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Le gouvernement Legault s’en est tenu à de brefs éloges à l’endroit de Sophie Brochu, mardi, alors que presque tous les autres acteurs se montrent perplexes, déçus ou même inquiets face à la démission inattendue de la PDG.
Le gouvernement Legault s’en est tenu à de brefs éloges à l’endroit de Sophie Brochu, mardi, alors que presque tous les autres acteurs se montrent perplexes, déçus ou même inquiets face à la démission inattendue de la présidente et directrice générale d’Hydro-Québec.
Le premier ministre François Legault a ainsi publié un court gazouillis de deux phrases remerciant Mme Brochu et affirmant que «ça a été un plaisir de travailler avec elle sur de grands chantiers déterminants pour l’avenir du Québec, comme l’entente avec New York et le développement de la filière éolienne».
Voyez le compte rendu de Fanny Lachance-Paquette pour Noovo Info dans la vidéo ci-haut.
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Des différences d’opinions sur l’avenir du secteur énergétique étaient apparues à l’automne entre la grande patronne d’Hydro et le gouvernement Legault, Mme Brochu étant la force motrice derrière la récente stratégie énergétique axée sur la décarbonation de l’économie, les énergies vertes et le maintien du bloc patrimonial à tarif avantageux pour les Québécois. Elle avait prévenu que le Québec ne devait pas vendre son électricité au rabais au profit du développement économique.
Son départ est d’autant plus surprenant qu’en octobre dernier, elle affirmait à l’animateur Paul Arcand sur les ondes du 98,5 qu’elle resterait en poste «tant que le cadre de gouvernance à l’intérieur du gouvernement d’Hydro-Québec est sain et qu’on est capable de faire valoir les grandes prérogatives du besoin du système énergétique».
Chez Hydro-Québec, une personne au courant des projets de Mme Brochu, qui n’est pas autorisée à parler aux médias, affirme que la dirigeante n’a pas quitté son poste en raison de ses relations avec le gouvernement Legault. La principale intéressée n’aurait pas reçu une autre offre d’emploi et son état de santé ne serait pas en cause : «elle est en pleine forme.»
Mme Brochu n’a pas précisé les raisons de son départ dans une lettre envoyée aux employés, plus tôt mardi, ainsi que dans le communiqué de la société d’État. «Le moment est venu de passer le flambeau», déclare-t-elle dans un communiqué.
Le quotidien La Presse rapportait de son côté en octobre dernier que Mme Brochu avait eu des discussions musclées avec celui qui devait devenir ministre de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, un ardent promoteur du développement économique.
Or, M. Fitzgibbon y est également allé d’un bref hommage à la première femme à occuper la plus haute fonction de la société d’État, qu’il a qualifiée de «leader naturelle et dynamique, une inspiration pour plusieurs». Il l’a remerciée sur les réseaux sociaux pour sa contribution au secteur public, ajoutant qu’il était «certain que tu continueras d’influencer et de tracer la voie pour de nombreux décideurs de demain».
Merci Sophie Brochu. Tu es une leader naturelle et dynamique, une inspiration pour plusieurs. Merci pour ta contribution au secteur public. Je suis certain que tu continueras d’influencer et de tracer la voie pour de nombreux décideurs de demain. https://t.co/OAdJu9yJXl
— Pierre Fitzgibbon (@MinFitzgibbon) January 10, 2023
Côté politique, le chef intérimaire du Parti libéral (PLQ), Marc Tanguay, a aussi remercié la démissionnaire pour ses services, mais s’est surtout attardé sur le processus de nomination de la personne qui devra la remplacer, disant souhaiter «que le gouvernement nomme une personne qui aura les hautes compétences nécessaires». «Transparence et dialogue national sont requis», a-t-il ajouté.
Alors que le Parti québécois (PQ) n’avait toujours pas décidé de sa réaction en milieu d’après-midi mardi, le porte-parole de Québec solidaire en matière d’énergie, Haroun Bouazzi, a été le seul élu à accepter de donner une entrevue plutôt que de se réfugier derrière un commentaire sur les réseaux sociaux.
