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Politique

L'itinérance est absente de la campagne électorale même si la crise s'aggrave

«Ces questions sont importantes et font partie de ce dont (les candidats) devraient parler et défendre.»

Susan Smith pose pour une photo dans le quartier Fort Townshend de Saint-Jean, à Terre-Neuve-et-Labrador, le mardi 15 avril 2025.
Susan Smith pose pour une photo dans le quartier Fort Townshend de Saint-Jean, à Terre-Neuve-et-Labrador, le mardi 15 avril 2025.
Sarah Smellie
Sarah Smellie / La Presse canadienne

Des efforts sont en cours pour aider les personnes en situation d'itinérance à voter lors des élections fédérales, même si l'enjeu de l'itinérance a été relégué au second rang pendant la campagne en raison de l'attention portée à ce qui se passe au sud de la frontière.

La Presse Canadienne s'est entretenue avec des travailleurs de première ligne de tout le pays qui affirment que la crise de l'itinérance s'aggrave et que leurs capacités sont mises à rude épreuve.

Les personnes en situation d'itinérance sont impatientes à l'idée de voter, mais peu de candidats s'adressent à eux ou répondent à leurs besoins, selon les défenseurs de leurs droits.

«Les décisions prises par tous les ordres de gouvernement affectent les personnes en situation d'itinérance de manière disproportionnée», a soutenu Susan Smith, de l'organisme End Homelessness St. John's,  à Terre-Neuve-et-Labrador.

«Ces questions sont importantes et font partie de ce dont (les candidats) devraient parler et défendre.»
-Susan Smith, de l'organisme End Homelessness St. John's,  à Terre-Neuve-et-Labrador.

Il y a un peu plus d'un an, l'itinérance était un enjeu politique majeur, alors que le défenseur fédéral du logement publiait un rapport sur la croissance persistante des campements. Il appelait à une stratégie nationale pour résoudre le problème.

 

Or, la guerre commerciale mondiale menée par le président américain, Donald Trump, et ses appels à l'annexion du Canada ont monopolisé l'attention dans les dernières semaines.

À la Siloam Mission, à Winnipeg, les 143 lits sont pleins tous les soirs depuis près de deux ans, selon son directeur du développement, Darren Nodrick. «C'est sans précédent», a-t-il confirmé.

Le personnel va installer un bureau de vote dans le refuge et aide les personnes qui le fréquentent à se préparer à voter. Jusqu'à présent, un seul candidat local, le libéral Rahul Walia, a contacté le refuge pour s'y rendre, a souligné M. Nodrick, ajoutant qu'il souhaiterait que davantage de candidats fassent cet effort.

«C'est crucial et important, et c'est quelque chose qui doit rester une priorité», a-t-il tranché.

À Saskatoon, au centre d'hébergement Crossroads Residential Services de l'Armée du Salut, les personnes en situation d'itinérance aimeraient parler aux candidats locaux, selon le directeur général Gordon Taylor.

«La clientèle nous dit qu'elle a l'impression de ne pas être entendue», a mentionné M. Taylor.

Frustration

Depuis le début de la campagne, Jim Gurnett, de l'Edmonton Coalition on Housing and Homelessness, publie chaque jour sur les réseaux sociaux une photo illustrant la crise de l'itinérance.

Bâches aux couleurs vives attachées pour former des abris de fortune et tentes alignées dans des campements témoignent de la «misère causée lorsque les gouvernements ignorent le droit fondamental des gens au logement», peut-on lire dans ses publications.

«Je suis vraiment frustré, a affirmé M. Gurnett en entrevue. Je comprends que les problèmes liés aux droits de douane font passer les autres enjeux au second plan. Mais les gens doivent comprendre que, si tout le monde ne dispose pas d'un logement adéquat, les coûts sociaux et économiques qui en découlent sont gigantesques.»

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Un rapport publié la semaine dernière par la Mission d'Ottawa révélait que la population de sans-abris dans la capitale fédérale comptait désormais environ 3000 personnes.

Environ 500 d'entre elles vivent dans la rue, certaines à portée de vue de la colline du Parlement. La porte-parole de la Mission, Aileen Leo, a soulevé que le rapport a été publié pendant la campagne électorale spécifiquement pour attirer l'attention des partis sur la situation.

«Il y a eu une augmentation choquante du sans-abrisme, mais il y a aussi eu une augmentation choquante du sans-abrisme non accompagné, ce qui est très troublant», a déclaré Mme Leo.

«Nous avons besoin d'une réponse gouvernementale forte et adéquate.»

Voter quand on est sans-abri

Il est difficile pour les personnes en situation d'itinérance de voter, car elles sont souvent d'abord concentrées sur leur survie et n'ont ni papiers d'identité ni adresse permanente.

Malgré tout, selon Mme Leo, beaucoup d'entre elles sont déterminées à voter. Elle indique que les personnes qui fréquentent la Mission d'Ottawa peuvent utiliser l'adresse du refuge pour voter.

Elle encourage les candidats locaux à s'adresser aux électeurs des refuges et des campements, à condition d'obtenir leur permission et de respecter leurs droits.

«Je pense qu'il serait très instructif pour quiconque se présente à une fonction publique de voir ce que c'est que de vivre dans un campement», a-t-elle affirmé.

La semaine dernière, à Terre-Neuve-et-Labrador, End Homelessness St. John's a organisé une activité de sensibilisation dans son foyer de transition pour aider les gens à obtenir les pièces d'identité et autres documents dont ils ont besoin pour voter ou remplir leur déclaration de revenus.

Le personnel aide les gens à remplir leur déclaration de revenus depuis des mois, puisque les feuillets T4 peuvent être utilisés comme pièce d'identité pour voter.

Des navettes vers les bureaux d'Élections Canada seront déployées pour le vote anticipé, et un bureau de vote sera spécialement aménagé le jour du scrutin, le 28 avril, pour les résidants du foyer de transition.

Bien qu'aucun candidat local n'ait contacté l'organisme pour s'adresser à ses résidants, le groupe organisera la semaine prochaine un forum des candidats sur le logement et le sans-abrisme.

«Nous voulons que tous les candidats à cette élection comprennent que les besoins des personnes qui ont des problèmes de logement sont importants», a martelé Mme Smith.

Sarah Smellie
Sarah Smellie / La Presse canadienne