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Société

SAQ: les produits américains n’ont pas encore passé leur date de péremption

La riposte du gouvernement Legault face aux droits de douane de l’administration Trump a toutefois entraîné certains coûts.

Le président et chef de la direction, Jacques Farcy, de la Société des alcools du Québec (SAQ) pose dans une succursale à Montréal, le mardi 3 juin 2025.
Le président et chef de la direction, Jacques Farcy, de la Société des alcools du Québec (SAQ) pose dans une succursale à Montréal, le mardi 3 juin 2025.
/ La Presse canadienne

Le retrait des produits américains des tablettes de la Société des alcools du Québec (SAQ) n’a pas encore entraîné de pertes pour la société d’État, tandis que les bouteilles sont conservées en entrepôt jusqu’à nouvel ordre. 

Pour le moment, l’alcool américain reste un actif à court terme qui n’a pas encore perdu sa valeur, explique le président et chef de la direction de la SAQ, Jacques Farcy, en entrevue en marge du dévoilement du rapport annuel.

«Ce ne sont pas des produits frais ou périssables, a souligné M. Farcy. Donc, ces produits-là, ils gardent, je dirais, leur valeur. Si les choses s'éternisaient, il y aurait peut-être d'autres discussions à avoir.»

La riposte du gouvernement Legault face aux droits de douane de l’administration Trump a toutefois entraîné certains coûts, car il a fallu manutentionner les produits visés une deuxième fois, précise le dirigeant. 

Les tergiversations du président américain ont toutefois donné un peu de temps à la SAQ pour réduire les impacts financiers de la riposte québécoise. 

Le gouvernement Legault avait demandé à la SAQ de retirer les produits américains de ses tablettes dès le début du mois de février. Comme M. Trump avait donné un sursis, à la dernière minute, avant de finalement passer à l’offensive un mois plus tard, les produits américains n’ont été retirés que le 4 mars.  

«Entre le mois de février et le mois de mars, il y a eu beaucoup d'engouement de certains clients pour faire des réserves de certains produits américains, a constaté M. Farcy. Donc, cet élément-là nous a bénéficié.»

La décision reviendra au gouvernement Legault de décider lorsque la SAQ pourra vendre des produits américains à nouveau, a indiqué M. Farcy. 

Les consommateurs auront également leur mot à dire, car l’effet à plus long terme de la guerre commerciale sur les habitudes de consommation demeure inconnu. 

«Il y a un choix qui appartient à chacun des Québécois, comme citoyens, a souligné M. Farcy. Est-ce qu'ils vont choisir de retourner vers des produits américains ou est-ce qu'ils vont choisir de rester (fidèles) à d'autres produits, notamment certains produits québécois?»

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La vente de produits québécois a pourtant reculé de 0,8 % au cours de l’exercice 2024-2025 clos le 29 mars, selon le rapport annuel de la société publiée jeudi. 

La tendance devrait toutefois s’inverser tandis qu’il y a «un fort engouement» pour les produits locaux depuis quelques mois. «L'achat local reprend beaucoup d'intérêt, surtout dans le contexte politique qu'on connaît», a avancé le PDG.

La consommation d’alcool recule

La SAQ a affiché une légère baisse de ses ventes au cours de l’exercice 2024-2025, tandis que la tendance du déclin de la consommation d’alcool se poursuit. «Les indications qu'on a démontrent, effectivement, que c'est sans doute quelque chose qui est là pour rester, a prévenu M. Farcy. Ce n'est pas un phénomène, je dirais, ponctuel ou à court terme.»

Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces changements d’habitude. La population en général est plus sensibilisée sur les effets de la consommation de l’alcool sur la santé. Les jeunes boivent moins. Les consommateurs ont aussi moins de marges de manœuvre pour les dépenses discrétionnaires. Certaines communautés issues de l’immigration ont aussi des habitudes différentes par rapport à l’alcool. 

Les ventes de la SAQ ont ainsi reculé de 1,4 %, par rapport à l’an dernier, pour s’établir à 4 milliards $ au cours de l'exercice 2024-2025. Le bénéfice net, pour sa part, a diminué de 1,9 % à 1,4 milliard $. Ce profit est remis au gouvernement du Québec sous forme de dividende. 

Pour la SAQ, il n’est pas question d’inciter les Québécois à boire davantage, mais la société d’État n’a pas l’intention de rester les bras croisés pour autant, a insisté M. Farcy. 

Il souligne que le tiers du marché échappe à la SAQ, notamment les prêts à boire (des cocktails en cannettes) vendus en épicerie ou au dépanneur. «C’est plutôt ces occasions de consommation dans lesquelles on est peut-être un petit peu moins accessible, sur lesquelles on veut travailler pour se rendre plus accessible.»

Fermeture de succursales

Dans ce contexte, la SAQ a également décidé de fermer huit succursales, jugées moins performantes, au cours de l’exercice 2025-2026.

La décision a soulevé une levée de boucliers de la part des élus municipaux qui affirment que la perte de ces succursales entraînera la dévitalisation de rues commerciales.

M. Farcy a défendu cette décision. «Ce n’est jamais facile de le faire (de fermer un établissement), mais d'une certaine manière, les clients nous ont déjà témoigné au travers de leur comportement d'achat qu'ils ne sélectionnaient plus ces succursales comme étant leur succursale de destination.»

«On est dans un contexte où le volume est en décroissance, a ajouté le PDG. Ultimement, on comprend que cette décroissance-là, elle a des impacts à un moment donné.»

Il a ajouté que la société d’État se doit de gérer efficacement ses activités, car ses bénéfices servent à financer les services publics. 

Si le sort des huit succursales semble scellé, M. Farcy ouvre la porte à un éventuel retour dans ces marchés, si les conditions changent. «Peut-être que, dans quelques années, on pourrait envisager d'autres choses pour être capable de servir ces zones-là si les choses évoluent.»

M. Farcy ne s’est pas avancé à savoir si d’autres fermetures seraient nécessaires, mais il confirme que cette solution pourrait être envisagée tandis que la direction révise la performance de son réseau chaque année. «C'est difficile de répondre à cette question, mais tout est sur la table et, pour nous, il n'y a pas de sujet tabou. »

/ La Presse canadienne