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Les campeurs ne s’en cachent pas, ils n’ont pas l’intention de passer l’hiver là. «Quand il se met à venter ici, il vente en tabarouette, donc j’imagine pas à -40 (degrés Celsius) en plus», explique à Noovo Info une femme qui semble bien installée. Elle prend le soin de ramasser ses déchets et de conserver son campement «propre» pour ne pas importuner les «voisins».
Mais l’un de ces «voisins» rencontrés par Noovo Info confie que certaines personnes en situation d’itinérance sont beaucoup dérangeantes qu’elle. Un des campeurs en particulier ramasse tout ce qu’il trouve en ce moment. «Parfois, ils laissent traîner leurs choses sur nos terrains», dit-il à la caméra.
Noovo Info avait tenté en juillet de s’entretenir avec l’homme en question, mais il était absent. À ce moment, il y avait de tout sur le terrain où il avait disposé son matériel: des cintres, du fer, de la nourriture, des vêtements…
À notre arrivée mardi après-midi, la Ville de Montréal avait fait le ménage mais, croyez-le ou non, Daven avait déménagé ses objets plus loin. Il a amassé des tonnes de choses et semblait exténué lors de notre rencontre. Les mains noircies, chétif, l’homme de 40 ans accepté de nous dire pourquoi il accumule des objets ainsi.
D’abord, il assure que ses «trouvailles» aident les gens du campement. «Je donne à un nombre infini de personnes», dit-il en montrant du doigt une tente, au loin. «Tu vois la tente là-bas, ils vivent dans mes affaires».
Plus tard, en pleurs, il dit demander de l’aide sociale en vain depuis un an demi.
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Ce père de deux enfants raconte qu’il lui arrive fréquemment d’être trois jours sans dormir, à chercher des matériaux et à les surveiller ensuite pour empêcher des gens de les lui voler. «Parce que tu le sais que quelqu’un peut mettre le nez dans tes affaires, en train de fouiller», affirme-t-il.
Il décrit avec fierté le contenu d’un bac vert à poubelles. «Les métaux c’est pour faire tenir les murs, des supports.» Il y a aussi des roues de bicyclettes, des jouets pour enfants, des anciens téléviseurs…
Bien qu’il soit exténué et blessé au pied droit – il dit avoir marché sur un clou –, Daven refuse de se rendre à l’hôpital. «Le temps que je vais passer à l’urgence et de revenir, ça va être à refaire.» Il admet qu’il ne peut pas passer sa vie comme ça. «Je veux un toit sur la tête je veux place pour recevoir mes enfants.»
Daven dit avoir reçu un ultimatum de 24 heures de la Ville, qui lui aurait ordonné de se débarrasser de tout ça, sans quoi elle ferait de nouveau le ménage. Quoi qu’il en soit, il assure qu’ensuite, il recommencera à accumuler puisque, pour lui, c’est une question de survie.
Après avoir vu notre reportage, l’organisme Diogène qui sort les personnes en situation d’itinérance de la rue a décidé d’intervenir.
Pour la directrice générale Jessica Soto, le cas de Daven ressemble à un trouble d’accumulation compulsive (TAC). «C’est une façon pour eux de se protéger, de calmer leur anxiété. Si vous regardez, ils se font une espèce de quadrilatère et ils mettent toutes sortes d’objets comme s’ils faisaient une clôture.»
Elle ajoute que désormais, ces gens qui louaient des appartements deviennent en quelque sorte les premières cibles d’expulsion de logements. «C’est atypique ce que l’on commence à voir, avant c’étaient plus des gens qui étaient dans leur logement et c’est tout nouveau de les voir à la rue.»
Elle assure qu’elle va montrer notre vidéo du témoignage de Daven à son équipe.
On va essayer de repérer le monsieur et d’aller lui offrir de l’aide», conclut madame Soto.