Début du contenu principal.
«Il faut aller au bout de la vérité. »
L'Église catholique française a officiellement demandé aux procureurs d'ouvrir une enquête sur l'abbé Pierre, un prêtre autrefois vénéré et une icône humanitaire décédé en 2007, à la suite de nouvelles révélations de violences sexuelles.
L'archevêque Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France (CEF), a annoncé cette décision lors d'une entrevue sur la radio RMC vendredi.
«Je considère qu'il faut aller au bout de la vérité. C'est pour ça que j'ai demandé, j'ai écrit un signalement au procureur de Paris pour lui demander à réfléchir à ouvrir une enquête sur l'abbé Pierre», a-t-il soutenu.
«De manière à ce qu'on puisse enquêter sur d'éventuelles d'autres victimes, des complices et des non-dénonciations. De manière à ce qu'on puisse avoir la vérité.»
Né Henri Grouès en 1912, l'abbé Pierre était un prêtre catholique français réputé pour son dévouement à l'aide aux pauvres et aux sans-abri.
En 1949, il a fondé le mouvement Emmaüs, une organisation internationale axée sur la lutte contre la pauvreté et l'itinérance.
Ses efforts humanitaires, notamment pendant le rude hiver de 1954, lui ont valu une admiration générale et il a souvent été considéré comme la conscience de la France.
Émergence des allégations
Les allégations contre l'abbé Pierre ont fait surface à titre posthume, ternissant considérablement son héritage des années après sa mort.
En juillet 2024, Emmaüs International et la Fondation Abbé Pierre ont publié un rapport détaillant les allégations de sept femmes, dont une mineure à l'époque, alléguant des agressions sexuelles et du harcèlement de la part de l'abbé Pierre entre la fin des années 1970 et 2005.
À la suite de ces premières révélations, un canal consacré aux victimes a mené à 17 allégations supplémentaires, avec des incidents qui se seraient produits entre les années 1950 et 2000 dans divers pays, dont la France, les États-Unis, le Maroc et la Suisse.
À la lumière des allégations, Éric de Moulins-Beaufort a officiellement demandé aux procureurs d’ouvrir une enquête sur l’abbé Pierre.
La conférence des évêques a également publié une déclaration vendredi soulignant la gravité des allégations et reconnaissant les manquements passés.
Elle a souligné la nécessité d’une action judiciaire pour découvrir toute l’étendue des abus et les silences systémiques qui ont pu leur permettre de persister.
Les allégations contre l’abbé Pierre représentent une évolution clé dans la prise en compte plus large en France des abus commis par le clergé.
En 2021, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église a rapporté qu’environ 330 000 enfants ont été agressés sexuellement sur une période de 70 ans par des membres du clergé ou des personnes affiliées à l’Église.
Le rapport a mis en évidence une dissimulation systémique par les responsables de l’Église et a appelé à des réformes importantes.
Réparations de l’Église pour les victimes d’abus
Pour remédier à des décennies d’abus, l’Église française a lancé en 2022 un programme de réparations, supervisé par l’Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (INIRR).
Le programme offre une compensation financière et un soutien psychologique aux victimes.
En mars 2023, plus de 1180 victimes s’étaient manifestées, dont 404 ont reçu le soutien de l’INIRR.
Environ 201 victimes avaient déjà obtenu des réparations financières ou autres, qui peuvent également inclure un soutien non financier comme l’organisation d’une médiation familiale ou l’installation de monuments commémoratifs pour les victimes.
Les montants des indemnisations vont jusqu’à 60 000 euros (environ 89 000 $CAN), la plupart des bénéficiaires signalant des crimes «très graves», notamment des viols ou des abus répétés au fil des ans.
Mais certains croient qu’une réforme systémique de l’Église est toujours nécessaire.