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La tendance «What I Eat in a Day» sur TikTok soulève des questions sur son impact sur la santé mentale.
Alors que la tendance «What I Eat in a Day» envahit TikTok avec plus de 2 millions de vidéos sur la plateforme, la Société canadienne de pédiatrie constate une forte hausse des troubles alimentaires chez les adolescents ces dernières années. Ils représentent aujourd’hui la deuxième maladie chronique la plus importante dans cette tranche d’âge. Peut-on faire un lien entre ces deux phénomènes?
«Je peux affirmer que les réseaux sociaux ne peuvent pas créer ou développer un trouble alimentaire en soi. Mais ils contribuent à une mauvaise estime de soi», soutient Tania Lemoine, clinicienne et spécialiste en troubles de l’alimentation. Et selon elle, une mauvaise estime de soi peut exacerber des problématiques liées aux troubles alimentaires, en particulier chez les jeunes, exposés à des contenus qui prônent des idéaux souvent inaccessibles.
Le concept de la tendance «What I Eat in a Day» est simple: des internautes dévoilent tout ce qu’ils mangent dans une journée – souvent une alimentation présentée comme ultra-saine.
«Des vidéos en ligne qui montrent une alimentation qui est “parfaite”, il y en a beaucoup», affirme Sonia Tremblay, créatrice de contenu et militante contre la culture des diètes. Elle souligne que ces vidéos, souvent axées sur des régimes véganes ou protéinés, peuvent engendrer un sentiment de comparaison malsain. «Le problème avec la perfection, quand on parle de santé mentale, c’est que vient l’enjeu de la comparaison.»
Entre 5 et 15% des adolescents canadiens souffriraient d’un trouble alimentaire, selon diverses études. Les femmes représentent environ 90% des personnes touchées.
Toutefois, les difficultés liées à l’image corporelle et à l’alimentation sont encore plus fréquentes chez les jeunes. Jusqu’à 77% d’entre eux auraient déjà tenté de perdre du poids en adhérant à un régime, selon une étude réalisée en 2016, soit avant l’avènement de TikTok.
Le problème n’est donc évidemment pas né avec les réseaux sociaux. Mais leur influence est «plus directe et plus ciblée» depuis quelques années, estime la chercheuse Isabelle Thibault, professeure en psychoéducation à l’Université de Sherbrooke, qui étudie le lien entre les réseaux sociaux et les troubles alimentaires.
Quant à la tendance, «What I Eat in a Day», Sonia Tremblay ne la condamne pas en soi. C’est plutôt le type de messages que les créateurs de contenu qui l’utilisent cherchent à passer qui la dérange. Très suivie sur TikTok et Instagram, avec 60 000 abonnés, elle se réapproprie ce format en prônant une alimentation «réaliste».
«Le danger, c’est comment les gens vont la percevoir. Chez quelqu’un de plus vulnérable, les troubles du comportement alimentaire peuvent parfois commencer par essayer la diète de quelqu’un et s’attendre aux mêmes résultats», explique-t-elle.
À ce sujet, Tania Lemoine insiste sur l’importance du discernement. «Mon conseil, ce serait de ne pas [consommer du contenu] où on met la pression. (…) Exercez votre jugement. Posez-vous la question: “Est-ce que cette vidéo-là me fait réellement du bien?”»