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Il y aura les rituels familiers qui suivent la mort d’un président américain.
Près de 44 ans après que Jimmy Carter a quitté la capitale américaine après une défaite cuisante, le 39e président revient à Washington pour trois jours de rites funéraires d'État à partir de mardi.
La dépouille de M. Carter, qui repose au Carter Presidential Center en Géorgie depuis samedi, quittera le campus d'Atlanta mardi matin, accompagnée de ses enfants et de sa famille élargie. La Special Air Mission 39 quittera la base aérienne de réserve de Dobbins, au nord d'Atlanta, et arrivera à la base Andrews, au Maryland. Un cortège partira de là jusqu'à Washington et le Capitole, où les membres du Congrès lui rendront hommage lors d'une cérémonie en après-midi.
Jimmy Carter, décédé le 29 décembre à l'âge de 100 ans, sera ensuite exposé mardi soir et à nouveau mercredi. Il aura droit jeudi à des funérailles d'État à la cathédrale nationale de Washington. Le président Joe Biden prononcera un éloge funèbre.
Il y aura les rituels familiers qui suivent la mort d’un président américain – le retour de l’Air Force à Washington, une garde d’honneur militaire portant le cercueil enveloppé du drapeau sur les marches du Capitole, le catafalque de Lincoln dans la Rotonde.
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Il y aura aussi un symbolisme propre à M. Carter: son corbillard s’arrêtera au mémorial de la Marine américaine, où sa dépouille sera transférée dans un caisson tiré par des chevaux pour le reste de son voyage vers le Capitole. L’emplacement fait référence à la place de M. Carter en tant que seul diplômé de l’Académie navale américaine à devenir commandant en chef des armées.
Tout ce faste comportera une certaine ironie pour le démocrate, qui est passé de son entrepôt de cacahuètes familial au manoir du gouverneur de Géorgie et finalement à la Maison-Blanche. Cet ingénieur technocrate, baptiste souriant, avait remporté la présidence en promettant de changer les manières de Washington – et il a évité bon nombre de ces règles non écrites lorsqu’il est arrivé dans la capitale.
«Jimmy Carter a toujours été un outsider», a déclaré le biographe Jonathan Alter, expliquant comment il avait capitalisé sur les retombées de la guerre du Vietnam et du scandale du Watergate, qui ont renversé Richard Nixon. «Le pays avait soif de renouveau moral et de voir M. Carter, ce personnage authentiquement religieux, venir nettoyer les choses.»
De 1977 à 1981, M. Carter était le résident le plus haut placé de la capitale, mais il n’a jamais maîtrisé véritablement ce rôle. «Il pouvait être irritable et avoir une personnalité peu attrayante» dans une ville qui prospère grâce aux relations, a déclaré M. Alter, décrivant un président qui avait du mal à s’entendre avec les élus et les journalistes.
Les gardiens de la bonne société de Washington n’ont jamais non plus accueilli Jimmy et Rosalynn Carter, ne sachant pas trop quoi penser de ces sudistes de province qui portaient leurs propres bagages et achetaient leurs vêtements dans de grands magasins. M. Carter a vendu ce qui avait été le yacht présidentiel, un avantage que ses prédécesseurs avaient utilisé pour recevoir les puissants acteurs du Capitole.
Au début de la présidence Carter, la chroniqueuse mondaine du «Washington Post» Sally Quinn a qualifié les Carter et leur garde rapprochée à la Maison-Blanche de «tribu étrangère», incapable de «jouer le jeu» de la capitale.
Longtemps après avoir quitté ses fonctions, Jimmy Carter déplorait encore une caricature politique publiée autour de son investiture qui représentait sa famille s’approchant de la Maison-Blanche avec sa mère, «Miss Lillian», mâchonnant un brin de blé.
En tant que président, il voulait empêcher l'orchestre des Marines de jouer «Hail to the Chief» (Salut au chef), estimant que cela élevait trop le président. Ses conseillers l’ont convaincu que cela faisait partie du boulot. Et l'hymne a été joué samedi en Géorgie alors qu’il arrivait à son Centre présidentiel après un cortège à travers sa ville natale de Plains et devant la ferme de son enfance.
Il s'est adressé à la nation depuis la Maison-Blanche vêtu d'un simple cardigan, aujourd'hui exposé dans son musée et sa bibliothèque. Sa dépouille repose désormais dans un cercueil en bois, porté et gardé par des militaires dans leurs uniformes impeccables.
«C'était un homme simple à bien des égards», a déclaré Brad Webb, un vétéran de l'armée qui faisait partie des plus de 23 000 personnes venues rendre hommage à l'ancien président dans sa bibliothèque, qui se trouve sur le même campus que le Carter Center, où l'ancien président et la première dame ont basé leurs décennies de plaidoyer pour la démocratie, la santé publique et les droits de la personne dans le monde en développement.
«C’était aussi un homme compliqué, qui a accepté sa défaite et a fait beaucoup de bien dans le monde», estime M. Webb, qui avait voté pour les républicains Gerald Ford en 1976 et Ronald Reagan en 1980. «Et, en y repensant, certains des événements de sa présidence – l’inflation, les otages en Iran, la crise énergétique – étaient vraiment des choses qu’aucun président ne peut réellement contrôler.
«Nous pouvons regarder en arrière avec une certaine perspective et comprendre qu’il a été un excellent ancien président, mais qu’il a également eu une présidence que nous pouvons mieux apprécier avec le recul.»