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«Certains de ces contrats satellites ont été conclus assez récemment.»
Plus de 1800 contrats auraient été conclus en marge du contrat principal avec le consortium, dans le cadre du virage numérique de la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ).
C'est ce qui est ressorti lundi matin à la commission Gallant, qui enquête sur les ratés du projet informatique de la société d'État, connu comme le Carrefour des services affaires (CASA) et englobant la plateforme SAAQclic.
Une avocate de la commission, Charlotte Deslauriers-Goulet, a présenté la chronologie contractuelle derrière la modernisation technologique de la SAAQ.
Elle a indiqué que la SAAQ a fourni à la commission une liste de 1879 contrats conclus au fil des années.
L'avocate avance qu'un bon nombre de ceux-ci sont «satellites» et «participent directement ou indirectement» au projet CASA. Il s'agit de «tous les contrats qui évoluent ou qui ont évolué en périphérie» du contrat-cadre de 458,4 millions $ signé en 2017 avec l'alliance formée des firmes SAP et LGS, qui appartient à IBM, a expliqué Me Deslauriers-Goulet.
La liste peut comprendre notamment des mandats de conseillers stratégiques accordés en 2015, avant le lancement du processus d'appel d'offres, ainsi que pour du soutien technique pendant le développement du projet.
«Certains de ces contrats satellites ont été conclus assez récemment. Parce qu'on y retrouve notamment les contrats qui visent à ce que CASA finisse par arriver ou qui participent à redresser la situation problématique qui a eu lieu lors de la mise en service de la plateforme en ligne, ce que les médias nomment le fiasco SAAQclic», a évoqué l'avocate.
La commission ignore pour le moment la valeur totale de ces mandats «satellites», qui s'ajoutent au budget initial de 458,4 millions $ et aux dépenses supplémentaires de 153,7 millions $ se rattachant au contrat avec l'alliance.
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«Mais on sait qu'on parle d'un montant considérable», a précisé Me Deslauriers-Goulet.
La commission poursuit l'analyse de cette liste de contrats. La commission n'a pu également identifier «avec certitude» tous les cocontractants en faisant partie, mais certains sont intervenus directement avec les membres du consortium, a indiqué Me Deslauriers-Goulet.
La SAAQ a réagi au chiffre présenté par l'avocate. La société d'État affirme avoir octroyé 1879 contrats en technologies de l'information (TI) entre 2010 et 2025. De ce nombre, 931 ont été conclus entre 2010 et 2013 couvrant des besoins variés en TI, et ce, «avant même le début des travaux du projet CASA».
«Depuis 2014, 948 contrats ont été octroyés, y compris ceux liés à la réalisation du projet CASA», a indiqué la SAAQ dans un communiqué.
Rappelons que le projet de modernisation technologique de la SAAQ pourrait coûter minimalement plus de 1,1 milliard $ d'ici 2027, soit 500 millions $ de plus que prévu, selon les calculs du Vérificateur général (VG). Il est possible que le VG ait pris en compte certains de ces «contrats satellites» dans son estimation, mais sans en connaître leur nombre.
Plus tard lundi, un ancien membre du conseil d'administration de la SAAQ s'est demandé si les administrateurs avaient fait «trop confiance» à l'ancienne PDG, Nathalie Tremblay, sous qui le projet CASA a pris son envol.
Jude Martineau croit que le C.A. aurait pu proposer d'embaucher un chargé de projet «neutre», capable d'arbitrer certaines situations et qui aurait fait le lien entre la PDG, le vice-président aux TI et les finances.
«Là, le chargé de projet, c'était le responsable des TI (Karl Malenfant)», a affirmé M. Martineau, qui a siégé sur le C.A. de 2014 à 2020.
«On a peut-être surévalué la capacité de Mme Tremblay à gérer ça sans avoir quelqu'un à côté d'elle qui était neutre, comprenait ce que les gens des TI pouvaient lui dire et la secondait. (...) À moins que je me trompe, je ne pense pas que Mme Tremblay avait déjà participé à un projet de cette envergure-là», a-t-il dit.
Mme Tremblay a officiellement quitté son poste de PDG au début de l'année 2022.
M. Martineau a aussi été questionné sur les liens unissant des conseillers externes et l'ex-patron informatique de la SAAQ.
Il a été révélé au cours des dernières semaines que des ressources stratégiques ayant été mandatées pour préparer notamment le processus d'appel d'offres avaient déjà travaillé dans le passé avec M. Malenfant ou avaient obtenu auparavant des contrats avec la SAAQ. Le témoignage d'un ancien vérificateur interne de la SAAQ, Martin Lapierre, a suggéré que les appels d'offres avaient été conçus sur mesure de manière à pointer vers un nombre très restreint de fournisseurs.
Selon M. Martineau, il peut être normal pour un responsable des TI de vouloir s'entourer de personnes qu'il connaît et qui ont de l'expérience.
«Ça peut être profitable, en autant qu'ils aient les compétences. Et non pas, parce que c'est des chums», a soutenu M. Martineau.
Il n'a pas nié avoir déjà dit à un vérificateur interne en 2020 qu'«il y a de la consanguinité là-dedans», lorsqu'il avait pris connaissance d'un organigramme montrant les liens entre M. Malenfant et les conseillers stratégiques.
«Consanguinité, ce que ça veut dire, c'est que tout ce monde-là avait eu des relations avec M. Malenfant. Mais encore une fois, il pouvait être compétent.
«À partir du moment où la direction savait ça, c'est à elle de faire les vérifications nécessaires pour s'assurer qu'il n'y avait pas eu des contrats indus ou encore que la compétence des gens était correcte», a-t-il répondu au commissaire Denis Gallant.
Les travaux de la commission, qui en est à sa cinquième semaine, doivent se poursuivre mardi matin.