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Le Canada souhaite que la Cour pénale internationale accélère son enquête sur la Russie pour d'éventuels crimes de guerre, en raison de son invasion de l'Ukraine.
Le Canada souhaite que la Cour pénale internationale accélère son enquête sur la Russie pour d'éventuels crimes de guerre, en raison de son invasion de l'Ukraine.
La ministre canadienne des Affaires étrangères, Mélanie Joly, l'a annoncé à Genève mardi, après qu'elle et d'autres responsables occidentaux sont sortis de la salle pendant le discours de leur homologue russe, Sergueï Lavrov, au Conseil des droits de l'homme des Nations unies.
Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim A.A. Khan, a écrit lundi dans un communiqué qu'il avait décidé d'ouvrir une enquête parce qu'il avait conclu qu'il y avait une base raisonnable pour croire que des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité auraient été commis en Ukraine.
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L'annonce de la ministre Joly pourrait accélérer le rythme d'une telle enquête de la CPI.
Me Khan a souligné que parce que l'Ukraine n'est pas partie au Statut de Rome, qui régit la CPI, ce pays «ne peut pas de lui-même» demander que son bureau ouvre une enquête. Il a aussi rappelé que l'Ukraine avait déjà accepté dans le passé la compétence de la CPI «sur des crimes présumés, en vertu du Statut de Rome, commis sur son territoire».
Par ailleurs, ce qui pourrait accélérer davantage les choses serait qu'un État partie à la CPI réfère le dossier au Procureur, comme le prévoit le Statut de Rome, «ce qui nous permettrait de procéder activement et immédiatement aux enquêtes indépendantes et objectives», a déclaré Me Khan.
Or, le Canada est un État partie et un membre fondateur de la CPI et du Statut de Rome.
«Aujourd'hui également, le Canada va saisir la Cour pénale internationale de justice contre la Russie, pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre», a déclaré Mme Joly mardi à Genève.
La ministre Joly a déclaré qu'elle et ses collègues avaient boudé le discours de M. Lavrov pour envoyer un message clair à Moscou au sujet de l'invasion de l'Ukraine. «Il était également important pour nous de montrer que nous sommes inébranlables dans notre soutien», a-t-elle dit.
«Le ministre Lavrov donnait sa version, qui est fausse, de ce qui se passe en Ukraine, et sa voix était diffusée», a déclaré Mme Joly.
Le ministre Lavrov, tout comme le président Vladimir Poutine, ont été sanctionnés par le Canada et leurs alliés pour leur rôle dans l'orchestration de ce qui est décrit comme une agression illégale contre un État souverain.
Mme Joly quittait Genève plus tard mardi et se dirigeait vers la Pologne, où elle devait rencontrer ses homologues pour aborder l'exode des réfugiés ukrainiens et superviser l'acheminement de l'aide militaire canadienne. Elle doit aussi se rendre à la frontière polonaise avec l'Ukraine plus tard cette semaine.
Par - Laura Osman de La Presse canadienne
La représentante canadienne auprès de l’agence des Nations unies pour les réfugiés affirme qu’il est trop tôt pour commencer à réinstaller au Canada des Ukrainiens qui ont fui par milliers l’invasion russe dans leur pays.
Rema Jamous admet que l’ampleur des déplacements depuis l’Ukraine est colossale. Selon le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), quelque 677 000 personnes avaient déjà fui mardi vers les pays voisins en quête de sécurité. Si cette tendance se maintient, le HCR estime qu’il pourrait y avoir éventuellement jusqu’à quatre millions de réfugiés ukrainiens, mais aussi jusqu’à 12 millions de personnes à l’intérieur de l’Ukraine qui auront besoin d’aide et de protection.
Mais Mme Jamous rappelle que la plupart de ceux qui quittent l’Ukraine espèrent rentrer chez eux dès qu’ils pourront le faire en toute sécurité.
« Nous parlons vraiment, vraiment des premiers jours de la réinstallation, a indiqué Mme Jamous dans une interview. Les gens voudront toujours rentrer chez eux avant de penser à aller ailleurs. »
Les collègues de Mme Jamous ont signalé un grand nombre de femmes et d’enfants qui traversent la frontière ukrainienne, a-t-elle déclaré. Pendant ce temps, on voit dans le monde entier des images saisissantes d’Ukrainiens qui disent au revoir à leurs proches alors qu’ils prennent les armes contre l’armée de Vladimir Poutine pour défendre leur patrie.
Cela laisse des centaines de milliers de réfugiés campés dans les pays voisins en attendant l’issue de cette guerre. « Les gens resteront probablement près des zones frontalières, a estimé Mme Jamous. L’écrasante majorité des réfugiés dans le monde restent près de chez eux et attendent dans les pays voisins une occasion de rentrer dans leur pays. »
Alexandra Rodionova vit à Aylmer, au Québec, mais assure qu’une partie d’elle est toujours à Kiev avec sa famille. Elle a immigré au Canada en 1992, mais sa famille et ses amis sont toujours en Ukraine et prévoient y rester. « Il est très difficile de recommander ou de décider quelle est la chose la plus sûre à faire », a déclaré Mme Rodionova en entrevue.
Une entrée sans visa ?
