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En entrevue avec Noovo Info au lendemain de cette faste soirée, le chef d’orchestre québécois a expliqué comment sa personnalité triple de chef symphonique, de chef d’opéra et de pianiste s’est servi de sa polyvalence pour donner naissance à des projets qui ont une portée sociale.
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En tant que directeur musical du mythique Metropolitan Opera, le Montréalais a reçu le prix pour le meilleur enregistrement d’un opéra, ave Fire Shut Up in my Bones de Terrence Blanchard — le premier opéra d’un compositeur noir à être joué sur la scène du «Met» à New York. «Il était à peu près temps», a ironisé Nézet-Séguin dans un entretien avec la journaliste Fanny Lachance-Paquette.
«Ça représente la vision que j’ai, qu’on a collectivement maintenant au Met, de donner de plus en plus d’espace à la musique de notre temps et à diversifier les points de vue pour rejoindre un public qui ne sentait pas le bienvenu à l’opéra avant», a-t-il expliqué. «Plus de la moitié des gens qui sont venus dans la série de représentations n’avaient jamais mis les pieds au Met. C’était en grande majorité un public noir.»
Quant à la statuette du meilleur album solo vocal, remportée avec Renée Fleming pour leur Voice of Nature: The Anthropocene, Nézet-Séguin a renoué avec son instrument de prédilection pendant la pandémie: le piano.
«C’est Renée qui m’a contacté», se souvient l’artiste multidisciplinaire. «C’est une amie à moi depuis des années. Elle m’a dit: "C’est le temps de faire un projet. [La pandémie] me fait penser à combien il faut prendre soin de notre planète." Et là, on a construit un programme qui passe d’œuvres d’il y a 100 ans à des œuvres commandées à des compositeurs et compositrices vivants pour nous parler des changements climatiques.»
Le triomphe dans cette catégorie a particulièrement «ému» Nézet-Séguin, dit-il, mais l’a aussi surpris, parce que c’était une catégorie avec plein de gens qu’on adore qui avaient tous de beaux projets».
Nézet-Séguin — le chef d’orchestre, cette fois-là — avait gagné un premier prix Grammy en 2022 pour la meilleure performance orchestrale avec Price: Symphonies Nos. 1 & 3, à la tête de l’Orchestre de Philadelphie.
Ce triomphe est en quelque sorte venu de son désir de «donner la parole à des communautés traditionnellement sous-représentées dans notre monde».
«J’avais gagné pour les œuvres de Florence Price, une pionnière; une compositrice afro-américaine, une femme noire, dans un milieu fermé à son genre et à sa race. Elle le dit elle-même. Donc, de gagner un Grammy, c’était très, très, très symbolique pour le travail qu’on est en train de faire dans toutes mes institutions, autant ici à Montréal avec l’OM qu’ailleurs aux États-Unis», se réjouit-il.
Voilà; un chapeau pour chaque Grammy. Comment l’artiste de 47 ans fait-il pour porter tous ces couvre-chefs sans devenir fou? Surtout que, lundi, tous les médias n’en avaient que pour lui et beaucoup moins pour Beyoncé, qui est pourtant devenue, la veille, l'artiste la plus décorée de l'histoire des Grammy.
«Parfois, le mot "horaire", ça devient un cauchemar», admet Nézet-Séguin.
Mais «il faut vivre dans le moment», résume-t-il — «essayer d’être dans le bonheur de faire la musique», même si c’est «plus facile à dire qu’à réaliser».