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Dans un courriel de trois pages transmis au cabinet de la ministre des Sports, Hockey Canada se targuait alors de sa gestion sécuritaire du sport, qui était «sans pareille», soutenait-on.
Hockey Canada avait déjà informé le gouvernement fédéral dès 2019 de l'existence d'un fonds pour régler les «responsabilités non assurées», alors même que l'organisme se préparait à une «importante poursuite potentielle» pour agressions sexuelles.
Dans un courriel de trois pages transmis au cabinet de la ministre des Sports, Hockey Canada se targuait alors de sa gestion sécuritaire du sport, qui était «sans pareille», soutenait-on.
Du même souffle, l'organisme exprimait des inquiétudes à la fois au sujet d'un éventuel mécanisme d'enquête externe, par un tiers, et même du nouveau numéro sans frais offert pour dénoncer des cas éventuels d'agression sexuelle.
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Le courriel, signé par Glen McCurdie, qui était alors vice-président des assurances et de la gestion des risques à Hockey Canada, évoquait déjà le fonds national utilisé pour les «responsabilités non assurées», y compris les poursuites pour agressions sexuelles, que l'organisation maintient depuis la «fin des années 1990». Le courriel de trois pages de M. McCurdie a été obtenu par La Presse Canadienne.
L'organisme national du sport fait l'objet d'un examen minutieux depuis les allégations d'agressions sexuelles qui auraient été commises à la suite d'un gala de mérite sportif en 2018 à London, en Ontario. Ces agressions présumées auraient impliqué huit joueurs non identifiés, dont des membres de l'équipe mondiale junior de cette année-là. On a aussi appris en mai dernier que Hockey Canada avait conclu un règlement à l'amiable pour étouffer l'affaire.
Des allégations d'agressions sexuelles en groupe impliquant l'équipe junior mondiale de 2003 ont aussi émergé en juillet dernier.
Aucune de ces allégations n'a été prouvée devant les tribunaux.
Ottawa a coupé son financement à Hockey Canada en raison de sa gestion de l'affaire et du règlement à l'amiable, tandis qu'un certain nombre d'entreprises ont suspendu leurs commandites.
«Ce n'est un secret pour personne que Hockey Canada a été contraint d'agir en matière d'inconduites sexuelles spécifiquement à la suite des révélations de Graham James/Sheldon Kennedy, qui ont secoué non seulement notre sport, mais la nation dans son ensemble à la fin des années 1990», écrit M. McCurdie dans le courriel.
«Nous sommes très fiers de ce que nous avons accompli et continuons d'accomplir. Lorsque nous avons été confrontés à cette situation pour la première fois, nous avions des problèmes financiers à régler, en termes de réclamations non financées provenant de joueurs de hockey, professionnels et autres.
«Nous avons aussi dû mettre en place un programme auquel nos membres pourraient avoir accès s'ils avaient des préoccupations similaires qui étaient de nature moins publique. Nous nous sommes occupés de nos «obligations financières» en traitant les réclamations et les réclamations potentielles signalées.»
Kirsty Duncan dit qu'elle n'a pas reçu le courriel
Kirsty Duncan, qui était ministre des Sciences et des Sports de 2015 à 2019, a déclaré qu'elle n'avait pas reçu le courriel de Hockey Canada adressé à Michael Paramathasan, un ancien conseiller principal en politiques au ministère. Le courriel a été envoyé le 29 octobre 2019.
«D'après cette lettre, cette organisation ne comprend tout simplement pas - et ne comprend pas trois décennies plus tard - l'horreur de ce qu'a vécu Sheldon Kennedy, après Larry Nassar et les gymnastes américaines, a déclaré Mme Duncan à La Presse Canadienne. Et je pense que ce que la lettre montre est ce que (les dirigeants) pensaient vraiment, derrière les portes closes, et non lorsque les yeux de la nation les regardaient et les jugeaient.»
Mme Duncan avait annoncé plusieurs initiatives de «sport sécuritaire» en mars 2019, y compris une ligne d'assistance téléphonique confidentielle nationale sans frais pour les victimes et les témoins d'agressions dans le sport. Elle a également annoncé que les organisations nationales de sport devaient se doter d'une politique de «sport sécuritaire» et prendre des dispositions pour avoir accès à un enquêteur indépendant.
