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Une nouvelle version «plus inclusive» remplace de plus en plus souvent le drapeau original de Gilbert Baker.
Créé en 1978 à la demande du politicien américain Harvey Milk, le drapeau arc-en-ciel est devenu le symbole le plus reconnaissable des communautés LGBTQ+ partout dans le monde. Mais au fil des ans, le drapeau s’est transformé, pour devenir plus représentatif des luttes vécues par les communautés qu’il représente.
«Avant d’avoir le drapeau arc-en-ciel, les seuls symboles que la communauté avait étaient des symboles assez tristes qui venaient des camps de concentration nazis», rappelle Bruno Laprade, agent de communication pour l’organisme Égides et historien du Village. Sous le Troisième Reich, les hommes gais ou bisexuels et les femmes trans étaient forcés de porter un triangle rose. D’autres groupes, comme les femmes lesbiennes et bisexuelles, ainsi que les hommes trans devaient parfois porter un triangle noir, les désignant comme personnes «asociales».
Le conseiller municipal de San Francisco Harvey Milk, l’un des premiers élus ouvertement gais aux États-Unis, a donc demandé à un collectif d’artistes de créer un nouveau symbole pour les membres de la diversité sexuelle en 1978, quelques mois avant son assassinat tragique, raconte Bruno Laprade.
Le collectif, composé notamment des artistes Gilbert Baker et Lynn Segerblom, propose alors un drapeau arc-en-ciel à huit bandes, entièrement fait à la main.
Selon M. Baker, l’arc-en-ciel a été choisi parce qu’il est symbole d’espoir. Les couleurs ont été choisies pour représenter le sexe (rose), la vie (rouge), la guérison (orange), la lumière du soleil (jaune), la nature (vert), la magie (turquoise), la sérénité (indigo) et l’esprit (violet).
Le drapeau original a toutefois été victime de sa popularité, particulièrement dans la foulée de l’assassinat d’Harvey Milk, le 27 novembre 1978. «Ils ont voulu en faire pour le rendre disponible un peu partout, mais le rose n’était pas commercialement disponible aussi facilement», explique Bruno Laprade. Gilbert Baker abandonne donc la bande rose, puis rapidement la bande turquoise, afin de maintenir la symétrie et la lisibilité du drapeau.
Toujours utilisé 45 ans plus tard, le drapeau arc-en-ciel original s’est toutefois transformé au fil des ans et cohabite désormais dans l’espace public avec plusieurs autres déclinaisons.
L’un des drapeaux les plus couramment utilisés aujourd’hui, le Progress Pride Flag, est l’oeuvre de l’artiste non-binaire Daniel Quasar, qui a ajouté en 2018 des triangles noir, brun, bleu ciel, rose et blanc au design de Gilbert Baker, pour symboliser les luttes vécues par les personnes trans, non-binaires et racisées au sein de la communauté LGBTQ+.
L’oeuvre de Daniel Quasar n’est toutefois pas la première à incorporer des bandes noire et brune. En 2017, l’hôtel de ville de Philadelphie révélait une première version du drapeau incorporant ces couleurs pour souligner la discrimination à laquelle sont sujettes les personnes racisées membres de la diversité sexuelle.
Et même la version de Daniel Quasar ne se veut pas une finalité en soi. L’artiste a encouragé les différentes communautés à se l’approprier et à l’adapter à leurs besoins, rendant même l’oeuvre disponible sous licence Creative Commons, ce qui permet à quiconque de la reproduire, de la diffuser et de la modifier gratuitement, sous certaines conditions.
L’artiste britannique intersexe Valentino Vecchietti a par exemple choisi d’y ajouter un cercle violet dans un triangle jaune, symboles des personnes intersexes.
«Ces drapeaux-là marquent un peu l’évolution de nos compréhensions, d’où on en est dans les combats actuels», estime Bruno Laprade, qui fait remarquer qu’en 1978, on parlait surtout des gais et des lesbiennes, sans accorder beaucoup d’espace aux personnes bisexuelles ou trans.
Il refuse toutefois de voir dans cette transformation un rejet du drapeau arc-en-ciel imaginé par Gilbert Baker.
«Ça ne veut pas dire que l’ancien drapeau n’est plus bon ou qu’il n’est plus inclusif, dit-il. Ça veut juste dire qu’on essaie de l’actualiser.»