Début du contenu principal.
En pleine négociation avec Québec pour les médecins omnipraticiens, la FMOQ tient à faire connaître «un bon portrait de la situation».
Une majorité de médecins omnipraticiens du Québec affirme ne pas se reconnaître dans le portrait de leur profession dépeint sur la place publique.
Que ce soit à propos du temps consacré à leur travail, de leur salaire ou de leur disponibilité à rencontrer les patients, ils estiment que les propos rapportés «ne collent pas» à leur réalité. Pour remédier à la situation, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) a mandaté une équipe afin qu'elle dresse «un bon portrait de la situation».
«Nous espérons qu'à la lumière des chiffres compilés par les experts économiques de la FMOQ, les discussions pourront maintenant porter sur de véritables solutions à la pénurie de médecins de famille et que nous pourrons améliorer l'accès à l'ensemble de la population», a affirmé d'entrée de jeu dans un communiqué le président de la FMOQ, le Dr Marc-André Amyot.
Voyez le reportage de Jean-François Poudrier dans la vidéo ci-haut.
La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec tient à souligner que la pratique de la médecine de famille au Québec «est unique». «Nulle part ailleurs au pays les médecins de famille ne travaillent autant en milieu hospitalier. Au Québec, les omnipraticiens portent bien leur nom, ils œuvrent à tous les niveaux et la majorité a une pratique mixte», précise l'organisation jugeant qu'il s'agit d'une donnée importante lorsqu'on souhaite comparer le Québec à d'autres provinces.
La FMOQ affirme que les médecins omnipraticiens du Québec offrent 15 millions de rendez-vous en clinique annuellement, et ce, en plus d'offrir des soins à l'hôpital : par exemple, en province, 6000 médecins de famille travaillent en établissement, 1500 en CHSDL, 2000 offrent des soins de fin de vie et 1100 font des visites à domicile.
«Pour poser le bon diagnostic, on doit donc obligatoirement compiler tout le travail fait et ne pas seulement regarder les rendez-vous en cabinet», est d'avis la FMOQ.
À voir aussi: Couverture cellulaire déficiente à Shawinigan: un médecin en a assez
La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec déplore par ailleurs «les failles» dans les données fréquemment utilisées sur la place publique alors que ces données, issues de l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS) et reprises notamment par le gouvernement du Québec et l'Organisation mondiale de la santé (OMS), comporteraient «des erreurs».
«Seulement au niveau de l'évaluation du nombre de médecins de famille en pratique au Québec, les données de l'ICIS surévaluent le nombre de médecins de famille de 1382», rapporte la FMOQ.
«Autre exemple, leur modèle est basé sur des journées de sept ou huit heures, alors que nos médecins ont bien souvent des journées de 10 à 12 heures de travail. Leurs statistiques ne prennent pas en compte les horaires atypiques et le volume de gardes — au Québec, c'est plus d'un demi-million de gardes sur appel qui ne sont pas prises en considération», précise l'organisation.
La FMOQ affirme avoir communiqué avec l'ICIS et qu'ils ont reconnu «les faiblesses de la base de données». Un travail serait en cours afin d'apporter des correctifs.
Selon les données de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, il y a actuellement, en 2024, 9887 médecins de famille en pratique au Québec.
Environ 22% des médecins de famille sont âgés de 60 ans et plus.
Le Québec fait face, toujours en 2024, à une pénurie de plus de 1500 médecins de famille.
«En moyenne, les médecins de famille travaillent 223 jours RAMQ par an, c'est plus que la moyenne de 220 jours des autres professionnels au Québec. À ces 223 jours, il faut ajouter 25% de travail administratif et 50 heures annuellement de formation continue. 3093 médecins facturent moins de 175 jours à la RAMQ annuellement ce qui regroupe, notamment, les médecins qui débutent leur pratique, des médecins en invalidité, des médecins en congé de maternité, des médecins dépanneurs et des médecins qui pratiquent majoritairement à l'urgence — dont le code de pratique limite leur nombre de jours de travail en raison de l'intensité de la tâche et des risques liés à l'épuisement», précise la FMOQ.
Toujours selon les données recueillies par la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, le salaire moyen réel brut de ses membres est de 330 313$, soit «sous la moyenne canadienne et sous la moyenne de l'Ontario».
À voir aussi : Urgences de la Côte-Nord fermées: du jamais-vu selon des médecins, qui craignent le pire
En partageant les résultats des travaux de son équipe économique, la FMOQ souhaite permettre à tous ceux qui sont appelés à s'exprimer sur l'avenir de la médecine de famille et l'accès aux soins de santé, d'avoir accès à un portrait «vérifié et validé».
«Maintenant que la démonstration est faite que les médecins de famille au Québec se dédient à soigner les Québécoises et Québécois, et ce, tant en cabinet qu'en milieu hospitalier, la FMOQ appelle ses interlocuteurs, s'ils souhaitent sincèrement améliorer les services de santé, à corriger leur discours, utiliser des données fiables et cesser de dévaloriser les spécialistes de la médecine de famille», a conclu le Dr Marc-André Amyot.
La FMOQ est actuellement en négociation avec le gouvernement du Québec pour le renouvellement de leur convention collective.
L'organisation a reçu une première offre du gouvernement du Québec à la fin août qui contenait surtout des «chantiers de travail» pour améliorer l'accès aux médecins de famille. L'offre ne touchait pas encore à la question de la rémunération.
Par ailleurs, en juin dernier, une entente a finalement été conclue entre Québec et les médecins de famille à propos du guichet d'accès à la première ligne (GAP).
Les médecins de famille ontariens viennent d'obtenir par arbitrage une hausse de leur traitement de 10 % pour la première année de leur contrat, alors qu'au Québec, la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, a laissé entendre récemment que l'enveloppe de 3 milliards $ réservée aux omnipraticiens devait être optimisée avant de penser à la bonifier.
À 330 313 $ par an en moyenne, «c'est clair» que les médecins d'ici gagnent moins qu'en Ontario, a indiqué M. Amyot, tout en refusant de préciser ses revendications en matière de rémunération.
«Dans (le calcul de) notre écart de rémunération, est-ce qu'on inclut ou on exclut ces augmentations (obtenues par les médecins ontariens), moi je vous dis qu'on devrait les inclure», s'est-il borné à opiner.
En outre, un gel de l'enveloppe à 3 milliards $ pourrait se traduire par une réduction de services, une menace qu'a laissé planer le grand patron de la FMOQ.
«Si le gouvernement, on ne paie plus tel service, peut-être que 3 milliards $ seront suffisants», a-t-il dit.
La FMOQ estime ne pas être responsable des problèmes d'accès à des rendez-vous. C'est plutôt la faute des CISSS et des CIUSSS, a plaidé M. Amyot.
Avec de l'information de Patrice Bergeron pour La Presse canadienne