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Une ado de 15 ans a vécu un calvaire.
Pierre Lafontaine, 68 ans, a plaidé coupable lundi à six chefs d'accusation pour avoir entretenu une relation avec une jeune fille qu'il a rencontrée alors qu'il était son conducteur d'autobus scolaire. Plusieurs années après les faits reprochés et après avoir consulté un psychologue, la jeune fille, aujourd'hui jeune femme, réalise que ce qu'elle a vécu «n’était pas normal».
Pierre Lafontaine a plaidé coupable à des chefs de contacts sexuels sur une personne âgée de moins de 16 ans, d'incitation à des contacts sexuels sur une personne âgée de moins de 16 ans, d'exploitation sexuelle, de production de pornographie juvénile et de leurre informatique d'une personne âgée de moins de 18 ans, a précisé Me Bruno Des Lauriers, procureur aux Poursuites criminelles et pénales
Voyez le reportage de Marie-Pier Boucher dans la vidéo liée à l'article.
Me Des Lauriers a lu devant la Cour du Québec lundi au palais de justice de Longueuil un exposé conjoint des faits dans le cadre du plaidoyer de culpabilité de Lafontaine.
La victime était présente au palais de justice, avec son chien d'assistance.
Lafontaine et sa jeune victime — dont l'identité est protégée par une ordonnance de non-publication — ont fait connaissance alors que la jeune fille est en secondaire 1. À ce moment, Pierre Lafontaine est son conducteur d'autobus scolaire. Selon l'exposé conjoint des faits, l'adolescente et l'accusé «se parlent matin et soir dans l'autobus» et la jeune fille le considère même «comme un ami et un confident».
«C’était la jeune qui s’assoyait derrière le chauffeur et qui lui parlait pendant le trajet, donc pendant toutes ces années, ils se sont liés d’amitié», a précisé Me Bruno Des Lauriers.
En juin 2009, l'adolescente termine son secondaire 3 et annonce à Pierre Lafontaine qu'elle doit changer d'école. Lafontaine lui propose alors d'échanger leurs numéros de téléphone «pour garder contact». La jeune fille qui a 15 ans à l'époque accepte. Lafontaine pour sa part est âgé de 55 ans.
L'exposé conjoint des faits soumis au tribunal met en lumière qu'à cette époque, la jeune fille vit une période difficile dans sa vie et qu'elle est vulnérable. On souligne notamment qu'elle présente des troubles alimentaires et d'automutilation. «L'accusé le sait puisqu'il est son confident», précise-t-on.
Les agressions de Pierre Lafontaine envers la jeune fille ont débuté à la fin de juin 2009 alors que l'adolescente va rejoindre l'accusé, à sa demande, dans un commerce de Brossard. «L’accusé l’embarque dans son véhicule, va se stationner en retrait et embrasse avec la langue X qui fige et se laisse faire».
Par la suite, Pierre Lafontaine va chercher la jeune fille à l'école, sur son heure de dîner, «2 à 3 fois par semaine». «Surviennent des épisodes de fellations et masturbation mutuelle. [...] alors que la jeune fille «n'a aucune expérience sexuelle à ce moment». « X fait semblant d’éprouver du plaisir quand l’accusé la masturbe, souhaitant que ça arrête», détaille-t-on dans l'exposé conjoint des faits signé par Pierre Lafontaine.
Après ces agressions, l'adolescente continue de voir Pierre Lafontaine «fréquemment», «car elle ne veut pas le perdre». Lafontaine menace également la jeune fille lui disant que si elle parle de ce qu'ils font, «elle détruira sa vie».
C'est en octobre 2009 que Pierre Lafontaine aura une première relation sexuelle complète avec la jeune fille qui affirme avoir eu mal et «s'être sentie sale». L'accusé n'a pas porté de condom.
S'en suivent d'autres rencontres sur l'heure du dîner de l'adolescente «quelques fois par semaine». À chaque rencontre, il y a des contacts divers allant de fellations à de la masturbation jusqu'aux relations sexuelles complètes. «Les relations sexuelles peuvent avoir lieu au motel, dans la voiture, dans la valise (hatchback) de la voiture, sur le siège passager, dans un parc, etc.», explique-t-on.
Selon le récit de la «relation» entre Lafontaine et la jeune fille évoqué devant le tribunal, les relations sexuelles avec Pierre Lafontaine sont devenues «intenses et dégradantes» alors que l'accusé réclame notamment des relations sexuelles anales et qu'il urine sur la victime.
À l'été 2009, Pierre Lafontaine demande fréquemment à l'adolescente de lui faire des «shows» de webcam. Les discussions explicites sont alors «fréquentes». La victime écrit des scénarios érotiques à la demande de l'accusé et ce dernier écrit des courriels de ses fantasmes à l'adolescente. «Ces discussions via webcam la nuit pouvaient survenir plusieurs fois par semaine, et ce, pendant des années», précise-t-on.
«L'accusé et la victime se voyaient comme un couple; ils échangeaient de nombreux courriels faisant état de leur amour et de leur attachement l'un à l'autre.»
«Pendant toutes ces années, c’était plutôt caché, non-dit, Monsieur Lafontaine présentait la victime sous un surnom, ne la nommait jamais réellement, lui demandait de mentir sur son âge, donc lui demandait de dire aux amis qu’elle rencontrait qu’elle était adulte, qu’elle était majeure. Ça n’empêchait pas, par ailleurs, la victime du haut de 16-17 ans d’avoir l’impression de vivre une relation amoureuse avec cet homme-là», a expliqué Me Bruno Des Lauriers.
Toutefois, plus la victime vieillissait, plus elle s'éloignait de Lafontaine. Du coup, plus elle vieillissait, «moins l'accusé était intéressé à elle».
Selon l'exposé conjoint des faits, «la jeune fille se soumettait aux désirs sexuels débridés de l’accusé, car de son côté elle avait réponse à ses besoins affectifs auprès de lui».
Pierre Lafontaine reconnaît qu'il était pleinement conscient de l'âge de sa victime et qu'il déployait même des efforts lorsqu'il la présentait pour ne pas dire son âge véridique ou même son nom. Lafontaine reconnaît aussi que pendant une certaine période, il était en situation d'autorité ou de confiance vis-à-vis la victime ou que celle-ci était en situation de dépendance à son égard ou que l'adolescente était dans une relation où il l'exploitait.
«C’est une victime qui est vulnérable, qui subit beaucoup de répercussions encore à ce jour […] C’est normal, en pareilles infractions sexuelles contre les enfants, on traine souvent des séquelles pendant très longtemps malheureusement et on le voit chez cette victime-là, elle est très affectée de ce qu’elle a vécu», a affirmé Me Bruno Des Lauriers.
Pierre Lafontaine sera de retour devant le tribunal le 4 septembre.