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Politique

Un candidat conservateur sur des tribunes complotistes

Sylvain Goulet adhère à l'idée du «great reset».

Une urne électorale est visible avant l'élection fédérale de 2019 aux bureaux d'Élections Canada à Gatineau, au Québec, le vendredi 20 septembre 2019.
Une urne électorale est visible avant l'élection fédérale de 2019 aux bureaux d'Élections Canada à Gatineau, au Québec, le vendredi 20 septembre 2019.
Patrice Bergeron
Patrice Bergeron / La Presse canadienne

Un candidat conservateur québécois antiavortement participe régulièrement à une émission sur une chaîne YouTube évangélique pour discuter de thèmes complotistes.

Sylvain Goulet est le candidat du Parti conservateur du Canada (PCC) qui affronte le chef bloquiste Yves-François Blanchet dans Beloeil-Chambly.

Il est président d'un cabinet de services financiers en Montérégie, mais soutient dans les émissions de ThéoVox (du mot grec «theo», Dieu, et du latin «vox», voix) sur YouTube que le système financier nord-américain est un système pyramidal frauduleux, à la Ponzi, avec des banques «artificielles».

Après avoir visionné de nombreuses heures d'émissions ThéoVox, La Presse canadienne a demandé au PCC une entrevue avec M. Goulet, mais la requête a été refusée. Le parti a aussi été appelé à commenter les propos de son candidat, mais n'a pas donné suite à la demande.

Le PCC a déjà écarté cinq candidats depuis le début de la campagne et le Parti libéral (PLC) deux. La période de mise en candidature est terminée depuis lundi.

Vendredi, le chef bloquiste Yves-François a laissé entendre qu'il soupçonne les partis adverses d'avoir bâclé les vérifications sur les antécédents de leurs candidats.

«Great reset» et communisme

M. Goulet adhère à l'idée du «great reset», la «grande réinitialisation», un concept lancé par l'économiste Klaus Schwab, à la tête du Forum économique mondial pour une mise à jour du système économique, mais réinterprété par des penseurs d'extrême droite.

Selon ces penseurs, les élites mondiales ont planifié la pandémie de COVID-19 pour imposer une restructuration du monde, un nouveau régime qui abolirait la propriété privée et imposerait un contrôle aux populations.

 

Le système actuel est «tellement fragile qu'un "great reset" serait peut-être même une bonne affaire», affirme M. Goulet, dans une émission de TheoVox du 27 février dernier.

À l'émission du 6 mai 2021, en pleine pandémie, quand il se fait demander par l'animateur si la Prestation canadienne d'urgence (PCU) est le «début du communisme» au Canada, M. Goulet répond que «c'est un peu ça» et que c'est «comme à Cuba», en ajoutant que «le 'great reset' va avoir cet aspect-là».

Du même souffle, il soutient que le gouvernement agit comme du temps de «Marie-Antoinette», de l'Ancien Régime en France, et qu'il retire des droits aux citoyens.

Avortement

Le candidat conservateur laisse entendre qu'il est ouvertement contre l'avortement.

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Il dit que ce n'est pas son «cheval de bataille» mais que, «éventuellement», son interdiction au «deuxième et troisième trimestre pourrait être un combat».

Il soutient qu'il «aime beaucoup Maxime» (Bernier, le chef du Parti populaire du Canada), mais que comme il est trop marginalisé, «tassé», il s'est rallié au Parti conservateur, qui a «plus d'accointances avec» le mouvement antiavortement.

Il laisse par ailleurs entendre que la mentalité présente actuellement chez beaucoup de couples de ne pas avoir d'enfants constitue un «problème».

Incidemment, vendredi, le chef conservateur Pierre Poilievre a assuré que s'il formait le prochain gouvernement, il n'allait pas restreindre le droit des femmes à l'avortement.

Carney

M. Goulet ne se gêne pas pour dire tout le mal qu'il pense du nouveau chef libéral, Mark Carney, comme les panélistes des émissions ThéoVox, qui l'associent à tous les grands complots.

L'animateur affirme notamment qu'il a «beaucoup de squelettes dans le placard», lié à «l'agenda du 'great reset'» et que Justin Trudeau est un «enfant de choeur» comparé à M. Carney.

«Est-ce qu'on peut vraiment faire confiance à un homme si profondément enraciné dans l'élite mondialiste pour diriger une nation souveraine comme le Canada?», demande l'animateur à M. Goulet.

«Définitivement pas», a-t-il répondu.

«Mais les gens ne suivent pas ça», déplore-t-il.

«Ils se laissent balancer (sic) par les médias. Les médias disent: Carney, il est bon cette semaine. (...) Il s'est fait critiquer solidement cette semaine par les médias, mais les gens oublient vite.»

Blanchet réagit

Est-ce que des propos aussi inusités de la part d'un adversaire pourraient favoriser ultimement le chef bloquiste Yves-François Blanchet en vue de sa réélection dans sa circonscription?

«Je ne pense pas avoir besoin d'être avantagé de quelque façon que ce soit dans ma circonscription», a répondu M. Blanchet en mêlée de presse vendredi.

Il soupçonne ses adversaires d'avoir précipité le choix de leurs candidats et d'avoir mal effectué le travail préalable de scrutation.

«J'ai l'impression que les vérifications d'usage n'ont pas toutes été impeccables», a-t-il conclu.

Les panélistes des émissions de ThéoVox relaient les thèmes habituels d'une certaine droite religieuse complotiste, des attaques contre les médias dits «mainstream» et les «élites», la corruption du gouvernement et du CRTC, le retour à des valeurs traditionnelles, la «manipulation du peuple» avec des mensonges, l'autoritarisme croissant depuis la pandémie de COVID-19, etc.

Dans une petite note biographique sur son site, le PCC présentait M. Goulet comme un homme de famille engagé, mais vendredi, le texte était disparu. 

Patrice Bergeron
Patrice Bergeron / La Presse canadienne