Leur cas n’est pas unique: ils sont une famille parmi les 2000 personnes qui se déplacent quotidiennement dans cette ville et viennent garnir les rangs des bidonvilles de la mégalopole.
DOSSIER | Noovo Info au Bangladesh
Poly, l’épouse de Rohim, a travaillé en arrivant dans une usine d’emballage de biscuits, mais les heures et les conditions ont raison d’elle: des quarts de douze heures, une semaine de jour, la suivante de nuit, et des heures supplémentaires sont intolérables pour elle. Puisqu’ils gagnent mal leur vie, ils font le choix déchirant de renvoyer leurs deux enfants en bas âge au village, à Sylhet, chez le père d’Ouri. Elle en parle en ravalant difficilement ses larmes.
«S’il n’y avait pas eu cette inondation, nous ne serions pas venus à Dacca, mais nous sommes ici pour l’argent», lance Rohim.
«Nous n’arrivons pas à nous adapter à cette ville, nous avons dû les laisser avec les parents, pour des raisons financières.»
Rohim travaille maintenant comme conducteur de rickshaw, un emploi difficile.
Mais il n’a pas le choix: en plus de travailler pour faire vivre sa famille, il doit rembourser un prêt, et payer la location du rickshaw. Sur les 4 $ qu’il gagne par jour, la moitié va à la location du rickshaw.
Les changements climatiques ont provoqué la migration dans le pays de 7, 1 millions d’habitants, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Ce nombre de réfugiés climatiques pourrait atteindre 13, 3 millions de personnes d’ici 2050.
Migration climatique à l’interne
«La plus grande migration au Bangladesh est interne», explique le professeur Saleemul Huq de l’Université indépendante du Bangladesh et directeur du Centre international en changements climatiques et développement. «C’est un problème qui continue de croître, ils sont de plus en plus nombreux et nous faisons de notre mieux pour gérer la situation, mais cela sera très difficile.»

«La pression sur les infrastructures de Dacca est presque trop grande, la Ville ne peut pas la gérer.»
Et pour cause: 87% de l’eau potable à Dacca provient des sources souterraines, selon l'organisation de protection de l'environnement Nature Conservancy, mais la pression constante sur le réseau est évidente, puisqu’elle décline de deux à trois mètres par année.
Pendant ce temps, ceux qui vivent dans les bidonvilles doivent se débrouiller pour s’approvisionner tant bien que mal et s’adapter aux variations de service et de pression de l’eau.
Poly s’occupe de la petite chambre qu’ils louent dans leur bidonville et fait la cuisine, pensive et inquiète pour l’avenir. Elle pense à ses enfants, qu’elle souhaite retrouver le plus rapidement possible.
Pour le professeur Saleemul Huq, l’adaptation aux changements climatiques a déjà commencé, et le plus grand défi sera de mieux intégrer les réfugiés climatiques à l’interne pour qu’ils ne se retrouvent pas aussi loin de leur domicile.
«Je m’ennuie des gens que j’ai laissés derrière», conclut Poly, qui rêve d’une nouvelle maison dans la ville qu’elle a quittée de force.