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Il y a 12 mois, le Québec est devenu la première juridiction au Canada à lancer un système de suivi à deux volets pour les suspects de violence conjugale.
Il y a 12 mois, le Québec est devenu la première juridiction au Canada à lancer un système de suivi à deux volets pour les suspects de violence conjugale, et bien que les groupes de défense des droits des victimes accueillent favorablement la technologie, ils veulent en savoir plus sur son efficacité.
L'équipement de suivi est composé d'un bracelet porté par le suspect et d'une application mobile qui permet à la victime de surveiller les déplacements du suspect.
Depuis le début du programme, les autorités québécoises ont utilisé les bracelets dans 20 cas, principalement à Québec et dans quelques autres régions de la province, excluant Montréal.
Louise Riendeau, porte-parole d'un groupe de défense des droits des victimes qui travaille avec des refuges pour femmes, affirme que les bracelets sont un outil, mais pas une solution magique.
«On ne sait pas à quelle fréquence les autorités envisagent d'ordonner aux suspects de porter les bracelets par rapport au nombre de fois où les appareils sont utilisés», explique en entrevue Mme Riendeau, qui est membre du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.
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«Il y a très peu d'informations disponibles», déplore Louise Riendeau, qui ajoute que son groupe ne sait pas si la technologie permet aux victimes de se sentir plus en sécurité. «Nous ne savons pas si les victimes se sentaient plus en sécurité ou s'il y avait certains problèmes; si ça les plaçait en état d'hypervigilance ou si au contraire, tout était positif.»
Le bracelet utilise la technologie de la géolocalisation et est équipé d'un haut-parleur. Si un suspect enfreint ses conditions — par exemple en étant trop près du domicile ou du lieu de travail de la victime — il recevra une alerte via le haut-parleur du bracelet. Si le suspect ne se conforme pas, la police est contactée.
Les bracelets ne peuvent être utilisés qu'avec le consentement de la victime. Ils peuvent être imposées à des suspects qui sont libérés sous caution, qui purgent une peine communautaire ou qui sont libérés sous condition après avoir purgé une peine dans une prison provinciale. Les suspects de violence conjugale peuvent se voir ordonner de les porter par un juge, un directeur de prison ou un agent de la Commission des libérations conditionnelles ou du service correctionnel du Québec.
Les défenseurs des victimes affirment que les bracelets ne devraient pas remplacer la détention.
Dans un cas dans la région de Québec, peu de temps après l'introduction des dispositifs, un homme ayant des antécédents de violence conjugale a proposé de porter un bracelet pendant sa mise en liberté sous caution, mais un juge a refusé la demande. Le juge a statué que l'accusé avait des antécédents de violation des conditions de libération et l'a ordonné en détention provisoire, ajoutant qu'il n'appartenait pas à la victime de gérer le risque que l'accusé enfreigne les ordonnances du tribunal.
Les défenseurs des victimes veulent également savoir si la technologie peut être efficace dans les zones rurales, où la police patrouille souvent sur de vastes territoires et peut ne pas être en mesure de réagir rapidement.
«Le défi est que le Québec est un grand territoire et que la réception cellulaire et Internet n'est pas parfaite partout», rappelle Louise Riendeau. «Nous aimerions avoir plus d'informations sur l'utilisation de la technologie pour nous assurer qu'elle peut être efficace dans des endroits moins densément peuplés que la ville de Québec.»
Mme Riendeau signale que des groupes ont demandé une rencontre avec le ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, pour obtenir des détails sur la façon dont le bracelet est déployé.
Le déploiement généralisé du système de suivi est prévu en 2023, y compris à Montréal. Au total, environ 500 bracelets seront disponibles dans toute la province, et les autorités ont déclaré que le programme du Québec devrait coûter environ 41 millions $ sur cinq ans et que d'autres bracelets pourraient être ajoutés, s'il y a une demande.
Le programme de bracelets est l'une des 190 recommandations d'un rapport mandaté par le gouvernement de décembre 2020 pour lutter contre la violence sexuelle, une liste qui comprend la création de tribunaux spécialisés pour traiter les affaires de violence sexuelle et domestique. Pour l'instant, les bracelets ne sont utilisés que pour les suspects ou les délinquants purgeant une peine provinciale, car le projet est réalisé par le gouvernement du Québec.
«La décision d'adopter le bracelet pour les personnes condamnées à un peine fédérale relève de la responsabilité exclusive du gouvernement du Canada», rappelle Louise Quintin, porte-parole du ministère de la Sécurité publique du Québec, dans un courriel. «Toutefois, le Québec invite ses homologues fédéraux et provinciaux à emboîter le pas avec l'adoption d'une telle mesure et se fera un plaisir de leur faire bénéficier de son expertise, au besoin.»
À Ottawa, le projet de loi C-233, un projet de loi d'initiative parlementaire, modifierait le Code criminel pour obliger un juge à envisager des dispositifs de surveillance électronique avant de libérer des suspects impliqués dans des affaires de violence conjugale. Le sénateur conservateur du Québec Pierre-Hugues Boisvenu, défenseur de longue date des droits des victimes, a déposé un projet de loi S-205, qui obligerait une personne accusée de violence conjugale à porter un bracelet de repérage électronique dès sa libération sous caution.
Un porte-parole du Service correctionnel du Canada (SCC) confirme que l'agence utilise également des bracelets de suivi pour s'assurer que les suspects respectent les couvre-feux et autres conditions, mais il précise que la technologie n'est pas accompagnée d'une application pour les victimes.
«Le SCC continue de surveiller l'évolution du programme provincial de surveillance électronique ciblant la violence conjugale au Québec», ont indiqué les autorités fédérales dans un courriel.