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«Est-ce une façon détournée d’offrir le logement à court terme par des canaux de communication invisibles aux yeux des agents de Revenu Québec?»
Des centaines d’hôtes qui offraient des séjours de courte durée sur Airbnb se sont tournés vers les séjours de 32 jours et plus pour éviter d’être soumis aux dispositions de la nouvelle Loi sur l’hébergement touristique. La tendance suscite son lot d’inquiétudes, en pleine crise du logement.
Non seulement certains craignent de voir des hôtes contourner la règle conclure des ententes de location de courte durée par des canaux de messagerie privés, mais on se demande également si certains locataires désespérés vont se tourner vers ces plateformes pour trouver un logement permanent.
«Un coup que quelqu’un contacte un propriétaire, le contact est direct», a souligné Virginie Dufour, porte-parole de l’opposition officielle en matière d’Affaires municipales, en entrevue avec Noovo Info.
Voyez le récapitulatif d'Émilie Clavel au bulletin Noovo Info 17 dans la vidéo accompagnant ce texte.
«Est-ce que ce sera une façon détournée d’offrir le logement à court terme par des canaux de communication invisibles aux yeux des agents de Revenu Québec? On peut se poser la question», a soulevé la députée libérale.
Et en plus du fort prix que doivent payer les locataires sur Airbnb, il subsiste aussi des questions sur la façon dont ils seront protégés s’ils sont victimes d’abus de la part de l’hôte. Au Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), on craint que le problème ait seulement été déplacé.
«Il y a une zone grise sur le statut de ces locataires qui vont louer sur Airbnb pour une période de longue durée», a ajouté Véronique Laflamme du FRAPRU.
L’avocat spécialisé en droit du logement Antoine Morneau-Sénéchal présume que «les gens qui vont louer sur ce marché [...] sont peut-être plus précaires» ou «n’ont pas trouvé d’autre logement».
«Ça pourrait aussi être des étudiants étrangers, par exemple, qui ne connaissent pas les lois québécoises», avance-t-il.
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Dans tous les cas, les lois québécoises qui protègent les locataires devraient s’appliquer en pareil cas et la question devrait passer le test des tribunaux, croit Me Morneau-Sénéchal.
«Ça va dépendre de l’intention», explique-t-il. «Dès qu’on loue un espace d’habitation qui n’est pas un hôtel, on a droit, selon moi, au maintien dans les lieux», même si c’est une location d'une durée restreinte, dit-il.
«L’entente conclue sur Airbnb n’aura pas préséance sur les lois.»
La réponse du Tribunal administratif du logement (TAL) recoupe essentiellement l’analyse de Me Morneau-Sénéchal. «La nature résidentielle d’un bail ne dépend pas de la plateforme par laquelle les parties sont entrées en contact ni même de la durée de la location», a détaillé le porte-parole du TAL Denis Morin dans un échange de courriels avec Noovo Info.
Ainsi, que le contrat d’Airbnb ou un bail de logement dure un mois, plusieurs mois, plusieurs années ou même qu’il soit prévu pour une durée indéterminée, «le locataire bénéficie des mêmes protections offertes par la loi, dont le droit au maintien dans les lieux», explique M. Morin.
En effet, s’il n’y a pas de formulaire bail de logement, comme c’est le cas pour une entente conclue sur une plateforme comme Airbnb, cela «n’entraîne […] pas la nullité du bail et ne permet pas de conclure que le bail n’est pas un bail de logement», dit le TAL.
Avec la collaboration de Guillaume Théroux pour Noovo Info.