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Technologie

Les entreprises québécoises accusent du retard face à l'implantation de l'IA

Une des raisons qui expliquent l’écart entre l’usage et les bienfaits reconnus est qu’en général, les entreprises ne savent pas à quoi l’IA peut servir.

/ La Presse canadienne

Malgré la position de leader du Québec en matière d’intelligence artificielle (IA), les entreprises québécoises traînent la patte pour l’intégrer dans leurs opérations, comparativement à celles des autres provinces et même, ne savent pas trop à quoi elle peut servir.

Une étude sur l’impact de l’IA dans l’entreprise réalisée par Aviseo pour le compte du Conseil du patronat du Québec, en collaboration avec Google, montre que les entreprises québécoises utilisent moins l’IA que celles d’ailleurs au Canada dans tous les domaines d’activité, sauf le marketing et les ventes et dans les processus de fabrication. Cependant, les entreprises d’ailleurs au Canada font une plus grande utilisation des outils d’IA, notamment dans les processus d’administration des affaires, la gestion des entreprises, la sécurité des technologies de l’information et la gestion des ressources humaines ou du recrutement, notamment. 

Augmenter la cadence

D'après le directeur de la division infonuagique chez Google, Marc Boyer, la position de leadership du Québec se situe d'abord dans la recherche fondamentale. Le lien avec la recherche appliquée, celle qui dessert l'industrie, doit être renforcé, reconnaît-il. «Certains acteurs essaient de faire ça au Québec, mais de rapprocher par exemple ce qui se fait au Mila (l'Institut québécois de l'intelligence artificielle) avec des projets sur le terrain, je pense qu'il faut qu'on augmente la cadence. Je ne dis pas que ça ne se fait pas. Ça se fait aujourd'hui, mais je pense qu'on peut faire encore plus.»

«En recherche appliquée, il faut qu'on soit capable, à mon avis, d'augmenter la vitesse avec laquelle on essaie des prototypes et qu'on décide finalement soit de les poursuivre ou les arrêter selon le degré de succès, mais il faut juste que ça aille plus vite.» 

À voir aussi : Les impacts de l'intelligence artificielle sur le marché du travail

Pourtant, les entreprises québécoises semblent bien au fait des avantages d’utiliser l’IA, particulièrement dans le secteur manufacturier où 83 % des entreprises sondées croient qu’elle contribue à augmenter la productivité et 79 % y voient un outil pour réduire les tâches à faible valeur ajoutée.

Méconnaissance généralisée

Une des raisons qui expliquent l’écart entre l’usage et les bienfaits reconnus est qu’en général, les entreprises ne savent pas à quoi l’IA peut servir. Ainsi, les trois quarts (73 %) des répondants n’ont pas réussi à identifier un besoin opérationnel qui justifierait l’implantation de l’IA. La méconnaissance de l’IA est telle que le tiers (34 %) des entreprises québécoises ayant adopté l’IA n’étaient pas au courant des types d’usage spécifique qu’elles en font.

Ce manque de connaissance n’est pas tellement difficile à expliquer alors que, dans le secteur manufacturier par exemple, les trois quarts des répondants ont identifié le manque de personnel qualifié et le manque de temps comme principaux freins à l’implantation de l’IA.

Gestionnaires: «Se donner les outils et le courage»

Marc Boyer avertit toutefois que la progression de l'IA en entreprise ne doit pas dépendre que d'experts, mais aussi des gestionnaires de l'entreprise. «D'avoir des gens d'affaires dans les entreprises qui comprennent au moins les bases fondamentales de qu'est-ce que c'est l'IA, ça je pense que c'est – je ne sais pas si on a une carence au Québec versus les autres provinces – mais je pense que c'est nécessaire que les gens demeurent curieux et informés pour qu'on soit capable de tirer notre épingle du jeu.» 

Il faut également, dit-il, que les décideurs d'affaires se détachent de cette image de l'IA qui a été propulsée à l'avant-scène par l'émergence de modèles comme ChatGPT, qui peuvent s'attaquer à des tâches en surface comme la rédaction pour se tourner vers des tâches plus complexes et spécialisées, comme par exemple la gestion et la compréhension de masses de données dont l'ampleur dépasse la capacité d'analyse de l'humain. «Il faut se donner les outils, puis le courage aussi d'essayer d'adresser des cas qui sont plus complexes que les cas dont on entend parler. Les compagnies qui ont plus de succès, qui ont plus de confiance, ce sont celles justement qui ont essayé de mettre l'IA dans le cœur de l'entreprise versus de le faire en surface.» 

L’étude comporte certaines limites que les auteurs reconnaissent, notamment le fait que l’on ne se soit penché que sur quatre secteurs économiques, soit les secteurs manufacturier, financier, du commerce de détail et de la logistique et le transport.

Réussites

Elle présente par ailleurs plusieurs exemples d’implantation avec les résultats obtenus. 

Dans le secteur manufacturier, par exemple, Ferme d’Hiver, une unité d’agriculture intérieure qui utilise notamment l’IA pour le contrôle climatique, a obtenu une réduction de 30 % de la consommation énergétique par tonne produite. Du côté financier et assurances, on rapporte que Beneva utilise l’IA pour la surveillance des fraudes, le traitement des réclamations et des factures et le triage des demandes de clients et l’analyse de données. L’assureur a ainsi réussi à améliorer la sécurité, la productivité et la prise de décision, le tout lui permettant d’atteindre une plus grande compétitivité.

Du côté commerce de détail, l’épicier Metro a réussi à augmenter ses ventes et à améliorer l’efficacité de ses opérations grâce à des systèmes de prédiction de la demande et d’optimisation des trajets des employés en entrepôt.

Enfin, le Port de Montréal a implanté un système d’identification des conteneurs humanitaires lui permettant de prioriser ces conteneurs et réduire le temps d’attente pour leur transit.