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«Ces droits de douane ont des conséquences importantes.»
Les droits de douane américains sur les produits canadiens représentent un risque important pour le secteur des serres, qui dépend fortement des exportations américaines et qui souffrirait si les importateurs achetaient moins en raison de la guerre commerciale.
«Ces droits de douane ont des conséquences importantes», a déclaré Richard Lee, directeur général d'Ontario Greenhouse Vegetable Growers. L'Ontario produit la majorité des légumes de serre au Canada.
Les trois jours pendant lesquels les droits de douane ont été appliqués au début du mois ont coûté plus de 6 millions $ au secteur des serres de l'Ontario, selon M. Lee.
Le président américain Donald Trump a instauré des droits de douane sur les importations canadiennes et mexicaines le 4 mars dernier. Deux jours plus tard, il a annoncé une suspension d'un mois pour les marchandises qui respectent les exigences en matière de règles d'origine de l'Accord Canada-États-Unis-Mexique.
Le secteur canadien des fruits et légumes est étroitement lié au marché américain, selon les Producteurs de fruits et légumes du Canada. Cependant, l'industrie des serres est particulièrement vulnérable en raison de sa dépendance aux exportations vers les États-Unis.
Les États-Unis sont de loin le principal marché d'exportation des légumes de serre canadiens, représentant 99,5 % des 1,7 milliard $ exportés en 2023, d'après Agriculture et Agroalimentaire Canada.
Les marchés agricoles américain et canadien se complètent, a expliqué M. Lee, surtout sur une base saisonnière. Par exemple, en hiver, le Canada importe beaucoup de laitue.
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Le secteur canadien des serres a connu une croissance rapide au cours des deux dernières décennies pour répondre à la demande, a précisé M. Lee, à tel point que «les produits (…) que nous cultivons ici, en Ontario, nourriront à eux seuls le Canada dix fois plus».
Les experts de l'industrie affirment que le Canada ne peut pas consommer tous les produits excédentaires qui pourraient être laissés en suspens en raison de la guerre commerciale.
Les serres canadiennes sont relativement limitées quant à leur capacité de production à grande échelle. Les cultures en serre les plus importantes sont de loin les tomates, les concombres et les poivrons, qui ont représenté plus de 92 % de la valeur financière des récoltes de légumes de serre en 2023. La laitue et les fraises occupent des surfaces beaucoup plus petites, mais en croissance, pour les entreprises de serre.
«Il nous est impossible d'absorber tout cela, a affirmé Dana McCauley, PDG du Réseau canadien d'innovation en alimentation. Combien de salades pouvons-nous manger ?»
Il y a des choses que nous ne pouvons tout simplement pas cultiver sous notre climat, même en serre, a ajouté M. Lee. Les installations ne peuvent pas non plus être construites n'importe où, car elles nécessitent certaines conditions pour réussir, a-t-il précisé.
Il est également plus facile à dire qu'à faire de diversifier les marchés d'exportation, car les légumes frais voyagent mal, a souligné Mme McCauley.
La variété des cultures en serre se diversifie, mais cela prend du temps. Certaines exploitations agricoles investissent dans la recherche pour élargir leurs cultures, allant même jusqu'à tester des fruits tropicaux, comme les papayes ou les bananes, a déclaré M. Lee.
«Elles investissent dans différentes technologies et espèrent que leurs investissements seront rentables à long terme en créant de nouveaux segments de marché ou de nouvelles denrées cultivables en serre», a-t-il mentionné.
Un rapport de RBC de 2024 a identifié les épinards, les bananes, le café, le gombo et certaines baies comme des débouchés clés pour le secteur des serres au Canada.
«Les goûts des Canadiens évoluent et se diversifient, et l'accès du Canada à des produits très consommés, comme les bananes et le café, pourrait devenir plus difficile au fil du temps, compte tenu des préoccupations liées aux changements climatiques, aux perturbations de la chaîne d'approvisionnement et aux changements géopolitiques», indique le rapport.
Le secteur est toutefois confronté à des défis d'infrastructure, notamment l'accès à l'énergie, à l'eau et à d'autres intrants essentiels.
Pour le secteur agricole vertical, relativement petit, mais en pleine croissance, qui tend à se concentrer sur le marché intérieur, la guerre commerciale pourrait ouvrir une fenêtre d'opportunité.
Lenny Louis, PDG de Vision Greens, une entreprise de Welland, en Ontario, a indiqué avoir constaté une «forte hausse» de la demande de la part des épiciers et des fournisseurs pour ses laitues et mélanges printaniers à la suite des droits de douane. Cela inclut les entreprises qui ne stockent pas déjà ses produits.
Les fermes verticales utilisent un modèle empilé pour cultiver davantage de cultures avec une empreinte plus petite, généralement sans lumière naturelle et souvent en hydroponie. Les serres sont plus encombrantes, car elles cultivent en pleine terre et utilisent la lumière du soleil, et produisent une plus grande variété de produits.
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«C'est très différent, car je pense que les fermes verticales se sont vraiment positionnées pour être perçues comme une option locale», a avancé Mme McCauley.
Les épiciers et les fournisseurs ont besoin d'un approvisionnement supplémentaire en produits canadiens en raison de la demande des clients, a ajouté M. Louis.
«Cela a certainement changé la mentalité des épiciers, qui souhaitent accélérer la mise en rayon des produits canadiens», a-t-il fait valoir.
Mme McCauley a cependant mentionné que les légumes verts souvent cultivés par les fermes verticales ont tendance à être un peu plus chers que les autres options en épicerie, mais que plus elles pourront se développer, mieux elles seront en mesure de baisser les prix.
Vision Greens a récemment levé 20 millions $ à un moment opportun pour étendre ses activités et prévoit tripler sa capacité, selon M. Louis.
«Évidemment, notre approvisionnement est limité, ce qui nous incite à accélérer notre expansion, a-t-il déclaré. Je pense que c'est là pour de bon, avec ou sans droits de douane.»