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«C'est le premier Oscar dans l'histoire de l'Ukraine et j'en suis honoré», a déclaré dimanche soir Mstyslav Tchernov.
L'Ukraine s'est réveillée lundi toujours en guerre – des drones russes ont détruit des bâtiments dans les régions de Kharkiv et d'Odessa – mais aussi avec la nouvelle que le pays avait remporté son premier Oscar à Hollywood.
L'Oscar du meilleur long métrage documentaire décerné à 20 jours à Marioupol de Mstyslav Tchernov, récit poignant à la première personne du journaliste de l’Associated Press sur les premiers jours de l’invasion russe en 2022, constitue tout de même une victoire douce-amère pour les Ukrainiens.
«C'est le premier Oscar dans l'histoire de l'Ukraine et j'en suis honoré, a déclaré dimanche soir Mstyslav Tchernov, ému, lors de la cérémonie à Los Angeles. Je suis probablement le premier réalisateur sur cette scène à affirmer que j'aurais aimé ne jamais avoir fait ce film: plutôt que de recevoir cet Oscar, j'aurais préféré que la Russie n'attaque jamais l'Ukraine.»
Dans son Ukraine natale, lundi matin, on se réjouissait de la récompense remise à cette oeuvre qui a exposé au monde entier la dévastation brutale de cette guerre.
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a déclaré qu'il était reconnaissant envers l'équipe et a remercié les journalistes du monde entier qui couvrent toujours le conflit malgré une diminution de l'attention médiatique, alors que cette guerre entame sa troisième année et que l’attention du monde s’est tournée vers le Proche-Orient.
«Les horreurs de Marioupol ne doivent jamais être oubliées, a écrit le président sur les réseaux sociaux. Le monde entier doit voir et se souvenir de ce que l’invasion inhumaine russe a fait subir à notre peuple. Des villes et des villages ont été détruits, des maisons ont été incendiées et des familles entières ont été tuées par les obus russes et enterrées dans leur propre cour.»
L'équipe de l'Associated Press composée du journaliste Tchernov, du photojournaliste Evgeniy Maloletka et de la productrice Vasilisa Stepanenko était arrivée à Marioupol en février 2022 une heure avant que la Russie ne commence à bombarder la ville portuaire.
Deux semaines plus tard, ils étaient les derniers journalistes travaillant pour un média international dans la ville, envoyant des dépêches cruciales vers le monde extérieur qui montraient les victimes civiles de tous âges, les fosses communes creusées, le bombardement d'une maternité et l'ampleur des dévastations.
Le documentaire a été coproduit par l'agence de presse AP et l'émission d'affaires publiques Frontline du réseau de télévision publique américain PBS.
Un des personnages clés du film, le policier Volodymyr Nikouline, a aidé l'équipe à couvrir le sujet et finalement à s'échapper de Marioupol alors que les forces russes se rapprochaient de la ville.
«Ce film a montré que nous pouvons défendre notre pays, que nous sommes unis, a-t-il déclaré lundi à l’AP depuis Kyiv. Et en ce moment, si le monde voit notre lutte, les crimes que l'agresseur commet dans notre pays, comment il détruit nos villes, je crois que le monde soutiendra nos efforts, et ce sera décisif.»
Le responsable des droits de la personne en Ukraine, Dmytro Lubinets, a salué ce documentaire qui montre «la vérité au monde entier».
«Ce gala est l'occasion de s'adresser à des millions de personnes. C’est ce qu’a fait le réalisateur en évoquant l’occupation, les prisonniers de guerre, le meurtre d’Ukrainiens par la Russie et les enlèvements illégaux de civils», a-t-il écrit sur Telegram.
Cet Oscar, l'un des nombreux prix remportés par le documentaire, dont le Pulitzer, est décerné alors que les forces et les munitions ukrainiennes s'épuisent et que les troupes russes tentent de s'enfoncer plus profondément dans la partie occidentale de la région de Donetsk, tenue par l'Ukraine, et de pénétrer dans la région de Kharkiv, au nord.
Il s'agit du deuxième Oscar consécutif décerné à un documentaire qui a jeté une lumière crue sur la Russie de Vladimir Poutine. L’année dernière, Navalny, sur le leader de l’opposition russe Alexeï Navalny, décédé en février en prison, avait aussi remporté l'Oscar du meilleur long métrage documentaire.