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Denis Marsolais a témoigné vendredi des premières semaines de la crise qui a suivi le déploiement de la nouvelle interface en février 2023.
L'ex-président-directeur général de la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) a vu sa confiance «s'effriter sérieusement» à l'égard de son patron informatique, à la suite du lancement raté de la plateforme SAAQclic, mais sans être prêt à le congédier.
Denis Marsolais a témoigné vendredi des premières semaines de la crise qui a suivi le déploiement catastrophique de la nouvelle interface en février 2023. C'est lui qui s'est retrouvé à l'avant-scène «pour défendre son organisation» dans les médias.
Il se fie alors aux paroles de son vice-président aux technologies de l'information (TI), Karl Malenfant. M. Marsolais a donné l'exemple d'une entrevue à la radio avec l'animateur Paul Arcand dans les débuts de la crise.
«Je lui ai dit: ‘‘rassurez-vous M. Arcand, on me dit que les problèmes (avec) le logiciel vont être résorbés d'ici deux à trois mois’’.»
«Encore là, je ne l'invente pas. Ce n'est pas moi qui suis l'expert. On m'a affirmé que d'ici trois mois les problèmes vont être réglés», a indiqué M. Marsolais à la commission Gallant.
«Qui vous affirme ça?», a demandé le commissaire Denis Gallant. M. Malenfant, a répondu l'ex-PDG.
«M. Malenfant, il vous vante la septième merveille du monde et vous vous retrouvez avec une patente qui ne fonctionne pas», a imagé le commissaire.
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Avait-il encore confiance en son v.p. aux TI, alors que d'interminables files d'attente devant les succursales sont observées et que les gens n'adhèrent pas à la plateforme, a enchaîné M. Gallant.
«Là, ça commence à s'effriter sérieusement», a reconnu M. Marsolais. Pourtant, dans les semaines et jours précédant le lancement de SAAQclic, il se disait confiant vis-à-vis le projet, malgré certaines mises en garde.
«Tout le monde était, non seulement confiant, mais était d'accord pour le déployer et qu'on était prêt pour le déploiement. Alors, moi, je me suis fié aux experts autour de la table», a-t-il relaté.
M. Marsolais a laissé entendre s'être senti finalement trahi par M. Malenfant.
«Dans toute ma carrière, j'ai toujours eu dans ma garde rapprochée des sous-ministres associés, des vice-présidents. J'ai toujours fait confiance à ces gens-là. Ils ont toujours été loyaux envers moi. Ils n'ont jamais trahi ma confiance.
«Aujourd'hui, je suis obligé de vous dire que la règle qu'il y a une exception à la règle, je pense que je l'ai vécue», a-t-il déclaré.
M. Marsolais a eu l'impression que M. Malenfant ne lui a pas donné «toute l'information au bon moment». «J'ai de plus en plus de certitude qu'on ne m'a pas tout dit», a-t-il affirmé, ajoutant qu'il aurait «dû être plus vigilant».
Le dirigeant a révélé qu'une personne lui avait proposé de limoger son patron informatique en mars 2023. Il a jugé que remplacer M. Malenfant au milieu d'un cafouillage aurait été «encore plus dramatique».
«Je lui ai dit que M. Malenfant prend théoriquement sa retraite en décembre. (...) J'ai dit: ‘‘donnez-moi jusqu'au mois de juin. Au mois de juin, il prendra sa retraite anticipée et c'est tout’’», a expliqué M. Marsolais.
C'est plutôt M. Marsolais qui partira en premier, alors qu'il se fait montrer la porte quelques semaines plus tard, en avril. Il est aujourd'hui président de l'Office de la protection du consommateur.
La fin du témoignage de M. Marsolais vendredi a conclu la huitième semaine des audiences de la commission Gallant, qui vise à faire la lumière sur les déboires de la transformation numérique de la SAAQ.
Les travaux publics sont suspendus jusqu'au 18 août pour une pause estivale. D'ici là, l'équipe de la commission poursuivra son enquête. Des dizaines de milliers de documents doivent être étudiés.
Jusqu'à maintenant plus de 300 pièces ont été déposées et 45 témoins ont été entendus durant les audiences publiques. «Un constat s'impose déjà: l'enveloppe budgétaire globale du projet a pris des proportions incommensurables», a souligné le procureur en chef de la commission, Simon Tremblay.
Le virage numérique raté de la SAAQ devrait coûter aux contribuables au moins 1,1 milliard $, soit 500 millions $ de plus que prévu, selon les calculs du Vérificateur général du Québec.
L'un des prochains volets sur lesquels la commission devrait se pencher est «qui savait quoi». «On a eu un avant-goût cette semaine. C'est le début de cette partie», a indiqué Me Tremblay.
Il reste encore plusieurs acteurs clés à interroger, dont l'ancienne PDG Nathalie Tremblay et l'actuel en poste, Éric Ducharme, ainsi que M. Malenfant, dont le nom revient constamment depuis le début des témoignages. Ce dernier a d'ailleurs transmis cette semaine une demande pour obtenir un statut de participant, ce qui pourrait lui permettre de contre-interroger des témoins. Sa demande est actuellement à l'étude.
Les ministres caquistes François Bonnardel et Geneviève Guilbeault n'ont pas non plus été entendus jusqu'à présent. La commission devra les entendre avant la reprise des travaux à l'Assemblée nationale à la mi-septembre.
Le gouvernement Legault a octroyé une prolongation de deux mois et demi à la commission Gallant pour terminer son mandat. Le commissaire doit remettre son rapport au plus tard le 15 décembre, selon le nouvel échéancier.