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À l’occasion d’un débat organisé par le Collectif 8 mars pour la Journée internationale des droits des femmes, des députées des quatre principaux partis représentés à l’Assemblée nationale ont échangé mardi sur cet enjeu.
Bien que l’ombre de l’imminent budget 2022 et celle des élections d’octobre prochain aient plané sur l’événement, le ton est resté amical, les politiciennes étant en accord sur une majorité des enjeux.
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«On le voit dans les métiers liés à l'État, c'est souvent les femmes qui sont infirmières, préposées aux bénéficiaires, éducatrices, qui gagnent moins historiquement», a affirmé Joëlle Boutin, de la Coalition avenir Québec. Elle a cité les récentes hausses de salaire dans les nouvelles conventions collectives des infirmières et des éducatrices, tout en reconnaissant qu'«on a encore du rattrapage à faire au niveau salarial». Une nouvelle stratégie sur l'égalité sera déposée cet été, a-t-elle annoncé, celle-ci touchant «l'emploi et la conciliation travail-famille».
«Je pense qu'il faut un rehaussement important, un rattrapage dans toutes les jobs du filet social, pas quelques-unes en cherry-picking», a fait valoir la coporte-parole solidaire Manon Massé, défendant son intention de hausser le salaire minimum à 18 $ l'heure.
Méganne Perry Mélançon, du Parti québécois, a pour sa part rappelé que le milieu communautaire du Québec estime qu'il lui manque 460 millions $ pour fonctionner adéquatement, et ainsi soutenir, mais aussi employer, des femmes. «J'espère qu'on ira jusque-là dans le prochain budget», a-t-elle dit.
Les mauvaises conditions de travail ont aussi été dénoncées par l'ensemble des participantes comme nuisant à la rétention des travailleuses, notamment le temps supplémentaire obligatoire chez les infirmières.
Mais pour pouvoir poursuivre une carrière, encore faut-il bénéficier de services de garde abordables, ont-elles aussi toutes défendu.
Au Parti libéral, «nous nous sommes engagés à en faire un droit», a rappelé Isabelle Melançon, plaidant que «chaque femme qui n'a pas de place en garderie devrait continuer à recevoir un montant important» pour pouvoir placer son enfant au privé et ainsi accéder au marché du travail.
Dans la mise à jour économique de l'automne dernier, Québec avait annoncé «un investissement de près de 200 millions $ pour la mise en œuvre d'un programme d'aide à la construction de logements abordables, qui représente une nouvelle vision» où «des promoteurs des secteurs communautaire et privé seront admissibles».
Cette approche a été vivement critiquée par les trois représentantes de l'opposition, qui considèrent que cet enjeu touche particulièrement les femmes, plus nombreuses à être monoparentales et à vivre dans la précarité.
«Le Québec est en deuil, a lancé Mme Massé. Nous avions un programme, un seul, qui était AccèsLogis, qui permettait de développer du logement social qui était au communautaire. Le gouvernement vient de l'ouvrir pour que le privé puisse avoir accès à des fonds publics.»
Si ce choix est «terrible» selon elle, il est aussi qualifié de «malheureux, dangereux» par Isabelle Melançon, qui craint de voir des dérapages.
La députée caquiste s'est de son côté décrite comme «une fervente partisane» de la collaboration avec le privé, «qui a plus de flexibilité, plus rapidement, parce que le programme actuel est lent et compliqué». «L'objectif ce n'est pas d'avoir moins de logements sociaux, c'est de trouver des voies pour accélérer la construction.»
Non seulement cela, mais «c'est vraiment une crise sociale qui se prépare pour le 1er juillet», a fait valoir la péquiste Méganne Perry Mélançon, alors que la crise du logement s'aggrave. Elle a demandé la fin de la clause F des baux, qui permet aux propriétaires de monter les loyers autant qu'ils le souhaitent dans les cinq premières années de location d'un nouveau logement.
Le terme qui était sur toutes les lèvres était «analyse différenciée selon les sexes intersectionnelle», ou ADS+, qui consiste à évaluer un projet de loi pour vérifier s'il aura des impacts néfastes sur des groupes marginalisés.
Cet outil commence à être implanté par le gouvernement, mais ce que les oppositions souhaitent à l'unanimité, c'est qu'il devienne obligatoire pour chaque nouvelle législation. La députée solidaire Ruba Ghazal a déjà déposé un projet de loi pour l'appliquer aux budgets, la semaine dernière.
«Je m'engage à dire au ministre des Finances qu'il faudrait mettre de l'ADS+ dans le budget», a répondu la représentante caquiste, pour qui cet outil est «essentiel».
Un autre cheval de bataille de l'opposition était le cas du Secrétariat à la Condition féminine, une organisation qui a une ministre, mais ni ministère et ni budget.
«La ministre responsable de la Condition féminine a beau faire son maximum, mais sa job, c'est de prendre son bâton de pèlerine, d'aller cogner à la porte de tous les ministres et de dire ''pourrais-tu s'il te plaît t'occuper de telle question''», a commenté Mme Massé.
Isabelle Melançon a ajouté que la représentation dans les prises de décision commence à l'Assemblée nationale elle-même, raison pour laquelle le Parti libéral a déposé en octobre un projet de loi pour que chaque parti présente au moins 40 % de candidates féminines, sous peine de perdre une partie de son budget.
«Je l'ai vu dans mon parti politique, à quel point les enjeux plus féminins ont vraiment pris de l'ampleur parce qu'on est autant de femmes que d'hommes», a opiné Mme Boutin.
Pour Mme Perry Mélançon, du Parti québécois, ce travail doit aussi se faire bien en amont avec l'éducation, pour que les Québécois aient «des relations égalitaires dès le jeune âge», et pour contrer l'hypersexualisation des jeunes filles et la déformation de leur image corporelle.