que l'Aviation royale canadienne «aurait dû disposer de nouveaux avions de chasse maintenant».

M. Bezan a toutefois indiqué que, si les États-Unis «continuent de démontrer qu'ils sont un partenaire et un allié peu fiable, le Canada devra alors chercher d'autres options pour les achats de matériel de défense des Forces armées canadiennes».

Anja Karadeglija
Anja Karadeglija / La Presse canadienne