Début du contenu principal.
Ce service peut être utile pour des femmes qui ont dû sortir de leur pays où l’avortement n’est pas toléré — un service d'autant plus crucial compte tenu de la situation précaire en la matière aux États-Unis, où un projet d’avis de la Cour suprême pourrait annuler le jugement Roe c. Wade de 1973, qui avait légalisé l’avortement dans tous les États.
«Il y différentes raisons qui peuvent amener une femme à devoir sortir de son pays pour avoir un avortement, ne serait-ce parfois pour la raison de l’intimité ou du secret même», a expliqué la directrice générale du Centre de santé pour les femmes de Montréal, Marie-Amélie St-Pierre, auprès de Noovo Info.
À lire également:
L’organisme communautaire accepte les femmes qui ne sont pas couvertes par aucun régime d’assurance en offrant un prix réduit et même la gratuité, selon les besoins.
«On ne peut pas prévoir le flux migratoire des femmes américaines. Il y a près de 50% des États où l’avortement va demeurer accessible. Dans un premier temps, on verra un flux migratoire de ces femmes vers ces États. Par la suite, ça pourrait remonter jusqu’au Canada», a-t-elle ajouté en entrevue.
L’état psychologique d’une femme qui souhaite faire recours à un avortement est difficile à cibler, mais il s’agit certainement d’une étape difficile.
«Il n’y a pas un état psychologique, il y en a plusieurs, mais ça demeure une étape dans la vie d’une femme qui est éprouvante, importante et qui demande justement qu’on l’accueille avec toute l’empathie de notre côté», a soutenu Mme St-Pierre.
Les services de l’organisme sont d’ailleurs offerts par des femmes afin de créer un safe space.
Certaines cliniques d’avortement vont demander à la femme de revenir à quelques reprises afin de s’assurer que celles-ci soient certaines de leur décision. Au Centre de santé des femmes de Montréal, les femmes ne viennent qu’une seule fois.
«On ne remet pas en doute son choix. Nous, ici, on s’assure que tout peut se faire en une seule visite», a expliqué la directrice générale.
Le potentiel revirement du jugement historique Roe c. Wade aurait des effets néfastes pour les femmes qui sont déjà en situation de précarité.
«Le droit de toutes les femmes est remis en question. Je crois que ça nous touche encore plus parce que les États-Unis sont un voisin très proche», a précisé Mme St-Pierre.
Les femmes résidant dans les États plus conservateurs sur la question de l’avortement, notamment au Texas où elles ont peu de ressources, seraient davantage désavantagées.
«Ça va remettre la femme qui est déjà dans une situation précaire dans une situation encore plus précaire. Soit elle va se retourner vers des avortements d’un moyen artisanal où elle a le risque de mettre sa vie en danger ou elle va poursuivre une grossesse qui est non désirée», a-t-elle expliqué.
À VOIR | Voyez le reportage en entier du journaliste Emmanuel Leroux-Nega ci-dessous:
«Le droit à l’avortement au Canada pourrait, constitutionnellement parlant, être abrogé de nouveau. Le droit de l’avortement a été conféré aux femmes en 1988 par l'arrêt Morgentaler, protégé disait la Cour suprême par l’article 7 de la Charte canadienne, soit le droit de la vie, la sécurité et la liberté de la personne», a analysé l'avocat et enseignant à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, Frédéric Bérard.
Pour l’instant, le droit à l’avortement n’est pas en péril au Canada comme il l’est chez nos voisins du Sud.
«Est-ce que la Cour suprême renverserait ce qu’elle a fait dans le temps? J’en doute très fortement. Par contre, compte tenu de la dérogatoire, on n’a pas besoin des tribunaux pour interdire l’avortement. Il suffirait d'avoir un gouvernement conservateur qui utiliserait cette même dérogatoire puis interdirait le droit à l'avortement», a indiqué Me Bérard.
Cependant, la défense de ce droit n’empêche pas un manque d’accessibilité dans certaines régions du Québec.
«Statistiquement, plus les femmes ont accès à l’avortement le moins elles bénéficient de l’avortement. C’est un élément important à soulever. Ce n’est pas parce qu’on a le droit qu’on a l’accès à l’avortement», a souligné la directrice générale.
À Montréal, plusieurs cliniques privées et publiques offrent ce service, mais ce n’est pas la réalité de tous.
«On n’est pas obligé de se rendre tellement loin. Juste dans la Ville de Québec, le seul moyen que les femmes ont de se faire avorter c’est via le CLSC. Déjà, ça rend l’accessibilité un peu plus difficile», a rapporté Mme St-Pierre.
En région, il est possible qu’une femme doive parcourir plusieurs centaines de kilomètres avant de trouver une clinique qui offre l’avortement.
Voyez l'entrevue complète de Marie-Amélie St-Pierre avec notre journaliste Emmanuel Leroux-Nega.