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Les femmes victimes de violence conjugale sont trois fois plus susceptibles de contracter le virus de l'immunodéficience humaine, selon une étude.
Les femmes victimes de violence conjugale sont trois fois plus susceptibles de contracter le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), constate une étude menée par une équipe de recherche de l’Université McGill.
L’article publié dans The Lancet HIV révèle qu’il existe un lien étroit entre la violence fondée sur le genre et les épidémies de VIH dans certains des pays les plus touchés. Chez les femmes vivant avec le virus, celles qui ont vécu de la violence conjugale au cours de la dernière année ont 10 % moins de chances d’avoir une charge virale indétectable, l'étape ultime du traitement.
«Environ une femme sur quatre vivra une violence physique ou sexuelle pendant sa vie, affirme Mathieu Maheu-Giroux, professeur à l’Université McGill et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en modélisation de la santé des populations. Dans certains pays, c’est plus de 40% des femmes qui ont subi ce genre d'abus au cours de la dernière année».
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Les données montrent que les zones les plus affectées sont souvent aux prises avec une épidémie combinée de violence conjugale et de VIH. En Afrique subsaharienne, la proportion de personnes qui vivent avec le VIH dans la population générale est élevée. Plusieurs pays du cône sud-africain sont également touchés, comme l’Afrique du Sud, le Lesotho et l’Eswatini.
«Certaines régions du sud de l’Afrique peuvent avoir des prévalences du virus de 20 % à 30 %. C’est donc presque une adulte sur cinq, voire une sur trois qui vit avec le VIH», précise le chercheur. Au Canada, cette proportion est inférieure à 1 %.
Si les impacts de la violence conjugale sur le VIH sont explorés depuis une vingtaine d’années, l’accès à de nouvelles données a permis d’approfondir la causalité entre les deux phénomènes.
«Les études conduites depuis le début des années 2000 étaient uniquement capables d'identifier qui vivait avec le VIH. Aujourd’hui, de nouveaux biomarqueurs nous permettent de savoir si l’infection a été récemment acquise ou non. On peut alors déterminer ce qui arrive en premier : l’infection au VIH ou la violence», explique M. Maheu-Giroux.
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Malgré les études, la structure de causalité entre les violences et le VIH reste floue. Dans les cas de violences sexuelles, le risque de lésions ou d’abrasion des muqueuses est accru, ce qui a un impact direct sur l’acquisition du VIH.
À l’opposé, la violence physique n’agit pas de façon directe sur les risques de contracter le virus, mais peut avoir des répercussions majeures sur la santé mentale.
«Là où on voit une différence, c’est vraiment sur la charge virale. On pense que les conséquences sur la santé mentale pourraient avoir un effet négatif sur l’adhérence au traitement. Si on ne prend pas ses pilules, par exemple, la charge virale peut rebondir», indique le professeur.
Afin de diminuer les risques de transmission à leurs partenaires et d’augmenter leur espérance de vie, les personnes qui vivent avec le VIH doivent suivre un traitement rétro antiviral, qui permet de rendre leur charge virale indétectable.
«On ne guérit pas du VIH, mais il va être tellement bas dans le sang que les méthodes de laboratoire ne le détecteront pas. Des études ont démontré que si on ne décèle pas le VIH dans les échantillons, la probabilité qu'il soit transmis à des partenaires sexuels est nulle», soutient Mathieu Maheu-Giroux.
Le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida, aussi appelé ONUSIDA, coordonne actuellement l’action mondiale contre le virus dans le but de mettre fin à l’épidémie de sida d’ici 2030.
Les objectifs de l’organisme visent à ce que 95 % des personnes vivant avec le VIH soient diagnostiquées, que 95 % de celles-ci suivent un traitement et que 95 % des personnes traitées aient une charge virale supprimée.
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«En multipliant, on arrive à environ 85 % de l’ensemble des personnes vivant avec le VIH qui ne peuvent plus propager le virus. Plusieurs études mathématiques disent que si on réduit le nombre de personnes infectieuses à 15%, on va réussir à contrôler l’épidémie et à éliminer le VIH comme menace à la santé publique», précise le chercheur.
Il ajoute que l'existence d’une intersection entre les deux épidémies appelle ainsi à l’instauration d'interventions «plus intégrées», plutôt que d’avoir deux programmes verticaux distincts.
«Comme la violence fondée sur le genre est très présente dans le monde, y compris au Canada, il est urgent que nous endiguions la violence conjugale et le VIH, deux menaces pour la santé et le bien-être des femmes qui se renforcent mutuellement», a résumé Salome Kuchukhidze, doctorante en épidémiologie et auteure principale de l’article, par voie de communiqué.