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Société
Chronique |

Crise du logement: on s’en va dans le mur

On a un problème d’offre de logements. Point. Il est là le problème, ne cherchez plus ailleurs, ne cherchez pas des coupables, ne cherchez pas les méchants propriétaires ou les mauvais locataires. Il faut plus de logements.

On a un problème d’offre de logements. Point. Il est là le problème, ne cherchez plus ailleurs, ne cherchez pas des coupables, ne cherchez pas les méchants propriétaires ou les mauvais locataires. Il faut plus de logements.

Peu importe, quatorze maires du Québec ont décidé de faire de la politique avec un problème social. On exige un registre des loyers public. Vous en voulez des logements non entretenus ? Vous allez être gâtés. Au nom de l’image publique, on joue la carte facile des prochaines élections et des bons sentiments. La réalité : qui veut louer un logement 950 $ à perte ? Personne.

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Cession de bail à « vendre avec les meubles »

Il manque de logements, c’est le cocktail parfait pour abuser du mélange. Un locataire décide d’afficher son logement en « cession de bail » sur les petites annonces. Conditions ? Rachat de « meubles » pour 3000 $. Qu’est-ce qui est vendu ? Les meubles ou le droit au « prix abordable » du logement ? Les meubles valent-ils encore quelque chose ? Existent-ils ? Encore une nouvelle entourloupette possible.

La rareté crée aussi chez certains locataires l’occasion de faire une passe avec leur logement. Ils affichent une vente de meubles, mais ce qui est véritablement vendu, c’est le bail une fois que l’on visite le logement.

Une hausse de taux sous-estimée

La hausse de taux directeur de 4,5 % depuis mars 2022, n’est probablement pas finie et vient démolir la rentabilité de plusieurs immeubles. Prenons le cas d’un propriétaire d’un plex ayant une dette hypothécaire de 600 000 $.

Avec un taux hypothécaire à 2 %, le portrait était le suivant :

Source : https://itools-ioutils.fcac-acfc.gc.ca/MC-CH/MCCalc-CHCalc-fra.aspx?lang=fra

Avec un taux de 6,5 %, le portrait est le suivant :

Source : https://itools-ioutils.fcac-acfc.gc.ca/MC-CH/MCCalc-CHCalc-fra.aspx?lang=fra

Ici, on ne compte pas la hausse du coût des matériaux, de la main-d’œuvre, des taxes scolaires, des assurances, des taxes foncières, etc. On parle juste du paiement hypothécaire. Évidemment, certains propriétaires ayant signé un taux fixe à long terme s’en sortent pour le moment. Si les taux ne redescendent pas d’ici 2025, on fera face à des hausses importantes de taux d’emprunt pour des milliers de propriétaires.

Mensuellement, pour le même immeuble, avec le même terme hypothécaire, le même amortissement et le même montant emprunté, la calculatrice hypothécaire génère une hausse de paiement mensuel de 1478,23 $. C’est littéralement l’équivalent du revenu d’un beau logement. Annuellement, on paye donc 17 739 $ de plus, pour le même immeuble.

On s’entend, c’est une hausse de 58,2 % du paiement à la banque pour une dette équivalente. Même avec une hausse des loyers suggérée par le tribunal administratif du logement de 2,3 %, le propriétaire n’y arrivera pas. On a beau dire qu’il revendra l’immeuble à profit un jour, il peut subir des pertes financières pour le moment.

Une ministre sous les projecteurs

On a un problème de parc immobilier, mais on n’ose pas s’attaquer aux divers enjeux. Le problème ? La ministre de l’Habitation France-Élaine Duranceau est la nouvelle cible des médias et c’est elle qui doit revoir la façon de soutenir un parc immobilier équilibré à long terme. On ne compte déjà plus les articles sur son passé illustrant qu’elle a fait des gains avec des investissements immobiliers personnels. Pourtant, il faudrait beaucoup de courage politique pour :

  • Revoir le calcul de la fixation des loyers pour inclure une pondération logique des travaux majeurs ;
  • Revoir les règles de cession de bail sans céder à la pression politique ;
  • Revoir la Loi-R20 pour assouplir la rigidité des règles entourant les rénovations résidentielles ;
  • Lutter contre la fraude fiscale pour contrer le sous-investissement en aide au logement ;
  • Etc.

Le parc immobilier qui nous attend

À force de taper sur la tête des investisseurs privés, on va perdre les petits propriétaires. On va finir par avoir le parc immobilier que l’on mérite : un parc délabré et sans investissement.

Avec la hausse de taux hypothécaires, le contrôle des loyers, les multiples cessions de baux et un éventuel registre des loyers, toutes les conditions sont réunies pour que les propriétaires jettent l’éponge et ne fassent que le strict minimum pour leurs locataires. Le marché immobilier n’est pas différent d’un autre marché, quand les règles du jeu sont défavorables à l’investissement, on n’investit plus.

Dans ce contexte, il faut arrêter de complexifier le problème. Si on veut vraiment améliorer le sort des locataires, il faut avoir le courage de nommer les problèmes et de jouer sur les facteurs qui favorisent une hausse de l’offre de logements décents.

Sans quoi, malgré tous les registres et tous les contrôles du monde, on se retrouvera peut-être avec des logements abordables, abandonnés, négligés ou insalubres. Le genre de contexte parfait pour une rénoviction et une autre crise du logement.

Mais au moins, on aura gagné nos élections…

À VOIR | Quel impact pourrait avoir un registre des loyers?