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Justin Trudeau a prévenu les ministres que les partenaires internationaux craignaient que le Canada ne soit pas en mesure de maîtriser la situation.
Deux jours avant que la Loi sur les mesures d'urgence ne soit invoquée en février dernier pour réprimer les manifestations antigouvernementales, le premier ministre Justin Trudeau a prévenu les ministres que les partenaires internationaux craignaient que le Canada ne soit pas en mesure de maîtriser la situation.
L'avertissement est contenu dans des comptes rendus fortement caviardés de trois réunions du Groupe d'intervention en cas d'incident et d'une réunion plus large du cabinet. Ces documents ont été rendus publics par la Cour fédérale dans le cadre de la contestation du recours à la loi d'exception.
Un des documents montre que la fin de semaine avant d'invoquer la loi, le 14 février, le gouvernement Trudeau évaluait les conséquences du recours à la loi d'exception, tout en examinant d'autres outils pour faire face aux manifestations à Ottawa et sur des routes névralgiques, notamment au pont international de Windsor.
Les commentaires de M. Trudeau le 12 février sont intervenus le lendemain de sa conversation avec le président américain Joe Biden. Selon la Maison-Blanche, M. Biden s'est dit préoccupé par l'impact des blocages aux postes frontaliers, notamment le pont Ambassador à Windsor, en Ontario, sur les entreprises et les travailleurs américains.
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«Le premier ministre a promis d'agir rapidement pour faire appliquer la loi et le président l'a remercié pour les mesures que lui et d'autres autorités canadiennes prennent», a déclaré la Maison-Blanche le 11 février.
À l'époque, M. Trudeau s'adressait à un certain nombre de dirigeants mondiaux au sujet du renforcement des forces militaires russes près de la frontière avec l'Ukraine. Au cours des 12 premiers jours de février, il s'est entretenu avec des dirigeants de l'Union européenne, de la Norvège, de la Pologne, du Japon, de l'Allemagne et de l'Ukraine.
Les comptes rendus du cabinet du premier ministre concernant ces réunions ne mentionnent pas les manifestations en cours. Toutefois, des documents montraient que c'était une priorité pour le cabinet. Le week-end avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, le gouvernement était occupé à peser les conséquences de l'utilisation de la législation tout en évaluant d'autres outils.
Le samedi 12 février, les manifestants utilisaient les médias sociaux pour se coordonner, entamant des manifestations qui mettaient du temps à démarrer. Les manifestants impliquaient des enfants dans leurs actions en les amenant à des blocages pour empêcher les activités de la police et en engageant des écoles dans des débrayages, selon les documents.
Le procès-verbal d'une de ces réunions montre que le cabinet et de hauts responsables au gouvernement, auprès de l'armée et de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), ont été informés qu'il y avait la possibilité d'une négociation avec les organisateurs de la manifestation, et même d'une «percée» potentielle pour la fin de l'occupation à Ottawa.
Mais dans d'autres documents, on prévient aussi les ministres que les manifestants dans la capitale devenaient de plus en plus hostiles à l'égard de la police et de plus en plus hardis.
Au poste frontalier de Windsor, en Ontario, une tentative du gouvernement provincial de négocier avec les manifestants a échoué, ce qui a amené la police à intervenir pour démanteler les barrages routiers.
La police d'Ottawa a publié une déclaration le 12 février indiquant qu'il y avait plus de 4000 personnes dans le centre-ville et qu'il y avait eu «un comportement agressif et illégal». Le Service de police d'Ottawa, la Police provinciale de l'Ontario et la GRC ont ensuite établi un centre de commandement intégré amélioré pour assurer la coordination.
Dans les coulisses, la commissaire de la GRC, Brenda Lucki, a déclaré au groupe fédéral chargé des incidents qu'il était difficile de travailler avec les autres forces policières, citant des problèmes de communications ainsi qu'avec le chef de la police d'Ottawa, Peter Sloly, qui a démissionné la semaine suivante.
Pendant ce temps, les forces de l'ordre ont commencé à intervenir samedi sur le pont Ambassador après l'échec d'une tentative du gouvernement de l'Ontario de négocier avec les manifestants, indiquent les documents, mais cette tentative s'est arrêtée lorsque le nombre de manifestants a dépassé les 500 personnes.
Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a déclaré à ses collègues que deux mouvements distincts semblaient être impliqués: un «relativement inoffensive et heureuse» ayant «une forte relation avec les communautés religieuses», et un groupe plus inquiétant «d'extrémistes plus durs essayant de saper les institutions gouvernementales et l'application de la loi».
M. Mendicino a également noté qu'il y avait des informations selon lesquelles d'anciens membres de l'armée conseillaient et instruisaient les dirigeants du blocus, selon les documents.
Le ministre des Transports Omar Alghabra travaillait pour sécuriser les remorqueuses et les chauffeurs. Le gouvernement fédéral a déclaré que les entreprises de remorquage n'étaient pas disposées à déplacer les gros camions qui étouffaient les rues du centre-ville d'Ottawa, et l'invocation de la Loi sur les urgences a donné à la police le pouvoir de les obliger à aider.
C'est le dimanche que les fonctionnaires fédéraux ont été informés qu'il y avait «un potentiel de percée à Ottawa».
Selon Keith Wilson, avocat du groupe «Convoi de la liberté», cette percée était une entente qui avait été travaillée afin de négocier avec des responsables de la ville. Tamara Lich, l'une des meneuses de la manifestation, et le maire d'Ottawa, Jim Watson, ont échangé des lettres le 12 février, discutant d'un arrangement qui verrait les camionneurs déplacer leurs véhicules à l'extérieur des zones résidentielles.
«De nombreux citoyens et entreprises d'Ottawa nous ont encouragés, mais nous dérangeons également les autres. Cela n'a jamais été notre intention», a écrit Mme Lich au maire Watson.
Le groupe a imprimé des dépliants expliquant qu'il prévoyait de repositionner les camions à partir de lundi, «afin que nous ne donnions pas au premier ministre l'excuse qu'il veut désespérément pour utiliser la force et saisir nos camions».
Le dimanche soir 13 février, Pat King, un manifestant de premier plan, a déclaré sur les médias sociaux qu'il n'y avait pas d'accord et a laissé entendre que les contre-manifestants diffusaient de fausses informations. Il a demandé aux manifestants de ne pas bouger.
Certains véhicules ont commencé à se déplacer le 14 février, a déclaré M. Wilson, dégageant deux pâtés de maisons.
Il a dit que plusieurs malentendus dans «l'environnement chaotique» ont ralenti ce qui était déjà susceptible d'être un effort de plusieurs jours pour déplacer les camionneurs sur la rue Wellington et la promenade Sir John A MacDonald.
«Nous pensions avoir des problèmes de communication», a déclaré l'avocat Keith Wilson. «Oh mon Dieu, la police a toujours eu de terribles communications. Donc nous allons déplacer les camions, et ensuite la police ne nous laisse pas bouger.»
Cet après-midi-là, M. Trudeau a annoncé la décision d'invoquer la Loi sur les urgences.
Le 19 février, après des jours d'avertissements de la police demandant aux manifestants de partir, une opération impliquant des centaines d'agents a commencé à évacuer les véhicules et les personnes du centre-ville d'Ottawa.