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Abigail Matte a 14 ans. Elle nous partage sa nuit passée dans la peau d'une personne en situation d'itinérance. Voici sa lettre ouverte.
«Comment est-ce que tu as entendu parler de l’événement?»
C’est de loin la phrase que j’ai le plus entendue quand je me suis présentée à la Nuit des sans-abri de Sainte-Foy le 18 octobre.
Ça m’a surprise, car ce fut un événement de sensibilisation agréable et constructif pour lequel je crois certainement que plus de publicité devrait circuler.
C’est pour cette raison que je partage cette lettre aujourd’hui: je veux pouvoir partager l’expérience mémorable que j’ai vécue avec une vingtaine d’autres personnes pour tenter d'en apprendre plus sur ce que c’est, de se retrouver en situation d’itinérance.
Quand mon père et moi sommes arrivés sur place, on était très peu. Il y avait quelques personnes venues participer à la Nuit et les travailleurs de rue qui l’organisaient. De la musique jouait, on commençait à préparer le barbecue pour les hot-dogs et un feu était installé près des chaises mises à notre disposition.
On s’est tiré une bûche et un des travailleurs de rue nous a annoncé que sous nos chaises se trouvaient des questions pour commencer notre discussion. Ça m’en a appris beaucoup sur les sans-abri. Au contraire de la croyance populaire, il existe plusieurs types d’itinérance: visible, cachée, dans les véhicules et j’en passe.
On a pu partager des préjugés et détruire les mythes, comme celui que les personnes en situation d’itinérance l’ont «cherché» en étant toxicomanes ou en ayant des problèmes de jeu.
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On a aussi mis les points sur les «i» par rapport à leur allure. Souvent, quand on imagine un itinérant, on imagine un mendiant en tenue sale et usée. En vérité, ils font avec ce qu’ils trouvent et, notamment pour cette raison, méritent le respect pour leur débrouillardise. En effet, ce n’est pas tout le monde qui serait capable de survivre à notre hiver avec un bout de carton comme seul abri.
Plus la soirée avançait, plus les participants allaient et venaient. J’ai entendu et partagé des histoires touchantes avec les personnes présentes et, avant de partir, j’ai eu la chance de pouvoir essayer un parcours ludique et instructif représentant le parcours de vie d’un sans-abri. Je devais me mettre à la place d’un itinérant avec une blessure à un genou. On m’a fait enfiler trois paires de pantalons, deux manteaux, des bottes dont les semelles furent remplacées par des sacs de poubelle et, pour finir mon look d’enfer, un sac à dos et une planche de bois pour m’empêcher de plier la jambe droite. J’étais prête à partir!
Le parcours était relativement simple: je devais seulement descendre les escaliers puis monter la rampe pour les personnes handicapées.
La difficulté, c’était les embûches qui arrivaient à la fin de mes tours. Chaque fois, on arrêtait pour interagir un instant avec plusieurs personnages, comme un médecin, la police, un voleur ou un voisin en colère, et chacun me rajoutait une brique dans mon sac à dos représentant toutes les difficultés et les douleurs de se retrouver en situation d’itinérance.
Le parcours se finissait avec le travailleur de rue qui m’a aidée à me remettre sur le bon chemin. Il faut dire que j’étais bien heureuse que l’on me retire les briques, mais tout de même triste de savoir que ce n’est pas tout le monde qui s’en sort.
En somme, la Nuit des sans-abri, c’est plus que juste un événement de sensibilisation. C’est profiter d’une soirée avec des gens intéressants qui sont sympathiques, généreux et qui sont là pour avoir des discussions mémorables et peut-être faire une différence.
Nous y verrons-nous l’année prochaine?