M. McCurdie écrit que ce qui était peu connu de la plupart des membres de Hockey Canada, «ou du système sportif canadien dans son ensemble, c'est que nous avons également acheté un produit d'assurance pour traiter les réclamations pour abus/inconduite sexuels, sur une base rétroactive».
La nouvelle de ce «produit d'assurance» a explosé en juillet lorsque des responsables de Hockey Canada ont déclaré au comité du patrimoine de la Chambre des communes qu'il avait utilisé le Fonds national de l'organisation, qui puise dans les frais d'adhésion au hockey mineur, pour payer 7,6 millions $ en réclamations non assurées dans neuf règlements liés à des agressions sexuelles depuis 1989. Ce montant n'incluait pas l'incident présumé de London.
M. McCurdie écrit qu'il ne pouvait pas «entrer dans les détails» de l'importante réclamation potentielle, mais rappelle que la possibilité d'accéder à un avocat ou aux communications de crise a «énormément» aidé l'organisme.
Par contre, «si nous avions été gênés par un «mécanisme sportif» avec signalement et approbation par une organisation tierce encore inconnue, nous croyons fermement qu'un préjudice irréparable aurait pu nous être infligé», poursuit le vice-président.
M. McCurdie souligne que dans la poursuite potentielle, le ou les athlètes sont le ou les auteurs présumés, et non victimes. «Le concept d'une firme d'enquête tierce aurait éliminé notre capacité à protéger réellement les athlètes dans cette situation, cela ne fait aucun doute», écrit-il, ajoutant que Hockey Canada croit en des solutions sur mesure à des problèmes précis, et qu'un processus uniforme pour chaque sport nuirait à la capacité d'un organisme national de sport à faire face à certaines situations spécifiques.
Les arguments de M. McCurdie au sujet du projet pilote de ligne téléphonique gratuite pour dénoncer les agressions, a-t-il dit, portaient en grande partie sur le volume considérable de plaintes, dont beaucoup «ne sont pas nécessairement valables».
«Nous avons de nombreux parents qui utilisent des plaintes de cette nature comme base sur laquelle changer d'équipes/d'associations.»
Ni Hockey Canada ni M. Paramathasan n'ont immédiatement répondu aux demandes de commentaires.
Les premiers ministres Justin Trudeau et l'ex-joueur Sheldon Kennedy ont récemment condamné le leadership de Hockey Canada, affirmant que l'organisme avait perdu la confiance des Canadiens. Leurs commentaires sont intervenus après que le conseil d'administration de la fédération a annoncé qu'il soutenait le président et chef de la direction, Scott Smith, et son équipe de direction, malgré les appels au changement à la direction.
«Hockey Canada ne souhaite pas être encombré par un système ou un processus qui nous lie les mains et ne nous permet pas de gérer une situation comme nous le jugeons nécessaire «, écrivait M. McCurdie en 2019. «Nous vous demandons simplement de garder cela à l'esprit alors que vous continuez à nous diriger dans une stratégie collective de sport sécuritaire.»
Mme Duncan estime aujourd'hui que les valeurs et les priorités de Hockey Canada font fausse route. «La priorité numéro un de toute organisation sportive est le sport sécuritaire. Voilà une organisation qui a rejeté la sécurité dans le sport avec des arguments égoïstes - c'est ce que dit cette lettre. Ils ne voulaient pas de règles, parce qu'ils ne voulaient pas être exposés, a-t-elle dit. J'aimerais savoir s'ils sont toujours fiers de leur succès dans ce domaine.»
Le député néo-démocrate Peter Julian, quant à lui, demande au gouvernement fédéral de procéder à un audit approfondi des finances de Hockey Canada depuis 2016.
La demande, faite dans une lettre adressée à l'actuelle ministre des Sports, Pascale St-Onge, le 6 septembre, fait référence à des milliers de dollars de dépenses attribuées à l'instance dirigeante nationale du sport, notamment des repas gastronomiques, des suites d'hôtel luxueuses et des bagues de championnat pour les membres du conseil d'administration.