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Dans le but de bonifier l'ambitieux projet de loi du ministre, une foule d'intervenants vont être entendus en commission parlementaire mercredi et jeudi. D'autres séances sont prévues au cours du mois de mai.
La réforme Dubé réussira-t-elle à «rendre le système de santé plus efficace»? Pour y parvenir, elle devra favoriser une réelle transparence dans le réseau et établir clairement une volonté de décentralisation des décisions vers les établissements locaux, ont réclamé tour à tour les intervenants invités à la première journée de consultations sur le projet de loi 15.
Dans le but de bonifier l'ambitieux projet de loi du ministre de la Santé Christian Dubé, plusieurs intervenants ont commencé à défiler en commission parlementaire mercredi. D'autres suivront jeudi, puis au cours du mois de mai pour un total d'une quarantaine de témoignages.
Avant le début des auditions, le ministre de la Santé Christian Dubé a déclaré aux journalistes qu'il avait toujours pour objectif d'adopter la loi avant la fin de la session parlementaire actuelle qui se termine le 9 juin. Il s'est toutefois dit «réaliste» devant le travail à accomplir. Une quarantaine d'intervenants vont défiler devant la Commission de la santé, puis une étude détaillée des articles doit être menée avec les oppositions.
Le ministre a cherché à simplifier le processus en réduisant les quelque 1200 articles à quatre grands thèmes sur lesquels s'entendre. Il précise que la loi vise à séparer les orientations des opérations; à améliorer la gouvernance clinique; à offrir un meilleur accès aux usagers; et à décentraliser la gestion pour se rapprocher du terrain.
Le ministre de la Santé a déposé le projet de loi 15 le mois dernier. Le volumineux document de près de 1200 articles prévoit notamment la création d'une nouvelle société d'État appelée Santé Québec.
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Cette nouvelle structure aura la responsabilité de coordonner les opérations du réseau de la santé québécois, alors que le ministère conservera son rôle d'énoncer des orientations et d'allouer les budgets.
À l'approche des consultations, le ministre a insisté sur sa volonté de prendre le temps d'entendre «l'ensemble de nos partenaires, ainsi que les gens du terrain». Il a répété que son projet de loi «est perfectible» et a tendu la main aux acteurs du réseau et aux oppositions pour l'améliorer.
Du côté des oppositions, Vincent Marissal de Québec solidaire et Joël Arseneau du Parti québécois ont tous deux évoqué des inquiétudes face à la place accordée au secteur privé dans les soins de santé. On cherche aussi à s'assurer que le ministre de la Santé demeure imputable de la performance du réseau et qu'il ne se cache pas derrière Santé Québec.
Mercredi, les parlementaires ont d'abord entendu la Commissaire à la santé et au bien-être, Joanne Castonguay. Celle-ci a analysé de nombreuses réformes dans des réseaux de santé à travers le monde. Elle a martelé le fait que «beaucoup se joue dans le pilotage de la transformation». «Ce sont les ajustements en continu qui importent», a-t-elle renchéri.
Elle a invité le gouvernement à établir une planification détaillée de sa transformation, d'en suivre étroitement les progrès et les résultats et de s'adapter constamment en cours de route. «L'évolution culturelle (du réseau) requiert beaucoup de temps et une stratégie délibérée», a-t-elle soutenu.
La commissaire a salué plusieurs stratégies employées par Québec, dont celle de faciliter la mobilité de la main-d'œuvre et celle de la création de conseils d'établissement qui vont permettre aux usagers de faire entendre leur voix auprès des gestionnaires.
En matière de décentralisation, Mme Castonguay craint que la gestion des opérations locales demeure entre les mains de Santé Québec puisque les établissements vont perdre leur identité légale distincte. Ils ne pourront donc plus conclure d'ententes de services de manière autonome à moins que la société d'État ne délègue des pouvoirs aux gestionnaires locaux.
La vérificatrice générale du Québec (VGQ), Guylaine Leclerc, a livré un plaidoyer pour la transparence dans toutes les ramifications du réseau de la santé, incluant le privé. En donnant l'exemple des services ambulanciers qui refusent d'ouvrir leurs livres, elle craint de voir le refrain se répéter dans les cliniques et les autres ressources privées.
En réponse aux inquiétudes de la VGQ, le ministre Christian Dubé a dit avoir bien entendu ses demandes et vouloir lui accorder les pleins pouvoirs de vérification, incluant chez les partenaires privés du réseau, peu importe le mode de rémunération de ces entreprises, que ce soit par subvention ou par achat de services.
Ce souci de transparence a aussi rejailli du témoignage de Me Michel Clair, ancien ministre et président de la Commission d'étude sur les services de santé et les services sociaux au début des années 2000. Me Clair a proposé la création de comités de surveillance locaux à une échelle «qui parle aux gens», c'est-à-dire de territoires naturels de MRC par exemple.
Ces comités citoyens et communautaires pourraient être composés d'intervenants locaux, d'organismes et d'autres instances locales. Leur rôle serait d'abord de convoquer les gestionnaires d'établissements de santé locaux pour évaluer la performance des services, puis de formuler des recommandations à ces mêmes dirigeants.
La présidente-directrice générale de l'Association des cadres supérieurs de la santé et des services sociaux, Carole Trempe, a appelé à «humaniser la gestion» en rappelant que «le réseau est géré par des humains, pour des humains».
Elle demande tout simplement que l'on «donne un mandat clair» aux dirigeants des établissements tout en leur laissant «les coudées franches» pour gérer leur organisation selon leur compétence et en tenant compte des particularités de chaque région. C'est cette autonomie qui fera véritablement foi de la volonté de décentralisation exprimée par le ministre.
En fin d'après-midi, la présidente de l'Association des gestionnaires des établissements de santé et de services sociaux, Danielle Girard, a présenté neuf recommandations portant sur la reconnaissance du travail de ses membres, du respect de leur autonomie et du besoin de leur fournir les ressources nécessaires à leur travail.
Elle a voulu mettre en lumière l'importance de l'expertise des gestionnaires de proximité. Dans un virage aussi majeur que celui proposé, elle insiste sur l'importance de consulter ses membres qui sont sur le terrain.
L'élément de base, c'est que les rôles de chacun soient clairement définis, a-t-elle ajouté. Cela inclut de respecter une certaine distance entre le ministre et les opérations sur le terrain. Elle insiste aussi sur l'autonomie des gestionnaires d'établissements qui doivent pouvoir donner une couleur locale à leurs opérations.
Jeudi, le directeur patient et co-directeur scientifique au Centre d'excellence sur le partenariat avec les patients et le public, Vincent Dumez, puis l'Association des conseils des médecins, dentistes et pharmaciens du Québec, suivis du Conseil pour la protection des malades et du Regroupement provincial des comités des usagers prendront la parole.