Le Conseil canadien pour les réfugiés a déclaré qu’une solution serait de permettre aux Ukrainiens d’entrer au Canada sans visa, offrant un refuge sûr jusqu’à ce qu’ils puissent rentrer chez eux.
« Un gouvernement devrait faciliter leur venue pour trouver une sécurité temporaire au Canada », a souligné la directrice exécutive Janet Dench lors d’une entrevue.
Le comité de l’immigration de la Chambre des communes a voté mardi pour demander au gouvernement de mettre en place des voyages sans visa de l’Ukraine vers le Canada.
Le vote a été adopté sans le soutien des députés libéraux, qui ont exprimé des inquiétudes quant à la sécurité intérieure si de mauvais acteurs souhaitaient entrer dans le pays.
Le gouvernement ne réexamine pas actuellement les exigences en matière de visa pour les Ukrainiens, a appris lundi la commission des affaires étrangères de la Chambre.
Aide humanitaire
En attendant, le HCR souligne que les déplacés à l’intérieur et à l’extérieur des frontières de l’Ukraine auront besoin d’une aide humanitaire, car les ressources actuelles risquent de s’épuiser rapidement. « Nous assistons présentement à ce qui pourrait devenir la plus grande crise de réfugiés en Europe au cours de ce siècle », a déclaré mardi le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, dans un communiqué.
Les Nations unies ont lancé mardi un appel aux gouvernements pour recueillir 1,7 milliard $ afin de couvrir les coûts humanitaires de cette crise, dont 550,6 millions $ pour aider les réfugiés qui ont fui vers les pays voisins de l’Ukraine. Cet argent servira à fournir des tentes, du chauffage, des vêtements chauds, de la nourriture et d’autres produits de première nécessité, a déclaré Mme Jamous.
Le ministre canadien du Développement international, Harjit Sajjan, a promis 100 millions $ en aide humanitaire. Cela s’ajoute aux 25 millions $ que le Canada a déjà alloués à l’Ukraine depuis le début de l’année.
Discrimination aux frontières ?
Le HCR a par ailleurs reçu des informations selon lesquelles des non-Ukrainiens ont tenté de fuir la violence dans ce pays pour se faire refouler par les pays voisins ou se heurter à des difficultés supplémentaires en tentant de s’échapper. Beaucoup d’entre eux sont des étudiants et, dans certains cas, sont déjà des réfugiés venus d’ailleurs dans le monde, notamment d’Afrique.
« En ce moment critique en particulier, nous ne pouvons tout simplement pas faire de discrimination sur la base du statut juridique ou de la nationalité. Les gens fuient la guerre, ils fuient littéralement pour sauver leur vie », a déclaré Mme Jamous.
L’ambassade d’Ukraine au Canada a envoyé un bulletin contestant toute discrimination fondée sur l’origine ethnique ou la nationalité. « Compte tenu des conditions de sécurité extrêmes, l’approche du “premier arrivé, premier servi” s’applique à toutes les nationalités, avec certaines exceptions humanitaires autorisées pour les femmes et les enfants », précise l’ambassade.
Le Conseil canadien pour les réfugiés a déclaré que le Canada devrait faire pression sur les gouvernements de la région pour qu’ils gardent leurs frontières ouvertes sans discrimination. « C’est l’un des principes fondamentaux du droit des réfugiés et des obligations des pays : garder les frontières ouvertes lorsque les réfugiés fuient. Et cela doit être fait sans discrimination », a déclaré mardi la directrice, Janet Dench.
Le gouvernement devrait également accorder une attention particulière aux personnes qui étaient déjà des réfugiés en Ukraine et qui fuient maintenant la violence de la Russie, a-t-elle déclaré, en particulier celles qui ont déjà fait une demande pour venir au Canada.
Immigration plus tard
Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés discutera éventuellement des options de réinstallation avec des pays comme le Canada, et Mme Jamous rappelle que la demande dépasse généralement de loin l’offre des gouvernements. L’agence donne la priorité aux personnes à réinstaller qui sont considérées comme les plus à risque.
Le Canada a déjà accéléré les demandes d’immigration existantes de l’Ukraine et en a approuvé 4000 depuis le 19 janvier, a déclaré lundi le ministre fédéral de l’Immigration, Sean Fraser.
Mme Dench a déclaré que lorsque de nouvelles crises émergent, il y a toujours une inquiétude de voir un déplacement des efforts. « Nous avons vu cela avec la Syrie, avec l’Afghanistan, et l’inquiétude émerge également pour l’Ukraine », a-t-elle déclaré.
« Si de nombreux pays détournent leurs ressources et leur attention pour répondre à ce déplacement, qu’est-ce que cela signifie pour d’autres qui attendent depuis de nombreuses années ? »
Le ministre Fraser a précisé mardi dans une déclaration écrite que le Canada continuera de faire sa part en tant que chef de file mondial dans la réinstallation des réfugiés.
Il a réitéré l’engagement du Canada à réinstaller 40 000 réfugiés afghans, tout en veillant à ce que les citoyens ukrainiens puissent venir au Canada le plus rapidement et en toute sécurité s’ils le souhaitent.
M. Fraser a promis plus de détails sur les plans visant à amener des Ukrainiens au Canada dans les prochains jours.