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Une tendance virale sur TikTok montrant des femmes qui portent des chandails amples par-dessus leurs tenues pour éviter le harcèlement suscite des réactions mitigées.
Une tendance virale sur TikTok montrant des femmes qui portent des chandails amples par-dessus leurs tenues pour éviter le harcèlement suscite des réactions mitigées.
Ce texte est une traduction d'un article de CTV News
Les vidéos diffusés sur les réseaux sociaux ont généré 14,5 millions de vues, avec le terme «chemises de métro». Dans les séquences, les femmes expliquent qu’elles peuvent retirer leurs vêtements plus amples une fois qu’elles sortent du métro.
«Je pense que la plupart des femmes le font si elles n’ont pas d’autres options. Souvent, je porte une veste ou un manteau avec moi pour me couvrir afin de ne pas attirer d’attention indésirable. Même les regards des autres passagers masculins me mettent mal à l’aise, et c’est très courant», a déclaré Asmita Ghosh lors d’une entrevue.
Après avoir été harcelée à deux reprises dans le métro, Mme Ghosh préfère utiliser des Uber lorsqu’elle sort la nuit plutôt que les transports en commun.
«Utiliser les transports en commun du matin jusqu’en début de soirée est généralement assez sûr pour moi, mais pas en fin de soirée, surtout après 23 heures. Je pense que, en tant que femme, les problèmes de sécurité augmentent après 23 heures ou tard dans la plupart des stations de métro», a-t-elle ajouté.
Victoria Monti a remarqué que les sifflements étaient beaucoup plus fréquents quand elle était mineure et portait son uniforme scolaire. Cependant, elle continue de porter une veste pour se couvrir afin d’être plus prudente.
«Je pense que c’est nécessaire, surtout la nuit, si vous prenez le métro ou le bus et que vous portez quelque chose de plus révélateur. C'est fou que nous devions faire cela, mais il est important que les filles se protègent», a déclaré Mme Monti.
Une autre utilisatrice des transports en commun regrette de ne pas avoir eu sa «chemise de métro» à portée de main après une sortie nocturne.
«Je suis allée à une soirée sous la thématique latex le mois dernier et c’était quelque chose qui aurait presque pu m’empêcher d’y aller. J’avais une chemise boutonnée surdimensionnée à manches longues, mais mes collants en résille (fish nets) étaient toujours visibles. J’y suis allée en Bixi et je me sentais bien, mais prendre le métro pour rentrer à la maison a été très inconfortable. La prochaine fois, je porterai des pantalons d’escalade et des hauts pour vraiment me couvrir afin de paraître aussi normale que possible», a déclaré Maya Okindo.
Selon l'auteure féministe Leora Tanenbaum, jusqu'à 99 % des femmes ont déjà été victimes de harcèlement de rue et de harcèlement sexuel en public | Crédit image Jessica Barile/CTV News
Le débat sur le fait de savoir si cette tendance met la responsabilité sur la mauvaise personne est sujet de discussion.
«Cette tendance est positive à court terme, à mon avis, mais finalement, elle est assez négative. Si on regarde le contexte plus large, c’est positif dans le sens où cela fait sentir à la personne qui porte la chemise qu’elle est en sécurité, mais c’est négatif, car, en réalité, elle n’est pas réellement protégée», a déclaré Leora Tanenbaum, auteure de I Am Not a Slut: Slut-Shaming in the Age of the Internet.
Mme Tanenbaum explique que nous sommes encore très loin de vivre dans un monde où les femmes ne se sentent plus obligées de se couvrir pour se sentir en sécurité. Après avoir étudié le slut-shaming et les codes vestimentaires au cours des dernières décennies et avoir parlé avec plus de 1000 filles et jeunes femmes, elle conclut que le fil conducteur commun est qu’elles s’attendent à être touchées de manière non consentie ou harcelées à un moment donné de leur vie.
«Malheureusement - et de manière inquiétante - je pense que cette tendance de la chemise de métro sera présente pendant longtemps, très longtemps», soutient-elle.
Florence Olivia Jenesse, candidate au doctorat en droit et chercheuse spécialisée dans la violence sexuelle et le droit sur le viol à l’Université de Durham, affirme que jusqu’à 99 % des femmes ont déjà été victimes de harcèlement de rue et de harcèlement sexuel en public.
«Ce chiffre ne diminue pas avec les années ; il ne fait qu’augmenter et cela se produit partout dans le monde. Ce n’est pas seulement à Montréal, au Québec ou au Canada. Le même pourcentage entre 97 % et 99 % des femmes sont harcelées au moins une fois dans leur vie, voire plusieurs fois», affirme l’autrice.
Andrea Gunraj, vice-présidente de l’engagement à la Fondation des femmes du Canada, affirme qu’il existe peu de preuves suggérant que la méthode TikTok est efficace et s’inquiète du fait qu’elle pourrait être perçue comme une culpabilisation des victimes.
«Peu importe ce que vous portez, peu importe ce que vous faites, peu importe qui vous êtes, c’est simplement que vous êtes ciblée en raison de la vulnérabilité dans laquelle cette société vous place», a-t-elle souligné.
Mme Gunraj affirme que les femmes ne devraient pas être jugées pour leurs «chemises de métro» ou toute autre mesure qui les fait se sentir plus en sécurité.
«Vous faites ce qui vous semble le mieux pour vous, mais ce n’est pas là que réside la solution et nous avons tous une responsabilité.»
À Montréal, la STM (Société de transport de Montréal) essaie de s’assurer que les femmes n’auront pas besoin de se sentir obligées de se couvrir pour leurs trajets. Une campagne collaborative intitulée «Témoins, agissez», créée par la STM, la police de Montréal (SPVM) et la Ville de Montréal, a été lancée en juin. Elle met l’accent sur la nécessité d’agir si l’on voit ou subit du harcèlement.
L’origine de cette campagne est de sensibiliser aux mesures à prendre pour rendre les transports en commun plus sûrs pour tous.
«Nous croyons qu’il est essentiel que les clients se sentent en sécurité lorsqu’ils utilisent le métro ou le réseau d’autobus. Et nous savons que le harcèlement de rue peut être un obstacle à l’utilisation des transports en commun», a dit un porte-parole du métro.
«Notre objectif dans la lutte contre ce problème est de rendre notre service accessible et attrayant pour tous.»
La STM encourage les usagers des transports en commun à être proactifs s’ils sont témoins de harcèlement ou s’ils en sont victimes lors de leurs trajets, en demandant de l’aide sur place avec leur personnel en utilisant les interphones dans les voitures du métro pour appeler à l’aide et en signalant un incident dès qu’il se produit. La STM rappelle aux passagers que des caméras sont à bord et que plus tôt un incident est signalé, plus rapidement ils peuvent intervenir.
Bien que ni la SPVM ni la STM n’aient entendu parler de «chemises de métro», le problème sous-jacent de protection contre les prédateurs n’est pas nouveau ni pris à la légère.
«Le fait que les femmes se sentent obligées de changer leurs habitudes vestimentaires pour éviter d’être la cible de harcèlement de rue montre que ce phénomène ne doit pas être banalisé», a mentionné le SPVM dans une déclaration à CTV News.