«C’est un choc, un séisme, je dirais même. Surtout dans un moment charnière comme ça de la politique énergétique du Québec, face à ses objectifs de carboneutralité en 2050, c’est très grave», a déclaré M. Bouazzi en entrevue avec La Presse canadienne.
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Selon le député solidaire, il fait peu de doute que le départ de Mme Brochu est directement imputable aux frictions avec le ministre Fitzgibbon: «Il n’y avait rien qui prédisait que Madame Sophie Brochu allait couper court à son mandat. En octobre, elle a bien signifié sa vision pour Hydro-Québec et clairement sa vision n’était pas la même que celle du ministre Fitzgibbon, qui voit plus des coups de 'cash' que les deux piliers que sont la transition écologique et le maintien des tarifs.»
Haroun Bouazzi ne cache donc pas son inquiétude face aux intentions d’une éventuelle succession décidée par le gouvernement Legault: «C’est quand même un gouvernement qui a découvert la question de la transition écologique lors de son deuxième mandat et qui nous parle de 'cash' à faire à chaque fois, ce qui n’est pas vraiment le bon état d’esprit pour atteindre la carboneutralité en 2050.»
De son côté, le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui représente la quasi-totalité des quelque 15 000 syndiqués d’Hydro-Québec, a publié un communiqué faisant part de sa «consternation» face à ce départ inattendu.
«Le départ de Sophie Brochu après seulement trois ans en poste fait craindre qu’une influence politique ait pu jouer un rôle dans sa décision», peut-on y lire, une allusion très claire au choc des visions avec Québec invoqué plus haut. Le mandat de Mme Brochu était de cinq ans.
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«Une période d’instabilité s’ouvre et cela devrait inquiéter l’ensemble des Québécois et Québécoises», déclare le président du SCFP-Québec Patrick Gloutney en faisant référence au «nombre effarant de pannes» survenues durant les Fêtes.
Deux sources syndicales requérant l’anonymat, car n’étant pas autorisées à parler aux médias, ont d’ailleurs dénoncé à La Presse canadienne la baisse continue de fiabilité du réseau sous le règne de Sophie Brochu telle que soulevée par la vérificatrice générale Guylaine Leclerc dans un rapport sévère en décembre dernier. Elles blâment notamment le non-remplacement des effectifs, la perte d’expertise et le virage vers l’autoformation pour cette chute de fiabilité.
Au nom de l'Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador, le Chef Ghislain Picard a dit accueillir «avec une certaine inquiétude [...] l'annonce de la démission de Sophie Brochu de son poste de PDG d'Hydro-Québec».
«Mme Brochu est une alliée importante pour les Premières Nations et elle adopte une approche de relations qui contraste grandement avec celle de ces prédécesseurs. Elle a su reconnaître l'importance de l'inclusion des Premières Nations dans les projets de développement de la société d'État tant au niveau des répercussions environnementales que socio-économiques», souligne-t-il dans un communiqué.
M. Picard en a profité pour demander au gouvernement du Québec de tenir compte des enjeux des Premières Nations dans le choix de la personne qui succèdera à Mme Brochu.
Le passage de Mme Brochu à Hydro-Québec a été marqué par la conclusion d’un contrat d’approvisionnement d’électricité de 30 milliards $ avec l’État de New York. En octobre dernier, Hydro-Québec a également réalisé la plus importante acquisition de son histoire aux États-Unis avec la société Great River Hydro.
Sous sa gouverne, Hydro-Québec a également révisé ses prévisions stratégiques pour constater la fin des surplus d’électricité. La société d’État aura besoin de nouveaux approvisionnements d’ici 2027.
Mme Brochu a plaidé à plusieurs reprises qu’il faudrait entamer une conversation sur les habitudes de consommation des Québécois et sur l’utilisation de l’électricité pour attirer des projets industriels.
Le conseil d’administration de la société d’État affirme qu’il «en mesure» de recommander des candidats au gouvernement Legault en vue de remplacer Mme Brochu.