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Cette comparution met en lumière le trafic présumé de personnes via ce territoire mohawk qui chevauche la Montérégie, l'Ontario et l'État de New York.
Les procureurs fédéraux aux États-Unis affirment qu'un ressortissant indien vivant au Canada a été payé des milliers de dollars pour faire passer d'autres Indiens aux États-Unis via la réserve mohawk d'Akwesasne.
Simranjit (Shally) Singh, 40 ans, a comparu vendredi dernier à Albany, dans l'État de New York, un jour après son extradition du Canada. Il a formellement été accusé de six chefs de trafic d'étrangers à des fins lucratives et de trois chefs de complot pour trafic d'étrangers à des fins lucratives. Il devrait comparaître à nouveau vendredi à Albany.
Cette affaire n'est pas liée à la mort, la semaine dernière, de huit personnes, dont quatre ressortissants indiens, qui tentaient de gagner illégalement les États-Unis en traversant le fleuve Saint-Laurent depuis Akwesasne.
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Mais cette comparution met en lumière le trafic présumé de personnes via ce territoire mohawk qui chevauche la Montérégie, l'Ontario et l'État de New York.
La Police d'Akwesasne indiquait la semaine dernière que depuis janvier, elle avait effectué 48 interceptions impliquant 80 personnes qui essayaient d'entrer illégalement aux États-Unis – surtout des ressortissants de l'Inde et de la Roumanie.
Une déclaration du bureau du procureur américain pour le district nord de l'État de New York indique que les accusations contre Simranjit Singh découlent de «son implication dans le trafic de ressortissants indiens du Canada vers les États-Unis, via l'île de Cornwall et la réserve mohawk d'Akwesasne (...) entre mars 2020 et mars 2021, au moins».
Les procureurs américains avaient annoncé les accusations contre lui en juin 2022, alléguant qu'au cours de trois voyages distincts, Singh avait fait passer six personnes du Canada aux États-Unis.
Simranjit Singh, qui vivait à Brampton, en Ontario, est accusé d'être un «courtier» payé par des migrants pour organiser leur périple à travers la frontière, selon des documents judiciaires déposés en Ontario dans le dossier d'extradition.
La Cour supérieure de l'Ontario a refusé le 10 août la libération sous caution de M. Singh. Le juge James Stribopoulos déclarait alors que l'accusé aurait transporté des migrants jusqu'à Cornwall, une municipalité ontarienne voisine d'Akwesasne. De là, «il les a présentés à des "transporteurs", qu'il a recrutés et payés, et qui, à leur tour, les ont fait passer en contrebande à travers le fleuve Saint-Laurent jusqu'aux États-Unis», écrivait le juge.
Dans ce jugement, on cite un migrant arrêté par les autorités américaines qui dit avoir payé 35 000 $ à Singh pour le faire passer aux États-Unis. Les autorités américaines ont déclaré au tribunal que d'autres avaient payé jusqu'à 14 000 $.
Un migrant qui a été arrêté par les autorités américaines et qui a identifié Singh à partir d'une photographie «a rapporté que sa famille en Inde avait payé M. Singh pour le faire passer clandestinement aux États-Unis», indique le juge Stribopoulos. «Au cours de leur trajet vers Cornwall, M. Singh lui a dit qu'il n'avait aucune raison de s'inquiéter et s'est vanté d'avoir fait passer aux États-Unis "plus de 1000" personnes.»
«Les documents déposés suggèrent que M. Singh a dirigé un stratagème pour faire passer clandestinement des migrants illégaux aux États-Unis pendant plus de deux ans», écrit le juge Stribopoulos. «Et il a persisté à le faire même après l'arrestation de certains de ses subordonnés dans le cadre du stratagème.»
«De plus, compte tenu des informations concernant ce qu'il facture aux migrants illégaux et ce qu'il paie aux transporteurs, M. Singh semble avoir gagné des sommes d'argent substantielles grâce à cette entreprise illégale.» Le jugement indique qu'un transporteur qui a témoigné dans le cadre de l'enquête a déclaré que Singh lui avait versé entre 2000 et 3000 $ pour chaque migrant qu'il faisait traverser.
M. Singh vivait au Canada depuis décembre 2010, mais il faisait l'objet d'une mesure de renvoi, après le rejet de sa demande d'asile en 2011.
Akwesasne est connu pour être un point de transit pour le trafic d'êtres humains et la contrebande, en raison de sa localisation stratégique, et la police y avait signalé en février une augmentation du trafic d'êtres humains sur le territoire.
La semaine dernière, des dirigeants mohawks ont déploré la façon dont leur communauté est souvent exploitée par des réseaux de trafic de personnes, après que les corps de huit migrants, dont deux enfants, ont été retirés du fleuve Saint-Laurent.
Le chef de la police mohawk d'Akwesasne, Shawn Dulude, a déclaré aux journalistes que les réseaux criminels exploitent souvent les jeunes de la communauté qui cherchent à faire de l'argent facilement.
Ces réseaux, a déclaré M. Dulude, savent qu'ils peuvent «trouver des gens dans notre communauté qui sont, dans une certaine mesure, exploités en raison de leur connaissance du fleuve et de la configuration du terrain».
La police mohawk a confirmé mardi qu'un homme d'Akwesasne, toujours porté disparu, est bel et bien lié à la découverte des huit corps repêchés dans le fleuve jeudi et vendredi derniers. Un petit bateau appartenant à Casey Oakes, 30 ans, a été localisé à côté des corps des migrants. Il a été vu pour la dernière fois aux commandes du bateau le soir du 29 mars et il a été porté disparu le lendemain.
La police d'Akwesasne a déclaré mercredi qu'elle poursuivait ses recherches avec l'aide d'autres forces policières, dont la Gendarmerie royale du Canada. «Une partie essentielle de cette enquête consiste à déterminer si oui ou non ce voyage a été facilité par un ou plusieurs individus» a précisé la police mohawk dans un communiqué.