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Pourtant, dans les documents déposés à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, le Canada faisait valoir que ce parti était «responsable de nombreux actes de terrorisme».
Quelques mois après avoir soutenu que le parti au pouvoir au Nigéria était responsable d'actes terroristes, le gouvernement canadien a délégué un ministre à Abuja pour assister à l'investiture du nouveau président.
Le ministre de la Diversité et de l'Inclusion, Ahmed Hussen, s'est rendu au Nigéria pour assister lundi dernier à l'investiture du président Bola Tinubu, dont le parti, le Congrès des progressistes, dirige le Nigéria depuis 2015.
Pourtant, dans des documents déposés à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, Ottawa qualifiait le parti au pouvoir «d'organisation qui s'est engagée dans la subversion des processus démocratiques tels qu'ils sont compris au Canada» et disait qu'il était responsable de nombreux actes de terrorisme.
Cette formulation apparaît dans une décision d'immigration de décembre dans laquelle l'arbitre a rejeté la tentative d'Ottawa de déporter sur ce motif au Nigéria un homme qui n'est pas identifié.
Le gouvernement canadien faisait valoir à l'époque que le parti du président Tinubu avait utilisé «des hommes de main armés pour intimider les électeurs et éliminer des opposants politiques», mais aussi qu'il avait incité à la violence entre les groupes depuis la fin du régime militaire en 1999, indique le dossier de la Commission.
Mais l'arbitre conclut que «le fardeau de la preuve requis pour les allégations de terrorisme et de subversion d'un processus démocratique n'a pas été rempli» par le gouvernement canadien.
L'arbitre note que le Canada avait souligné les déclarations de politiciens affiliés au parti qui, selon lui, incitaient à la violence, alors que ces commentaires semblaient plutôt être du domaine de l'opinion. Une personne citée par les avocats du gouvernement était membre d'un tout autre parti.
Au cours d'autres audiences en immigration, le Canada a également porté plainte contre l'autre principal groupe politique du Nigéria, le «Parti démocratique du peuple», l'accusant de soutenir le terrorisme dans ce pays.
Le haut-commissariat du Nigéria à Ottawa n'a pas encore répondu à une demande de commentaire.
Ebenezer Obadare, chercheur principal pour les études africaines au sein de l'organisme Council on Foreign Relations, à Washington, a déclaré que lui et d'autres qui `détestent' le parti au pouvoir au Nigéria peuvent certes lui reprocher de ne pas en faire assez pour prévenir le terrorisme, mais pas de le soutenir activement.
«Dire qu'il est responsable du (terrorisme), ce serait exagéré. Ça va trop loin, a déclaré M. Obadare. Ce n'est pas un parti qui a parrainé le terrorisme. Je n'ai vu aucune preuve qui l'appuierait.»
Affaires mondiales Canada a renvoyé au ministère de la Sécurité publique les questions sur les allégations d'Ottawa concernant le terrorisme. «La présence ministérielle du Canada à l'investiture présidentielle au Nigéria est une représentation concrète de l'intérêt et de l'engagement continus du Canada envers un pays très important sur le continent africain», a écrit la porte-parole d'Affaires mondiales, Patricia Skinner.
«Le Canada est un champion de la gouvernance démocratique et inclusive, et reconnaît la transition pacifique du pouvoir en cours dans la plus grande démocratie d'Afrique.»
La visite du ministre Hussen intervient alors que le gouvernement libéral de Justin Trudeau retarde sans cesse son «plan pour l'Afrique», qui n'est plus décrit comme une stratégie semblable à celle qu'Ottawa a lancée l'automne dernier pour l'Indo-Pacifique.
Les libéraux prévoient plutôt de publier un «cadre», principalement axé sur la façon dont l'empreinte diplomatique du Canada sur le continent africain pourrait mieux servir ses objectifs commerciaux et de développement.
M. Obadare rappelle que le Canada jouit d'une excellente réputation dans la majeure partie de l'Afrique et devrait nouer des liens plus étroits avec des pays de ce continent qui partagent les mêmes idées, notamment par le biais de visites ministérielles.
«Le Canada a beaucoup à gagner à être plus proactif. Je pense que le Canada est l'un de ces pays qui, de plus en plus, selon moi, ne se met pas assez en valeur, a-t-il déclaré. Le Canada devrait joindre le geste à la parole, et l'une des façons de le faire historiquement est de soutenir la cause des démocraties libérales.»