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Les garderies doivent travailler de plus en plus fort pour combler les places vacantes
En pleine pénurie de places en garderie, des milliers de parents rêveraient de déposer leurs enfants entre bonnes mains, chaque jour, sur leur lieu de travail. Le rêve tourne peu à peu au cauchemar dans les CPE du centre-ville de Montréal et Québec qui multiplient les efforts pour combler des places vacantes qui s'accumulent avec le télétravail.
La directrice du CPE le Petit Réseau, Mylène Bouffard, a effectué près de 400 appels téléphoniques pour réussir à combler ses 10 places vacantes, l'été dernier. La garderie de 78 places est pourtant située dans la Maison du développement durable en plein Quartier des spectacles à Montréal. C'est du jamais vu pour la gestionnaire qui a assisté à la création du CPE il y a 34 ans pour les employés d'Hydro-Québec.
«Les parents sont obligés de quitter pour éviter de faire deux allers-retours le matin et le soir pour porter leurs enfants et retourner à la maison avec le télétravail. Ce n'est pas de gaité de cœur, mais des parents sont forcés de quitter le CPE. C'est vraiment difficile de combler nos groupes. » - Mylène Bouffard, directrice du CPE le Petit Réseau
Plusieurs garderies du centre-ville de Montréal situées en milieu de travail vivent le même phénomène depuis la pandémie selon Mme Bouffard. La situation est d'ailleurs sensiblement la même à Québec selon la conseillère stratégique de l'Association des CPE du Québec Geneviève Blanchard. «C'est certain qu'il y a des inquiétudes. Il faut savoir qu'une partie du financement des CPE est liée à l'occupation et à la présence des enfants. Ça crée une pression financière sur ces organisations-là qui ont plus de difficultés à combler les places. On les accompagne là-dedans.»
La situation ne semble pas près de changer à court terme pour les garderies situées près des tours à bureaux avec la popularité marquée du télétravail. Comme si ce n'était pas assez, elles doivent aussi composer avec les innombrables chantiers routiers qui enclavent les parents des banlieues à l'extérieur de l'Île de Montréal.
« On s'entend que le tunnel La Fontaine ça n'aide pas du tout. C'est une nouvelle tuile qui nous tombe sur la tête. Je ne sais pas demain comment ça va fonctionner (...) Je m'attends à ce que d'autres parents quittent à cause qu'on est au centre-ville et c'est contraignant pour eux avec le tunnel. » - Mylène Bouffard, directrice du CPE le Petit Réseau
Par ailleurs, l'Association des CPE du Québec s'attend à d'importants changements dans le réseau suite à la promesse de l'ex-ministre de la Famille de la CAQ Mathieu Lacombe. Le gouvernement Legault dépensera 1,4 milliard de dollars sur 5 ans pour convertir les places en garderies non subventionnées en places subventionnées. La mesure permettra d'instaurer un tarif unique de 8,70$ par jour pour tous les parents.
Cette période de transition inquiète également la garderie L'Enfantfreluche située entre les universités McGill et Concordia au coeur du centre-ville de Montréal. Son directeur général, Lorrain Leduc, a lui aussi de la difficulté à trouver de nouveaux enfants pour remplacer ceux qui partent. « Avant les gens recevaient nos appels un peu comme un prix à la loterie. Maintenant, il faut faire de 20 à 25 appels avant même de recevoir une visite en vue d'une inscription. Le temps et les énergies consacrés à combler les places sont démultipliés,» explique le gestionnaire qui cherche à combler 3 places vacantes.
Pourrait-on faciliter le recrutement des garderies en revoyant les critères des permis limités à une catégorie d'âge? C'est ce que propose le patron du CPE L'Enfantfreluche pour conjuguer plus facilement l'offre et la demande à Montréal. Selon lui, la Métropole aurait intérêt à obtenir plus de permis pour les poupons qui comptent pour 85% des noms inscrits sur le site Ma Place 0-5 ans: « On ne devrait pas avoir des permis spécifiques pour des classes d'âge, mais plutôt pour un nombre de places afin que le centre puisse gérer la distribution de places avec ce permis-là, » indique M. Leduc. L'Association des CPE du Québec n'est pas contre l'idée qui n'a cependant jamais été testée.
« Il faut des garde-fous parce que sinon des garderies commerciales pourraient remplir leurs garderies de poupons parce que c'est bête à dire, mais c'est plus payant.» - Lorrain Leduc
L'enjeu des places en pouponnière préoccupe aussi le CPE le Petit Réseau. Il tente en vain d'obtenir un permis de 10 places supplémentaires pour cette catégorie d'âge depuis plusieurs mois. La garderie dispose pourtant de tous les espaces nécessaires pour répondre à la demande des parents. « C'est vraiment long et contraignant. J'ai le projet à coeur, mais il n'y a aucune ouverture du ministère pour le moment. C'est plate comme ça, » indique la directrice du CPE le Petit Réseau Mylène Bouffard.
On comptait 33 829 enfants sur la liste d'attente en garderie à la fin mai d'après les chiffres du ministère de la Famille.