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Parce qu’elle craint les représailles des contribuables, elle a demandé de conserver son anonymat. Il faut dire qu’elle a dû porter plainte à la police à trois reprises pour voies de fait, dont deux armés. Effectivement, deux automobilistes ont tenté de la frapper avec leur voiture et une autre lui a serré le bras si fort que cela a laissé des traces. «Les messieurs, on dirait qu’ils veulent tous m’écraser», a-t-elle déploré.
Ne manquez pas la chronique de Geneviève Pettersen sur la réalité des agents de stationnement. En voici un extrait: «on consacre désormais une journée complète de formation sur la discussion et la façon de négocier avec une clientèle difficile. Une journée complète sur les cinq jours que dure la formation pour devenir agent de stationnement: ça vous donne une idée de l’ampleur du problème. Mais qu’est-ce qu’est censé faire un agent, justement, quand les tactiques apprises pendant sa formation ne fonctionnent pas et qu’il craint pour sa sécurité?»
Nous avons donc pris place du côté passager et avons constaté à quel point les gens peuvent être agressifs.
Suzanne arrête à côté d’un VUS afin d’y poser un billet d’infraction. Elle se dit désolée, car il s’agit possiblement une mère qui est allée porter en vitesse son enfant à la garderie d’en face. Mais pour Suzanne, il y a peu de passe-droits. Il s’agit de son secteur et elle doit s’assurer de la fluidité de la circulation, car c’est son devoir explique-t-elle.
Chaque jour, elle se fait insulter et reçoit en moyenne deux à trois menaces de mort par mois de conducteurs mécontent de recevoir un billet d’infraction. «On a beau leur expliquer que dès j’ai pesé sur enter et que le ticket est en train de s’imprimer, il est trop tard. On n’a pas de pouvoir comme les policiers ont», a-t-elle expliqué.
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Après 30 minutes dans la voiture, Suzanne me demande si je veux sortir aller donner une contravention de l’autre côté de la rue. J’acquiesce et je sors avec mon iPhone pour filmer et mon caméraman me suit. Quelques instants plus tard, on entend des hommes crier. Ce sont des travailleurs de la construction qui sont sur une toiture en face. Ils s’en prennent à Suzanne en hurlant.
Parce que le chantier est situé à cet endroit, ils prétendent avoir l’autorisation de s’y stationner. Suzanne tient son bout et explique la règlementation. «La Ville de Montréal ne donne pas de permis pour les véhicules de promenade», répond-elle.
L’un des fiers-à-bras réplique dans un langage ordurier: «Je ne suis pas en train de me promener, je travaille moi. Va mettre le ticket dans mon windshield pis fais ta job d’assistée sociale, connasse!»
Suzanne explique que c’est comme ça chaque jour et que c’est pire depuis un an avec le coût de la vie. «En plus, les prix des contraventions ont augmenté», laisse-t-elle tomber.
L’Agence de mobilité durable de Montréal recense en moyenne chaque année une vingtaine de cas d’agressions contre ses agents de stationnement, mais son directeur voudrait que ceux-ci dénoncent davantage. En effet, plusieurs agents encaissent les frasques des contribuables à l’instar de Suzanne, qui ne va pas à la police chaque fois qu’un conducteur dit vouloir la tuer. Le directeur de la surveillance, Sylvain Sauvageau, interpelle les Montréalais.
«On a malheureusement eu au cours des dernières années une agression avec un bâton. Les agents de stationnement sont sur le territoire pour effectuer leur travail pour assurer la mobilité et la sécurité des gens», a-t-il lancé.
De son côté, Suzanne dit avoir du caractère. «Mais j’ai mes limites quand même» a-t-elle conclu.
Voyez le reportage de Véronique Dubé dans la vidéo.