Début du contenu principal.
Au cours des derniers jours, plusieurs médias à travers le monde ont annoncé qu’ils changeraient leur façon de référer à la capitale ukrainienne. Connue en français sous le nom de Kiev depuis l’ère soviétique, le nom de la ville s’écrira donc Kyiv dans ces publications. Un changement en apparence anodin, mais d’une grande importance symbolique.
D’abord, s’ils réfèrent au même endroit, les mots Kiev et Kyiv sont des traductions phonétiques de deux mots différents, respectivement en russe et en ukrainien. Kiev est une relique de l’époque soviétique, alors que l’Ukraine était rattachée à l’URSS, dont la langue officielle était le russe.
À lire également:
Et si la question s’est imposée dans les médias francophones depuis l’invasion russe de l’Ukraine, le gouvernement ukrainien fait campagne depuis plusieurs années pour l’adoption du nom Kyiv soit généralisée.
C’est en 1995, quatre ans après l’indépendance du pays, que le gouvernement ukrainien a adopté officiellement l’appellation Kyiv (Київ, en cyrillique) via une «résolution officielle concernant l'usage des formes étrangères pour désigner la capitale».
En 2018, le ministère ukrainien des Affaires étrangères lance une campagne de publicité en ligne avec le mot-clic #KyivNotKiev, pour convaincre la communauté internationale d’adapter la forme ukrainienne. Plusieurs médias anglophones dont la BBC, The Guardian et Associated Press choisissent alors de faire le changement.
Ces exhortations trouvent toutefois peu d’échos auprès de la communauté internationale francophone, et l’usage de Kiev est resté prédominant en français jusqu’à l’éclatement du présent conflit russo-ukrainien.
🚫 Fini Kiev : @Libe écrira Kyiv. La raison politique s’impose. https://t.co/P1FJZ1K8Z7
— Libération (@libe) March 1, 2022
«Ça fait un moment que la différence est soulevée, mais dans un contexte de conflit armé comme maintenant, ça devient politiquement chargé, souligne Magdalena Dembińska, directrice académique du Centre d’études et de recherche internationale de l’Université de Montréal (CERIUM). Pour les Ukrainiens qui se battent pour la souveraineté de l’Ukraine, utiliser le nom de leur capitale à résonance russophone peut heurter certains esprits», dit-elle.
Généralement, les organisations qui choisissent de référer à la capitale par son nom ukrainien le font aussi pour d’autres villes du pays, comme Lviv (plutôt que Lvov) et Kharkiv (plutôt que Kharkov).
«Avec ce qui se passe maintenant, les gens sont peut-être plus sensibles à l’histoire coloniale de l’Union soviétique et à l’impact que ça a eu sur d’autres pays et d’autres langues», avance Richard Compton, professeur au département de linguistique de l’Université du Québec.
«C’est quelque chose qu’on peut faire par respect et solidarité pour un peuple qui est en train d’être envahi», souligne-t-il.
Au Québec, les publications de Quebecor, La Presse, Les Affaires et Noovo Info ont notamment adapté leurs pratiques en ce sens.