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Plusieurs regroupements de maisons d’hébergement lancent un cri du coeur.
C’est du moins ce que semblent penser plusieurs regroupements de maisons d’hébergement, qui ont lancé un cri du cœur en invitant François Legault à agir personnellement afin que s’ajoutent les places promises en maison d’hébergement il y a déjà de longs mois.
Beaucoup de chiffres dans ce dossier, beaucoup de complications, aussi. Mais au-delà de ça, concrètement, dans la vraie vie des femmes victimes de violence conjugale, quelles sont les répercussions de cette lenteur bureaucratique?
J’ai voulu en discuter avec SOS violence conjugale puisque l’organisme a un point de vue unique: c’est souvent la première porte d’entrée des victimes. Les femmes qui appellent ou écrivent à SOS, m’explique Claudine Thibaudeau, responsable du soutien clinique, attendent avec impatience et, surtout, souffrance que de nouvelles places en maison d’hébergement se libèrent.
Et même s’il y a toujours une solution, même si les intervenantes sont prêtes à tout pour aider une victime, on ne peut pas se mettre dans le sable.
«Parfois, on doit dire qu’on n’a pas de place, de rappeler demain. C’est le plus difficile, de dire à quelqu’un qui pleure au bout du fil que ça ne fonctionnera pas.»
C’est délicat de dire ça, parce que je ne voudrais pas qu’une victime, en lisant ces lignes, se dise que ça ne vaut pas la peine de communiquer avec SOS violence conjugale.
«On trouve TOUJOURS une solution, alors il ne faut jamais hésiter à communiquer avec nous. On dit juste que ça serait beaucoup plus simple si on augmentait les places en maison d’hébergement afin qu’aucune ne soit jamais au maximum de sa capacité et qu’il y ait, en tout temps, de la place pour les femmes et leurs enfants.»
Claudine m’explique que, trop souvent, les endroits où il y aurait de la place se trouvent à des centaines de kilomètres de la ville d’origine de la victime.
«On ne veut pas déraciner les femmes et les enfants. Une femme qui est loin de son milieu, sans réseau et sans ressource, ce n’est pas acceptable. Il y a des limites à ce qu’il est raisonnable de demander à des victimes. C’est déjà tellement dur pour elles de s’en aller en maison d’hébergement. C’est une étape immense.»
C’est vrai. Prenons l’exemple d’une séparation où il n’y a aucun contexte de violence. C’est déjà un moment difficile et il y a énormément d’enjeux. Transposons maintenant cet exemple à un cas où il y aurait une dynamique de violence.
«T’as pas de place dans ta tête pour avoir une réflexion parce que tu es occupée à sauver ta peau et à gérer le quotidien pour éviter les crises et la violence. T’es complètement envahie par les conséquences de la violence, t’as de la misère à réfléchir. Les femmes se retrouvent dans des contextes de séparation où elles sont certaines certaines que ça va mal se passer.»
Imaginez maintenant que vous traversez tout ça, que vous prenez sur vous de demander de l’aide et qu’on vous répond… de rappeler demain. Il serait inconcevable d’appeler au 911 et de se faire dire par l’opérateur de rappeler le lendemain. Ces femmes sont dans des situations d’urgence où leur vie peut être mise en danger. Et on leur dit «attends».
Quand une victime appelle pour se mettre à l’abri, on devrait pouvoir dire oui tout de suite. Car ces femmes-là sont rendues au bout de ce qu’elles sont capables d’endurer et se retrouvent exposées à un grand risque, celui de s’ajouter aux statistiques sur les féminicides.
On ne dit pas à quelqu’un dont la maison brûle de rester à l’intérieur. Alors pourquoi demande-t-on à des victimes de violence conjugale de patienter dans leur maison en flammes?