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«On se sent très ignoré, parfois méprisé. On ne sent pas du tout d’écoute.»
Les Mères au front de Rouyn-Noranda poursuivent leur combat contre la Fonderie Horne. Des citoyens ont répondu à leur invitation et se sont rassemblés dimanche après-midi pour exprimer de nouveau leurs inquiétudes par rapport aux émissions de contaminants toxiques de la part de l’entreprise productrice d’anodes de cuivre.
Depuis mars 2023, le gouvernement Legault a contraint la Fonderie Horne de diminuer graduellement ses rejets de métaux lourds, dont l’arsenic et le plomb, dans l’air. L'autorisation ministérielle exige un maximum de 15 nanogrammes d'arsenic par mètre cube (ng/m3) annuellement en 2027, alors que la norme québécoise est de 3 ng/m3.
L’obligation a été fixée à 45 nanogrammes entre 2024 et 2026, soit 15 fois ce que stipule le Règlement sur l’assainissement de l’atmosphère du ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs.
Or, l’objectif de cette année n’est toujours pas respecté, selon les données rendues publiques par la propriété de la multinationale Glencore. Les émissions de plomb ont même atteint 2306 ng/m3 le 20 août, soit plus de six fois ce qui devra devenir la norme quotidienne en 2027 (350 ng/m3).
En marchant dans les rues de la ville sous une température frisquette, les manifestants ont tenu à rappeler aux décideurs que «les normes n’existent pas pour rien», réclamant les mêmes qu’ailleurs au Québec.
«On veut le respect des normes. Elles ont une raison d’être et ont été établies scientifiquement. Même une moyenne de trois nanogrammes par année, c’est déjà un compromis, ça devrait être zéro», affirme en entrevue Isabelle Fortin-Rondeau, chargée de projet de la campagne de Rouyn-Noranda du regroupement national Mères au front.
La militante déplore l’attitude du gouvernement dans le dossier. Selon elle, la santé des résidents ne semble pas préoccuper les élus.
«On se sent très ignoré, parfois méprisé. On ne sent pas du tout d’écoute. On comprend que le gouvernement a un plan de transition énergétique et que le cuivre de la Fonderie Horne est un maillon essentiel dans ce projet. Clairement, ça passe avant notre santé», soutient Mme Fortin-Rondeau.
«Notre sentiment, c’est qu’on est une zone sacrifiée. Le gouvernement est prêt à prendre le risque qu’on développe des maladies dégénératives et des cancers parce qu’il a besoin de cuivre», ajoute-t-elle.
Elle souligne que la population ne va pas jusqu’à demander la fermeture de l’usine, mais seulement qu’elle améliore ses pratiques environnementales.
«On comprend que le cuivre est essentiel, que c’est un métal critique et stratégique, et que la fonderie est importante, mais il faudrait qu’elle traite ce qu’elle est capable de traiter sécuritairement, donc qu’elle mette ses installations à jour, et qu’elle ralentisse ses activités lorsqu’elle se met à dépasser les normes. Ça devrait être dans ce sens-là que le principe de précaution fonctionne et non qu’on se fasse contaminer en attendant qu’on trouve peut-être une solution pour que la fonderie s’améliore.»
Jusqu’à maintenant, Mme Fortin-Rondeau considère que les citoyens n’ont pas été entendus.
Dans l’espoir de renverser la situation, le collectif Mères au front de Rouyn-Noranda a fait appel aux deux instigatrices du mouvement à l’échelle nationale: l’autrice, scénariste et réalisatrice Anaïs Barbeau-Lavalette et la militante écologique Laure Waridel.
Avec l’aide d’amis artistes, dont les comédiennes Ève Landry et Véronique Côté, elles ont créé une performance artistique spécialement pour l’occasion, à laquelle ont participé des figures locales, dont Mme Fortin-Rondeau.
C’est par cette prestation «vraiment forte et marquante», selon ses mots, que la marche s’est conclue, à l’angle de l’avenue Portelance et de la 9e rue, tout près de la Fonderie Horne.
Mme Fortin-Rondeau souhaite de tout cœur que cette manifestation contribue à un dénouement positif.
«Les gens peuvent avoir le faux sentiment que c’est réglé parce qu’il y a une entente ministérielle, mais c’est important de redire que la situation n’est pas réglée. Il faut que ça cesse, et l’opinion publique est l’une des façons de mettre du poids sur les élus. Il faut qu’ils sentent que c’est avantageux pour eux de légiférer en notre faveur.»
Notons qu’il n’a pas été possible de parler à un représentant de la Fonderie Horne.